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Citations de Marin Malaicu-Hondrari (19)


Je me rends compte qu’on peut écrire infiniment, qu’on écrira infiniment, qu’aucun livre n’aura le pouvoir de flétrir la littérature.
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Les raisons qui poussent les gens à rester en vie, c'est à mourir de rire.
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Marin Malaicu-Hondrari
Fumigènes
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Je reste dans la cuisine qui regorge de fumées
je fume et je tousse et je renifle
je lis encore ton livre et mon cerveau s’allume
et je ne sais pas si l’on se reverra.

Quand tu m’as pris dans le taxi avec toi
nous étions des os remplis de froid
nous nous taisions avec acharnement
nous roulions sur les boulevards
sans savoir où nous étions
je serrais tes doigts jusqu’à l’os
et la nuit descendait du ciel gelé.

« Ne mords pas mon poignet », tu disais,
« c’est le lieu de de la mort »
et tu ramassais sur la poitrine un châle et trois fleurs.
Minuit avait sonné parmi les bières
pour s’égarer entre le vin chaud et les cendriers
et nous étions de plus en plus convaincus
de la mort imminente
de toute façon nous n’allions pas pouvoir durer
et tu as dit « allons dans un beau lieu
propre et chaleureux
qu’Elle ne vienne pas nous emporter ainsi
en direct du bistrot
allons mettre des habits de fête
et faisons-nous des câlins »

… et les ombres des oiseaux laissaient des taches obscures sur ton tapis
et sur le parking aperçu au-delà du chambranle

pensées nocturnes d’un esprit mélancolique
qui enchaîne les cigarettes comme un chapelet
un cadavre dans la cuisine qui regorge de fumées
à trois mètres de la terre
entre les bétons

je me demande si tu dors – tu es comme une taupe,
je ne sais pas ce que tu fais toute la journée
et la nuit, quand je te tiens dans mes bras, tu creuses des galeries –
et la tristesse met sa buée sur toutes les fenêtres
sur tous les verres
elle pulvérise tous les gestes
et tous les organes
jusqu’à ce qu’ils te disent :
si ça ne tient toujours pas la route
si même nous, nous n’arrivons pas à vivre ensemble,
alors qu’on envoie au diable toute la vie
l’amour y compris

