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Critiques de Mohamed Abdallah (2)
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Le vent a dit son nom

"Le vent a dit son nom" ou quand la jeunesse algérienne a son mot à dire sur l'Histoire de son propre pays l'Algérie !



Après « Entre l’Algérie et la France, il n’y a qu’une seule page », « Souvenez-vous de nos sœurs de la Soummam », « Aux portes de Cirta », le jeune écrivain algérien Mohamed Abdallah revient avec une autre œuvre littéraire où l'Histoire collective se mêle à l'histoire individuelle pour donner un mélange magnifique entre l’Historique et le Romanesque !



Le vent, cette fois-ci, nous emporte à la veille du déclenchement de la guerre de libération nationale. À Oran, nous suivons le parcours de multiples personnages appartenant à deux mondes différents, à deux bains linguistiques différents, aux multiples doctrines de pensées. Nonobstant, ils regardent tous dans la même direction.



Ils ont contribué à l’éveil de la conscience collective et à la guerre de libération nationale, qui pour M.A, avait été intellectuelle autant que militaire. Des écrivains, des artistes, des journalistes et des activistes politiques aspirent tous, chacun à sa manière, à la liberté de la terre algérienne.



M.A trace, dans les moindres détails, leurs débats respectifs. D’une conscience politique et intellectuelle remarquable, leurs rassemblements avaient été marqué par de multiples questions qu’ils posent pour avancer malgré le doute.



M.A se base spécialement, d’un côté, sur la figure de l’écrivain, sa création littéraire unique et universelle à la fois, son essence, la nécessité de son engagement à côté des siens. De l’autre côté, il se penche sur la figure du journaliste, sa volonté d’explorer de nouveaux horizons et dire la réalité telle qu’elle se présente.



D’autres personnages sont d’une valeur référentielle qui renvoient à des figures emblématiques de la guerre de libération nationale comme Larbi Ben M'hidi et Abane Ramdane et artistique comme Maurice El Medioni et Igor Bouchène.



Dans cette œuvre, M.A questionne le rapport de l’intellect à l'Histoire de sa patrie, à l'Autre. Cette altérité « imposée » a poussé chaque protagoniste à se construire, à réfléchir, à agir selon les moyens qu’il a.



Ce rapport à « l’Autre » que M.A évoque, concerne la langue française. Pour M.A, ce choix relève avant toute autre chose de la résistance. Autrement dit, bien qu’elle soit la langue de colonisateur, ces figures s’en servent pour défendre la cause Algérienne.



M.A n’exclut pas le rôle prépondérant des femmes dans cette révolution libératrice intellectuelle. De multiples personnages féminins, présents dans l’univers diégitique, ont accompagné les hommes dans l’accomplissement de leur engagement.



Si l’aïeule garantie la transmission de la culture ancestrale aux futures générations, la mère s’attache, en ces temps morose, à protéger ses enfants et veiller sur leur éducation. À l’absence du père, elle est la boussole de toute la famille.



La considération de cette œuvre essentiellement comme étant roman historique, c'est ignorer, à mon humble avis, sa complexité. Il est clair que la dimension historique est omniprésente dans "le vent a dit son nom". Il y a plusieurs indices qui renvoient le lecteur à des événements historiques comme les massacres du 8 Mai 1945.



En revanche, M.A ne s’est pas contenté de mettre l’Histoire au centre de son écriture. Différent de l’Historien, le romancier qu’il est, use des faits historiques, pour questionner une période historique précise. À travers un regard critique d’un observateur et une imagination féconde basée sur ses recherches et ses lectures, il exploite ses facettes non connues.



Selon la critique littéraire, un texte est en interconnexion perpétuelle avec d’autres. Ce phénomène textuel est le propre de chaque texte et constitue l’un de ses qualités. Dans ce roman, il réside dans l’appareil titulaire. La phrase du titre renvoie à l’un des vers du poème de Rimbaud sur l’Émir Abdelkader.



Elle est légèrement modifiée par l’emplacement de l’adjectif possessif « son ». Ce dialogue entre les deux textes, que M.A tisse, montre sa volonté de prendre possession du passé historique de son pays sur lequel, il a son mot à dire.



Si le dialogue est intertextuel dans le premier cas, il est, selon Michel Riffaterre, intratextuel dans le second cas. Autrement dit, la coprésence de l'écriture romanesque, l'écriture historique et l'écriture journalistique, dans le même texte, donne forme à cette intratextualité. Elle montre le talent stylistique de M.A. Malgré la différence des trois formes d’écritures, le texte garde cohésion et cohérence.



D’un point de vue stylistique, la plume de M.A est de qualité. Elle regroupe deux formes d’écritures différentes mais leur mélange, dans ce roman, est à saluer. Il s’agit, en premier lieu, de l’écriture classique par l’insertion des passages descriptifs contenant les états d’âmes des protagonistes, les lieux dans lesquels ils se rendent. En second lieu, il est question de l’écriture contemporaine. Malgré la complexité de la thématique abordée, la fluidité stylistique, rend la lecture agréable.



Cette forme d’écriture passe de la stylistique à la question du genre par la coprésence du roman, de la poésie et de la chanson populaire qui rend l'univers romanesque plus dense, présente aussi la diversité culturelle du peuple algérien s’opposant au discours colonial et son projet de civilisation d’un " peuple analphabète, barbare et primitif."



Cette hybridité littéraire que l’on aperçoit dans ce roman s’étale à une autre forme d’écriture « générique ». Il s’agit, en particulier, de l’essai, à travers les réflexions qu’expose M.A sur la critique littéraire, qui, en quelque sorte, une réinvention de toute l’œuvre.



Ce que nous trouvons intéressant, dans cette œuvre littéraire, est la place accordée à la trame spatiale. Elle est d’une importance capitale. Elle se multiplie entre des lieux fictifs et référentiels, ouverts ou fermés. Le monde de l’extérieur représente l’enfermement et l’oppression exercés par le colonisateur français sur la société algérienne.



Il y a, en revanche, le monde de l’intérieur. Malgré sa fermeture, la Mauresque et le café Medioni sont deux endroits dans lesquels les protagonistes se réfugient, se permettent une certaine liberté pour aborder tous les sujets épineux qui les tracassent à cette période décisive de l’Histoire algérienne.



D’une richesse littéraire inépuisable, les points que nous avons abordés dans cette œuvre n’est qu’une lecture parmi d’autres. Une chose dont nous sommes certains est que ce roman mérite toute l’attention des lecteurs pour une meilleure lecture parce qu’il y a toujours des aspects à dévoiler comme l’exprime l’écrivain lui-même :



"[...] Il y a, derrière chaque, chef-d’œuvre une histoire. Parfois, cette histoire se dévoile à nous entièrement, se donne à lire avec transparence. D’autres fois, nous nous retrouvons face à une énigme, un poème qui ne révèle pas ses rimes, une trame qui ne suggère plus qu’elle ne se montre."
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