VERGER
Pour ce martyre,
Pour ce délire ;
À ma vieillesse
Donne un verger.
Pour ma vieillesse
Et ses détresses,
Pour mon labeur —
Années voûtées,
Chiennes d'années,
Années-brûlures :
Donne un verger...
Et la fraîcheur
De sa verdure
À l'évadé :
Sans — voisinage,
Sans — nul visage !
Sans — nul railleur !
Sans — nul rôdeur !
Sans — œil voleur !
Sans — œil violeur
Sur le qui-vive
Sans puanteur !
Sans bruit de cœur !
Sans âme vive !
Dis : assez souffert — tiens, voilà !
Prends ce verger — seul comme toi.
(Mais surtout, Toi, n'y reste pas !)
Prends ce verger — seul comme moi.
De ce verger, fais-moi cadeau...
— Ce verger ? Ou bien — I'Ici-haut ?
Fais-m'en cadeau en fin de route —
Pour que mon âme soit absoute.
1er octobre 1934
p.201-202