(Traduit par Radu Bata)
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Quand je fermais l’eau, j’entendais les voix dans l’oliveraie. On y parlait roumain, ukrainien, polonais, espagnol avec l’accent équatorien ou colombien, je n’étais pas sûr, de toute façon j’étais convaincu que c’étaient des immigrés, la plupart illégaux, comme moi. Moi aussi j’avais fait toutes sortes de boulots au noir, j’avais ramassé des olives, cueilli du raisin, des oranges, j’avais lavé des voitures, j’avais été chauffeur particulier et surtout gardien, j’avais fait de tout, mais cela ne me rendait pas solidaire de ceux qui à leur tour faisaient de tout. J’étais écrivain et cela ne me sortait jamais de la tête.
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J’avais quitté la Roumanie comme un homme quitte une femme, en vitesse et sans trop savoir pourquoi. Je m’étais auto-exilé. Je pensais au Groenland, à six mois de nuit. Je pensais que je conduirais jusqu’au Groenland. Je pensais que tout ce que j’avais fait jusque-là, c’était regarder à travers des jumelles que j’avais difficilement adaptées à ma vue. Le problème reste que celui qui voudra voir clair, après moi, à travers les mêmes jumelles, devra les régler à son tour.
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La nausée du même, de la conformité. L’Insoutenable Légèreté de l’être, ce titre dit tout. La nausée de l’alignement du côté du rouleau compresseur. Le mal de l’alignement.
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En 1923, à 20 ans, Sadegh Hedayat écrit un essai sur le poète iranien. Douze ans plus tard, il en écrit un autre. Il perçoit la souffrance difficile à exprimer qui le relie au poète. Une douleur tenue à distance à coup d’écriture, d’opium et de vin. Au point que les ressemblances avec Fernando Pessoa s’effacent. Sadegh Hedayat est un autre des suicidés qui me sont chers. Déraciné, il erre entre la France, la Belgique, l’Ouzbékistan. Il retourne à Téhéran, part en Inde où il publie le roman qui fera de lui le plus grand écrivain iranien du XXe siècle : La Chouette aveugle. Un livre hallucinant, grâce auquel il prend une place définitive aux côtés de ceux qu’il aimait : Maupassant, E. A. Poe, Sartre, Kafka, Rainer Maria Rilke. Fasciné par Les Cahiers de Malte Laurids Brigge, il en écrit en 1927 un commentaire intitulé Marg (« Mort »). La même année, il se jette dans les eaux de la Marne mais, je le répète, il n’est pas si simple de te débarrasser de ce corps qui se paie déjà tout le dur boulot.
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Je descendais du bus et ce que je voyais en premier c’était une affiche du film de l’iranien Abbās Kiārostami, Le Goût de la cerise, dont le personnage principal cherche qui pourra reboucher le trou où il a l’intention de s’ôter la vie.
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Elle tenait sous le bras un exemplaire des Cuentos de amor de locura y de muerte. En voilà un titre fascinant, d’autant plus qu’il a été publié en 1917 sans signes de ponctuation. Une façon de signaler que tout est lié : amour folie mort, pas de virgule, pas de pause. Ce titre continue de me fasciner, et quand Iris m’a prêté le livre, j’ai été conquis sur-le-champ. La vie d’Horacio Quiroga n’est pas vraiment celle de tout écrivain.
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Beaucoup se sont aventurés à dire que Diane Arbus révélait la face sombre du rêve américain. Je ne crois pas que Diane avait des intentions sociales ou politiques. Je crois plutôt qu’elle a été, je ne peux pas le dire autrement, un Beckett de la photographie. Elle s’est suicidée à New York, en plein été, quand les vers doivent être tout près sous la surface du sol.
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[…] j’œuvrais avec nonchalance et efficacité à mon livre, le livre des suicidés. J’écrivais monstrueusement. Le livre levait comme un pain capable de tous les nourrir.
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Peu importe le choix que je ferai, avant de m’endormir j’écrirai et j’écrirai. Pas d’autre issue. Une compulsion pour la littérature. Commettre, ingurgiter et régurgiter, déféquer et masturber de la littérature. Dormir du sommeil des livres. Au début du voyage, quelque chose m’avait fait croire que je pourrais accéder à un secret, qu’une petite porte m’avait été ouverte, mieux, je m’étais retrouvé en droit d’écrire au sujet du secret qui allait m’être révélé. À présent je voyais ce droit comme celui du condamné qui a droit à une dernière cigarette, à un dernier coup de fil, à ses derniers mots.
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Seigneur ! Je me rends compte qu’on peut écrire infiniment, qu’on écrira infiniment, qu’aucun livre n’aura le pouvoir de flétrir la littérature. Aucun livre et aucun geste, et même pas celui de s’ôter la vie. C’est affolant. « ¡ Por Dios, cuantas palabras ! »
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Chet Baker ouvrit la fenêtre et direction le ciel, aller simple. C'était à Amsterdam et là-bas le ciel s'est soudain rapproché.
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Je parcourais l’Andalousie. Je ne fatiguais pas. Dès que je fermais la portière et que je démarrais, j’entrais en transe. C’était comme si j’avais appuyé sur un interrupteur. Je rêvais à ce que j’allais écrire une fois arrêté. Là, dans la voiture, je devenais sûr de mes intentions. Confortablement assis sur le siège, les yeux fixés sur le ruban d’asphalte, la main gauche sur le volant et la droite sur le levier de vitesse alors que c’était une voiture à boîte automatique, j’œuvrais avec nonchalance et efficacité à mon livre, le livre des suicidés. J’écrivais monstrueusement. Le livre levait comme un pain capable de tous les nourrir. J’étais dépendant du bercement de la voiture, du glissement muet du paysage. Une fois que j’étais descendu de voiture, mes idées se brouillaient, m’empêtraient affreusement, ce qui jusqu’alors avait été précis devenait probabilité, intention. Je n’écrivais pas, je rêvais que j’écrivais : c’était valable aussi bien au volant qu’en dehors de la voiture.

J’avais découvert en moi un interrupteur, un déclencheur sensible au moindre battement d’aile de mouche. Je portais en moi une mine antipersonnel dont la détonation me faisait exploser la tête et c’était alors un fascinant envol d’idées. Je voyageais dans un véhicule onirique plein à craquer de suicidés. Je n’avais aucune direction, rien ne sortait de tout ce que j’écrivais. Tout restait déposé dans l’impondérabilité.
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La désolation des lieux où je vivais s’imposait à moi. Ma vie ressemblait de plus en plus à celle de mon père. Pendant des années il avait surveillé des silos, des dépôts, pendant des des années il avait échafaudé des plans pour moi et mes frères, pendant des années il avait bu comme un trou. Il était plein d’intentions. Il aurait été mieux placé pour écrire un livre sur toutes les intentions. D’une certaine manière, ce livre, il l’a écrit, parce qu’une nuit il a décidé qu’il ne verrait pas le matin.
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Mon intention d'écrire un livre en une nuit doit être prise comme une intention de me suicider.
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J'étais un homme seul qui boit un café froid.
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Je supporte difficilement l'idée que nombre de mes écrivains préférés ne soient pas suicidés.
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