Le 23 août 1944, l’armée Rouge n’a pas seulement libéré la terre roumaine, elle a aussi libéré les âmes. Pour la première fois dans l’histoire du pays, une promesse de liberté et de démocratie pointait à l’horizon.
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L'Armée rouge a libéré la Transnistrie au cours de la deuxième quinzaine de mars 1944. Partis le 10 mars de la région d'Uman, les soldats soviétiques ont traversé le Bug dans la nuit du 16 et atteint la rive du Dniestr quatre jours plus tard. La rapidité de l'attaque a vite désorganisé les armées fascistes, en proie à une véritable débandade. Les survivants du calvaire de Transnistrie étaient physiquement sauvés [voir chapitre VII]. Leurs âmes, en revanche, étaient perdues à jamais.
À Buzău, par exemple, la police légionnaire arrête une vingtaine de jeunes sionistes âgés de 16 à 20 ans. Après avoir été torturés pour qu’ils avouent leur appartenance au mouvement communiste, ils sont traînés devant la cour martiale. Finalement acquittés, ils auront un peu plus tard à payer au prix fort cette « farce » légionnaire. Fichés par la Sûreté de l’État, ils seront par la suite déportés en Transnistrie, où presque tous seront tués.
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Au côté du général Antonescu, le chef du gouvernement, les Gardes de fer se rendent progressivement maîtres de la rue, défilent, patrouillent et chantent – surtout, ils chantent : leurs chants de haine, de sang et de mort.
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Quant au ministre de la Justice, le professeur Ion V. Gruia, dont la chemise était un peu moins verte que celles de ses collègues, il aura droit à toutes sortes de louanges pour avoir édicté son célèbre statut des Juifs. Plus tard, des Juifs payeront cher ses services d'avocat dans différents procès fondés sur des lois qu'il avait lui-même édictées… Pour l'heure Gruia était surtout impatient de congédier les magistrats, les procureurs et les avocats juifs du pays.
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