AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Gabrielle_Dubois


Pour en venir aux conséquences du "système français" sur la psychologie de notre jeunesse, il est facile de comprendre l’effet destructeur d’une pareille institution, tolérée et reconnue par les Pouvoirs Publics, par l’autorité imposante et respectée que représente l’État.
L’Église catholique, le protestantisme, le judaïsme, toutes nos religions, toutes nos écoles, libres ou laïques, tous nos maîtres, tous nos philosophes, prêchent à notre jeunesse la droiture dans les mœurs. L’enfant, l’adolescent, sont imprégnés de cette leçon. "La Pureté", le respect de l’acte sexuel, une certaine discipline, la maîtrise de soi, une certaine continence, même en mariage, sont les éléments indispensables d’une vie noble.
Or, brusquement, vers l’âge de quinze ou dix-huit ans, voilà notre jeune homme placé devant les plus bouleversantes révélations. Voilà l’État, celui qui a payé ces maîtres, ces écoles, conseillé cet enseignement, favorisé ces leçons, voilà l’État lui-même qui vient insinuer: "Oui… bien sûr… Pureté, propreté, santé morale… Mais en tout cas, si tout cela ne te dit rien, j’ai aussi mes bordels…"
C’est avouer ouvertement que le vice est nécessaire et inévitable. C’est avouer qu’on doit y sacrifier chaque année quelques milliers de malheureuses femmes en victimes nécessaires. C’est faire entrer dans l’esprit du jeune homme la plus terrible, la plus dissolvante des idées : celle de la fatalité. Fatalité de la débauche. Fatalité des destinées immolées pour les satisfaire. Comment voulez-vous, après cela, qu’ils croient encore à la justice, vos jeunes ?
Croyez-le, c’est souvent pour l’adolescent un choc, une émotion, cachée soigneusement, sans doute, mais profondément ressentie, d’apprendre un jour, par des camarades plus avertis l’existence de ces maisons et de leur caractère officiel. D’apprendre que l’État régit et contrôle ces espèces de boucheries à chair humaine vérifiée et estampillée. Il semble tout à coup qu’on découvre, sous l’aspect décent et moral de la civilisation, un cloaque.
Hé, quoi? C’est cela, la vie? La morale? Derrière tout ce qu’on nous enseigne, il y a cela? Alors, pour nous, les jeunes, il y a le manuel d’éducation civique et le catéchisme, et pour l’adulte, l’homme averti, il y a le bordel? On nous a menti, en somme, la vie n’est qu’une immonde saleté, cachée sous le mensonge. Comédie humaine ! Voilà l’impression confuse et puissante qui en demeure. La sensation d’un effondrement. Le doute, le scepticisme, en face de l’État, de l’édifice social, de la civilisation, de l’humanité, contrainte, malgré tous ses beaux discours et ses appels à l’idéal, de conserver intacte l’institution du boxon. Allons! Il faut croire que nous avons besoin de ça, comme des égouts et des fosses d’aisance… Inévitablement, inéluctablement.
Mais de quel œil un garçon de quinze ans regarde, après cela, ceux qui viennent lui parler de croire en l’homme, en la destinée de l’homme!
Le monde, la civilisation, la vie, seraient-ce des choses qui mériteraient qu’on luttât pour les sauvegarder, pour les perpétuer, s’ils avaient besoin, pour durer, de pareilles injustices, d’une pareille et permanente immolation de victimes vouées aux plus abjectes déchéances? Oseriez-vous parler de foi en la vie, de devoirs envers la vie, si celle-ci ne s’entretenait qu’au prix d’une pareille putréfaction nécessaire? Or, en accordant droit de cité à la maison de tolérance, au vice, c’est justement là l’idée que vous implantez, sciemment ou non, dans l’esprit de notre jeunesse. Et vous osez vous plaindre après d’un certain scepticisme égoïste, d’un certain pessimisme stérilisant chez nos jeunes? (…)
Estimez-vous qu’une pareille dévastation de la mentalité chez nos adolescents soit une chose négligeable?
Estimez-vous, par ailleurs, qu’il soit indifférent pour une nation que ses fils prennent de l’amour et de la femme cette conception hideusement matérialiste et bestiale? Quels époux feront-ils plus tard? Mamans de chez nous, vous avez des fils, des fils de vingt, dix-huit et quinze ans. Les voyez-vous entrant dans ces bouges, choisissant une femme, l’estimant d’un coup d’œil, depuis le visage jusqu’aux seins, jusqu’aux cuisses, refusant celle-ci parce qu’elle est "mal foutue", et le lui déclarant carrément, refusant celle-là parce que trop chère, et se contentant d’une troisième après long examen et marchandage? J’exagère? Les hommes qui sont passés par là savent bien que non. C’est bien cela, l’atmosphère du bouge. C’est bien ainsi qu’un adolescent y fait son choix! Voilà le climat, l’endurcissement de la conscience et du cœur, l’accoutumance au monstrueux que va chercher notre jeunesse au bordel!
Commenter  J’apprécie          00









{* *}