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Citation de Charybde2


Les écrivains écrivent, les codeurs écrivent. Selon les jours, je les vois jouer un morceau à quatre mains, harmonieux, paisible, ou disputer un match enragé. Je vois le codeur plus inspiré que l’écrivain ne le sera jamais, obsessionnel, rivé à son ouvrage, promis à une nuit de feu perpétuelle qui produira des actions utiles au reste de l’humanité. Je vois l’écrivain accepter que son texte se fasse encoder (sertir dans des chaînes de caractères puis traduire, diviser, subdiviser), que ce qu’il soigne et compose devienne sous les doigts du codeur une sorte de logorrhée, de coulée numérique sans odeur ni saveur ni beauté particulière.
On me trouve naïve, trop sensible aux images, aux clichés des films américains, ce à quoi je réponds, mais c’est vous qui ne les voyez pas ces jeunes hommes qui communiquent avec un puits sans fond, outre-monde, au-delà, dark web, outre-tombe, ou avec Dieu, comme les membres fanatiques d’une yeshiva sans fenêtres (où on ne lirait pas mais où on écrirait) qui chercheraient à refonder les écritures pour verrouiller leur dialogue muet, inverser l’ordre des choses, qui sait, que Dieu fasse enfin ce qu’on lui demande. Deus in machina.
(…)
Les gens du pont ne savent pas ce qui se passe dans la soute quand les soutiers, eux, savent bien ce qui se passe sur le pont, mais les soutiers préfèrent rester dans le noir, faire avancer le bateau et laisser les autres deviser sur le paysage. Mais alors si tout le monde est content, quel est le problème ?
Je suis une femme, j’ai plus de cinquante ans, je suis écrivain et je veux apprendre à coder. Mes proches se moquent de moi, me rappellent que je panique au moindre bug. C’est vrai. j’ai toujours peur que la machine chauffe, implose, s’éteigne, et que dans cette extinction, elle emporte ma mémoire, mes textes, qu’elle me laisse en carafe avec des souvenirs foudroyés. C’est un syndrome récent chez moi, je m’attends toujours à ce que quelque chose explose et, quand je suis en voiture, qu’un choc terrible me percute, même sur une route tranquille. Soudain, l’air, le temps se compressent, avec toute mon existence dedans. En quelques secondes, je visualise mon corps qui s’écrase, s’enroule jusqu’à s’étrangler. Par où commencer ?
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