Monique Slodzian

Un essai passionnant. En nous présentant le parcours et la pensée de plusieurs jeunes auteurs engagés, Monique Slodzian nous introduit dans la société russe sous un angle totalement inédit car ignoré de nos chers médias. Ces auteurs que l'on qualifierait sans doute de "rouge brun" en France et qui seraient en conséquence complètement marginalisés, représente un vrai courant de pensée très populaire en Russie. La caricature grossière mais constante de la Russie, la suffisance de nos journalistes et notre propension à considérer la vision du monde occidentale comme l'aboutissement politico-socio-culturel de l'humanité, font que nous sommes incapables de comprendre ce phénomène. Monique Slodzian nous accompagne avec talent dans la découverte de ces auteurs, de cette pensée et par extension du débat d'idées actuel en Russie, découverte qui s'avère être très enrichissante. Personnellement, cet essai m'a donné envie de lire ces auteurs. Pour confirmer leur absence de notre monde littéraire, voici le nombre de leurs lecteurs sur Babelio.

Prilepine: 38; Chargounov: 0; Sadoulaev: 0 ; Sentchine: 4.Elizarov: 11; Roubanov: 4; Limonov: 67.

Ne passons nous pas à côté de quelque chose? Certains de ces auteurs rentreront peut être dans l'avenir au panthéon des grands auteurs radicaux de la littérature russe.

On a tous une image assez classique et sans doute dépassée de la Russie et de ses écrivains. A travers ce livre qui nous promène dans la politique et la littérature russe, Monique Slodzian, professeur à l'Institut national des langues et civilisations orientales, spécialiste de la Russie et de la littérature russe contemporaine, tente de nous faite toucher du doigt la réalité oh combien complexe de ce grand pays.

Le 30 juillet 2012, Zakhar Prilepine met le feu aux poudres en écrivant une Lettre à Staline (reproduite p.24 à 29) dans laquelle il "ne cherche pas à dissimuler l'existence des crimes de Staline et encore moins à les justifier." (p.10), mais il demande à ce qu'on n'oublie pas que pendant la guerre c'est lui qui a regroupé autour de lui des millions de Russes qui ont repoussé les nazis "C'est à Stalingrad que le projet de Hitler a connu sa défaite. Manifestement, l'Ouest et la Russie ne partagent pas la même mémoire de la guerre." (P. 34), qu'il avait aussi fait avancer la science, ... Il conclut son courrier par cette formule lapidaire : "Nous te sommes tous redevables. Sois maudit." (p.29)

Puis, Monique Slodzian explique comment nous voyons la Russie par nos yeux d'Occidentaux formatés par les médias, comment c'est un pays complexe qu'on ne peut comprendre en un simple reportage de deux minutes au journal télévisé. La situation en Ukraine en est un bon exemple que les dirigeants occidentaux voient en Europe, alors que "les derniers épisodes du conflit ukrainien disent combien l'entrée de l'Ukraine dans l'Union douanière pilotée par la Russie revêt une importance à la fois stratégique et symbolique, en raison même des fondements historiques de l'empire slave." (p.73)*

Elle égratigne au passage le livre d'Emmanuel Carrère, Limonov, qu'elle juge bien écrit mais vu encore une fois par les yeux d'un Occidental qui ne s'est pas mis dans la peau d'un Russe et qui en a donc une vision faussée. Les Russes ont subi le changement des années 90, comme un coup de massue sur la tête, le temps que certains mafieux et autres malfrats prennent le pouvoir par l'argent et ils se sont réveillés plus pauvres qu'ils n'étaient avant.

Elle en vient ensuite à ces écrivains qui se retrouvent au sein d'un même mouvement politique, le Parti National-Bolchévique (PNB) qui a longtemps été dirigé par Edouard Limonov, et qui est résolument contre le régime en place, s'allie avec les libéraux et autres opposants pour le faire tomber aux élections, jusqu'ici vainement. Elle ne fait pas l'impasse sur les propos parfois très tendancieux de Limonov qui ont pu, à tort, faire penser à certains que le PNB dérivait vers l'extrême droite.

Cet essai est "une rencontre moins convenue avec la Russie" comme me l'écrit Monique Slodzian dans sa dédicace, une lecture qui permet de ne pas toujours regarder l'histoire des peuples par le petit bout de sa lorgnette, mais de se déplacer et de tenter de se mettre à la place d'autrui pour le voir et pour se voir. M. Slodzian finit son livre par des courtes biographies et bibliographies des principaux auteurs nommés intéressantes qui donnent envie de les lire, ce que je vais faire très bientôt avec Zakhar Prilepine et son Je viens de Russie.

* texte écrit avant les tout derniers événements ukrainiens
Lien : http://lyvres.over-blog.com

Un essai qui donne des clés essentielles pour comprendre l’héritage des principaux représentants de la nouvelle littérature russe engagée.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..

Construit comme un essai socio-politique, "Les enragés de la jeune littérature russe" est très court (144 pages) mais néanmoins très dense.



S'appuyant sur l'histoire de la Russie et sa place dans le monde actuel, Monique Slodzian a souhaité mettre en avant ceux dont le monde occidental se désintéresse (consciemment ou non). Et plus particulièrement, l'essai s'attarde à commenter notamment des écrits de jeunes écrivains penseurs russes. Souvent à contre-courant du bien pensum de la société, ils soulèvent les questions qui fâchent, comme par exemple le fait que Poutine joue de la terreur communiste passée alors que certains osent à dire que tout n'était pas à rejeter et que la Russie actuelle souffre d'une image négative, créée soit par sa propre nation, soit par les Etats-Unis et les pays européens.



Un essai somme toute intéressant, mais que j'ai trouvé beaucoup trop compliqué d'approche pour un néophyte. Les analyses de textes sont parfois très poussées et pas du tout vulgarisées. Je pense que cet ouvrage n'est pas fait pour tout le monde. Pour ma part, il ne m'a malheureusement pas apporter ce que je cherchais.

Néanmoins, je tiens à préciser la qualité du texte, qui sera plus intéressants pour des personnes calées dans le domaine géopolitique.

Ils comptent des millions de lecteurs, mais restent trop ignorés de l’Occident. Monique Slodzian éclaire leur révolte par le désastre du capitalisme archilibéral.
Lien : http://www.lalibre.be/cultur..