Sous l’eau claire
de l’abat-jour
passent des femmes bleues
des femmes rouges
avec des sourires jusqu’au bout des mains
des écritures multiples sur leur peau
et des chansons de désert
Elles ont la liberté des routes infinies
le goût du miel et de l’orange
ce qu’elles disent
n’est pas compréhensible
mais c’est bonheur de les interpréter.
Ciel gris sur Paris mouillé, ciel gris sur les platanes nus qui remuent leurs graines rondes semblables à des oiseaux prisonniers, ciel gris sur les façades qui ne peuvent plus s'envoler.
Et tout autour remue l'urgence, l'énergie, l'audace, tout se confond et la beauté soudain se fait vieille, une chanson interrompue perce le cœur et l'on assemble je ne sais où quelques joyaux comme des braises pour se réchauffer encore.

Dans les lits clos entre caps et îlots un chant de falaise un chuintement blanc de mille chevaux de rage d’embruns du temps qui ne s’arrête plus tandis que les ifs noirs aux dents pointues se moquent des duvets du vent et des baisers vénéneux.
L’île telle un oiseau a peur de la nuit. Elle se cache dans les genêts et les nids de feuilles rousses. Elle erre comme les pirates au milieu des rochers et lance au large des éclairs bleus. Elle récolte les galets et les œufs de goélands et écoute à ravir les chants bretons, lents, répétitifs, pareils à la pluie.
Soleil couchant sur Port Coton. Orange ronde qui sort des nuages et tombe directement dans l’océan. On guette le rayon vert et les nuages nés en tumulte du grand vertige. Là-bas c’est l’Amérique.
Rien n’est plus triste qu’abandonner une île. Ce n’est ni une femme, ni un reflet de l’univers. C’est le monde tout entier qui dérive et s’engloutit de lui-même. On est appelé ailleurs. Qu’importe l’injure est terrible. Les monstres marins peuvent tout à loisir se repaître des forêts, des falaises, des hautes maisons du port, des bateaux et les broyer selon sa logique car tout maintenant est vraiment abandonné.
La mûre tout acide
froide de la nuit
avec ses yeux
de teintes fauves
et ses histoires
à n'en plus finir
C'est elle qui griffe
dans les haies
lorsque les cigales
meurent l'été
La littérature de science-fiction est sans doute l'une des expressions les plus riches et les plus vigoureuses du merveilleux et de l'imaginaire contemporains.
Grâce à elle, notre époque s'est en quelque sorte approprié l'histoire du temps, dans un jeu fastueux où l'imagination de l'écrivain et celle du lecteur entrent en émulation et parfois même en concurrence
En choisissant parmi les plus belles pages d'Asimov, de Bradbury, de Gérard Klein ou de Van Vogt, Michel Cosem a voulu communiquer - aux jeunes, en particulier - le plaisir rencontré au contact d'oeuvres aux multiples visages.
C'est à une véritable initiation qu'il invite ses lecteurs.
(quatrième de couverture de l'édition parue chez "Seghers" en 1975)
— Faites attention à ce que vous dites, affirma le roi, sinon je vous fais couper la tête. Vous n'êtes qu'un ivrogne ! Qu'un voleur !
L’arbre se tait soudain
il retient désormais son pollen il calme l’oiseau
approfondit le nid
laisse les traces transparentes
Il suit dans le ciel les nuages qui se chevauchent
en attente d’on ne sait quoi
peut-être le goût de la pluie
comme une destinée, comme un amour
dans le ciel rouge qui crépite et la forêt au loin qui soupire
Mais soupire-t-elle vraiment ?
Les excentricités les plus excessives n’intéressaient vraiment personne. Leurs ancêtres avaient parcouru tout le pays, en traçant des chemins, en marchant à grands pas derrière les troupeaux ou en transportant de lourds paquetages de l’autre côté de la frontière. Il fallait du courage et de la ténacité pour toutes ces choses, y compris pour vivre au quotidien. Ces qualités s’étaient en eux fortement ancrées. Le chant des riches bourgeois, des capitaines d’industrie, des rois et des présidents, des artistes de tout poil avait glissé comme des gouttes d’eau sur le plumage d’un oiseau. Ils se moquaient d’ailleurs des petits travers qu’ils découvraient ici et là et se faisaient un plaisir de les répandre. Cela resserrait d’ailleurs les liens de la communauté plus habituée à suivre sa logique ancestrale qu’à être sensible aux affaires du monde qui changeait si vite.
extrait 3
J’ai toujours un chant de colombe…
J’ai toujours un chant de colombe dans la tête. Je sais les malices des moinaudes et je ne puis oublier ce rossignol qui, du haut de son grand pin, m’observe tout l’été. Que ferais-je d’un monde sans oiseaux ?
Il est tard
les blés sont couchés
un oiseau tressaille
et la mémoire est comme un nid
Le vent fragile
caresse les buissons
Une voyageuse passe
dans sa robe de feuillage
une ombre l'accompagne
Il est tard
les blés sont couchés