Monique Blondel

Cathleen sortit deux rouleaux de pâte feuilletée du refrigérateur, les tranches de saumon, six oeufs, le gruyère râpé et la crème fraiche. Tandis que la pâte se réchauffait à la température ambiante, elle cassa trois oeufs dans un premier saladier et trois autres dans un second, ajouta à chacun une bonne louche de crème fraîche, le gruyère et le saumon qu'elle découpa en menus morceaux. C'était l'hiver et elle n'avait pas d'herbe fraîche à y incorporer, comme en été où elle faisait volontiers des razzias dans le pot d'estragon. Mais à quoi ça sert que le Père Ducros, il se décarcasse, hein ? De l'estragon séché ferait l'affaire. Elle battit tous les ingrédients auxquels elle avait ajouté trois tours de moulin à poivre aux quatre baies (toujours ce cher Père Ducros) avant de déposer la pâte dans les moules et d'y verser les préparations. Elle les ferait cuire une demi-heure avant de les laisser reposer. Le lendemain, il suffirait de les réchauffer de cinq à dix minutes pour que ce soit parfait. Cathleen alla se coucher avec la sensation du devoir accompli.

Vous savez, la compassion, de nos jours est une denrée rare.

Les "vilains messieurs" que l'on croise dans la rue et à qui il ne faut pas parler ne sont pas les plus dangereux. C'est au sein de la famille que se perpétuent les crimes les plus odieux.