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Citation de Charybde2


Marcelo était prêt à essayer de faire les choses autrement. Il était impératif qu’un changement se produise, pour le bien de sa santé mentale.
Était-ce la peur de vivre la fin de sa vie émotionnelle qui l’avait poussé à accepter de jouer à un jeu où l’attendait la défaite ? Son statut de célibataire lui pesait-il ? Il avait vécu des histoires avec des cocaïnomanes, des catholiques intégristes ou des femmes en souffrance. Leurs traces s’effaçaient peu à peu. Le besoin de changement constituait-il un symptôme de la crise de la quarantaine ?
Marcelo voulait se purifier par le travail, même si cela signifiait être trituré par la grande machine administrative. Et même s’il avait choisi la pire administration possible. La bureaucratie d’État est un être vivant complexe, composé de plusieurs organismes reliés entre eux, se ramifiant dans une myriade d’organes, gérés par d’innombrables cerveaux et un vaste système nerveux central, souffrant de schizophrénie, du trouble de personnalité multiple, d’Alzheimer, de Parkinson, de polyarthrite rhumatoïde, d’ostéoporose et d’une fièvre dépensière pathologique profitant à un pourcentage minime de la population. Au Portugal, tout le système était « animé » – Marcelo fronça les sourcils, en quête d’un terme plus adéquat, une déformation de journaliste… – par des fonctionnaires fonctionnellement analphabètes à la base, des cadres intermédiaires peu qualifiés et des dirigeants de haut niveau ayant leur propre agenda.
Certes, il bénéficierait de moyens importants, mais Marcelo pressentait qu’il serait impossible de défaire les mailles criminelles entremêlant le monde de la finance et les milieux politiques, les grandes fortunes privées et les pouvoirs publics toujours moins indépendants. Au moment où il prendrait ses fonctions, il n’aurait que deux options : se plier progressivement aux pouvoirs installés ou devenir une cible à abattre pour les hauts gradés de la police judiciaire, les procureurs, les gendarmes de la bourse, les bureaucrates de la Banque centrale du Portugal et des organismes de contrôle du secteur bancaire, ainsi que pour les politiques et gouvernants corrompus. Pour ce qui était des entreprises et de l’élite financière, Marcelo deviendrait persona non grata s’il devait refuser de se faire acheter. En d’autres termes, Marcelo conserverait peu d’amis.
Tout était-il écrit d’avance ? Perdrait-il dès la première bataille en vue l’indépendance qui lui avait été garantie ? L’invitation faite par le procureur général de la République, un ami de longue date de la famille de Marcelo, avait été définie en concertation avec deux membres du gouvernement et un haut responsable de l’Intérieur. La nature de son poste, temporaire et transversal, et le budget alloué lui conféraient, à première vue, une bonne base de travail. Si tout se passait bien, si le crime en col blanc reculait pour de bon grâce à son action, il pourrait toujours s’exiler à la fin de son « mandat ».
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