Le maïs pousse pour que l'homme puisse manger, l'avoine pour nourrir les chevaux, l'herbe pour faire brouter le bétail, les fruits pour régaler les oiseaux ; mais les fuchsias ne sont que des ornements aux couleurs exquises, des porcelaines vivantes où le plus savant artiste a combiné les tons les plus simples. Il arriverait à la fin de ses jours, en mâchant du copal, sans avoir éclairci ce problème. Celui qui fait quelque chose, c'est pour que quelqu'un l'en admire, mais la nature produit ces fleurs dans des endroits où personne ne les voit. L'homme qui saurait créer ces miniatures de porcelaine avec tout le mystère de leurs colorations et qui les laisserait se détériorer sans les sortir de son atelier passerait pour un égoïste ou pour un fou ; et lui-même, en voyant son talent si mal apprécié, sentirait que son effort était une chose vaine, une duperie. La duperie dont ces belles fleurs étaient victimes chagrinait Chigüichon Culebro.