J’ai essayé de faire comprendre les beautés de la création, sous toutes ses formes... Sinon j’ai le sentiment de mourir ou d’être mort, plus exactement. Je n’existe, je ne vis que dans la mesure où je peux m’approcher des moments de création, de beauté.
L’art est indispensable parce que c’est la création. La création, c’est ce qui fait que l’homme est vivant. C’est ce qui le caractérise par rapport aux animaux, par rapport à tout. C’est par la création qu’il s’approche d’un absolu qui est autre, qu’on appelle dieu, qu’on appelle comme on veut.
(interview France Inter)
Je continue, je veux continuer à apprendre et à désapprendre. Ces deux notions sont intimement liées: on ne peut pas désapprendre ce que l'on n'a pas appris. Quand des jeunes gens viennent me demander : « Comment fait-on du cinéma? Comment est-ce que vous avez fait du cinéma? », j'ai beaucoup de mal à leur faire comprendre que l'apprentissage a un début mais qu'il n'a pas de fin.
Curieusement, le cinéma est un métier que les gens considèrent comme très facile : en apparence, n'importe qui peut prétendre devenir producteur ou metteur en scène. On sait que pour être médecin, avocat ou architecte, il faut étudier de nombreuses années. Les métiers artistiques comme la peinture ou la sculpture s'apprennent aussi. Les métiers techniques liés au son et à l'image exigent des diplômes. Au cinéma, on ne reconnaît pas la nécessité absolue d'un apprentissage. C'est, pour moi, une marque de mépris. Un regard, un œil, une pensée se cultivent et se remettent en cause.
Il faut apprendre à lire, à écouter, à regarder. Dans cet ordre. Lire est incontournable. Connaître ce qui a été écrit. L'écrit est porteur d'idées, d'histoire. Un film, c'est d'abord un scénario. Même si, comme Godard, on veut détruire le scénario, il faut commencer par en posséder un. Sans culture, on raconte moins bien des histoires. On les croit nouvelles alors qu'elles ne le sont pas : certains reproduisent la réalité, d'autres l'enrichissent, peu la transforment en créant.
Écouter. De la même façon que l'oral précède l'écrit, la parole, selon moi, précède le regard. De l'écrit et de l'oral naît l'image. Et cette image peut servir à illustrer ou à créer.
La notion d’auteur en France implique parfois une sorte de toute-puissance entraînant peur ou mépris vis-à-vis du producteur.
On doit acquérir une série de réflexes tout au long de la vie d’un film car il faut pouvoir réagir à tout moment. C’est ce qu’avait compris Godard : j’avais peut-être le potentiel de bon producteur, mais je n’en avais pas ma technique.
Le grand talent accepte les critiques."