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Citation de Niki


Un troupeau, des hectares de terre à travailler. Papa et maman sont usés et rien qui balaie la peine de vivre sauf les rires qu'ils s'inventent parfois.
Quelque chose remue pourtant dans la commune et les esprits depuis des mois.
Ça bout de colère et de fraternité suite à l'histoire d'un fermier menacé d'expulsion sur l'exploitation où il travaille. Un paysan sans terre, comme papa qui n'a jamais pu avoir assez d'emprunt au Crédit agricole pour s'installer vraiment dans une exploitation à lui. Un fermier obligé de louer. Le propriétaire a voulu s'en débarrasser pour faire le cultivateur à son tour. Les gens disent qu'il ne sait pas ce que c'est un sillon droit, ce cumulard, ni tenir une fourche. Il travaille avec des lunettes et un stylo dans un bureau de notaire. Il a déjà un salaire chaque mois et il veut lui ôter le pain de la bouche à son fermier !
Ça fait grand bruit dans tout le canton et là, on tend l'oreille, même les voisins, ceux de la ville et les Parisiens. En France, le droit de fermage date de 1946. Quest-ce que c'est vraiment ? Tout le monde s'intéresse. On sait ce que c'est ne rien posséder et travailler juste pour rester à la surface de la vie. D'une ferme à l'autre ça gronde entre les verres. Les hommes, les femmes, les enfants, on comprend qu'on n'est pas que des bouseux et que la parole, on sait la prendre.
Dans le comité de défense, il y a deux gars d'ici. On est fiers de les voir aux informations régionales à la télé. Des réunions se tiennent un peu partout. Des voitures se remplissent pour aller brailler aux portes de la préfecture, des tribunaux. On ne parle pas que de misère et de mauvais rendement sur nos terrains argileux. On revendique le droit au travail contre la propriété foncière. Ça s'accélère, l'horizon qui se déchire pour laisser passer la révolte, le nouveau vocabulaire, et là, le Tout l'Univers ne me sert à rien, j'en ai étalé plusieurs, douze numéros. J'essaie de comprendre, mais je tombe sur les moujiks en Russie soviétique. Le nombre d'hectares dans leurs kolkhozes ou leurs sovkhozes, ça me donne le tournis et puis ça date de vieux.
Alors j'écoute les copains de papa, Luc et les autres. Quand je peux, je vais chercher la Charente libre au pied du lit des parents. Le soir, on lit des articles qui traitent de l'affaire. On compte tous ceux qu'on connaît. On se sent guerriers.
Dora et Adamo n'en peuvent plus. Ils veulent aller aux manifestations, mais avec le pensionnat ce n'est pas possible. Ils se contentent de distribuer des tracts à la foire de Chasseneuil. Ce ne sont pas les gros qui font vivre le pays, mais les petits paysans avec leurs familles qui remplissent les écoles et les épiceries, ça on en est tous sûrs.
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