Michel Caron (II)

Ah ! Que vous envisagez d'un œil froid les misères du peuple !
Les principes de mon gouvernement sont autres. Je porte dans mon cœur les êtres souffrants, les petits. Je m'indigne quand je vois les riches se procurer des jouissances inaccessibles au plus grand nombre.
Je ferai tout ce que je pourrai pour améliorer la condition matérielle des travailleurs, de ceux qui plient sous le poids de la nécessité sociale…
Je ne dis pas qu'on me respecte, je ne dis pas qu'on m'aime, qu'on me vénère. Je dis que le peuple m'adore.
Si je le veux, je me ferais élever des statues. Dans votre pays on en a bien élevé à des chefs d’État qui se souciaient moins du peuple que de la dernière de leurs maîtresses.
Mais je suis, moi, bien au dessus d’eux avec le suffrage populaire qui me sert de base. Je suis Washington, je suis Napoléon Bonaparte, je suis Juan Perón, je suis De Gaulle, je suis Mussolini, je suis George Bush ! (MACHIAVEL)

Il va falloir du tact. Je vous fais confiance. Nous marchons sur des œufs… Alors surtout pas de maladresses. Rien qui puisse importuner les proches, enfin les relations de la victime…

Le départ. La réalité rattrape mes petites obsessions. Je prends le train pour Barcelone décidé à m’engager.
J’ai quitté la maison un peu lâchement. Je ne me voyais pas expliquer que… Quoi d’ailleurs ? Comment faire comprendre à ma mère ce qui me poussait à quitter la France, alors que j’obéissais plus à une pulsion qu’à une conviction étayée ? Je me suis contenté d’un mot griffonné, raturé, sans doute incompréhensible ! Je voulais lui dire qu’elle pourrait, peut-être, recommencer à vivre, pendant que moi de mon côté, j’allais commencer… Et puis je donnerai régulièrement de mes nouvelles. Sans doute y ai-je cru !

Je suis Antoinette. Tout le monde ici m’appelle par mon prénom. Une entreprise familiale.
Il est 18 h 30 et je suis à l’heure.
Dix-huit heures trente précises. Pas 18 h 40, ou je ne sais trop quoi.
Montrant le fond du plateau.
Le hall d’entrée de l’entreprise Lajolie. Là où on accroche nos manteaux en entrant et où on les renfile quand le boulot est fini, à 18 heures.
Sauf aujourd’hui où nous devons être ici à 18h30.