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Critiques de Patricia Suescum (1)
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Mauvaise herbe

Le présent recueil est tout entier placé sous le sceau de la radicalité. Pessimiste, la jeune Patricia Suescum paraît n’accorder que peu de valeur à un monde extérieur vain, évoquant notamment "l’abandon, du bout des lèvres" (p. 16), "l’absence et la perte" (p. 15), ou encore "cette nausée des fuites impossibles" (p. 14). L’être humain, lui-même, ne semble guère porteur de promesses, mais bien plutôt hypocrite, porté par la bien-pensance, et donc "l’imposture" (p. 24). Son amour ne constitue pas une "ligne continue" (p.21). Comme chez Gilbert-Lecomte, les images sont parfois violentes, en particulier lorsque P. Suescum parle de "la carcasse gisante (p. 22) de l’agneau consommé lors du repas. Ne croyant pas en l’ordre social, creuse construction consensuelle, l’auteure se fait mauvaise herbe" (p. 48), et entend "nous mettre à nu", toucher le vrai, et ainsi dénoncer. Comment, dès lors, trouver le sens ? Si le rêve, cher aux surréalistes, "broie" (p. 44), comment échapper à "la lanterne du cauchemar/et sa blancheur fantomatique" (p. 18) ? La solution se trouve certainement dans l’écriture. Il s’agit de faire un pas vers la lucidité, et donc vers la saisie de soi. Car si la société n’est qu’illusion, si l’homme n’est pas digne de foi, alors la plume doit se tourner vers l’intériorité. Dès lors, détaché des "oripeaux du spectacle", il nous faut explorer "la pensée comme matière première" (p. 27). Face au désespoir, au gouffre, au néant, la poésie offre une porte de sortie. "Mauvaise herbe" procède ainsi de l’existentialisme. Notons aussi que la Nature, loin d’être horrible, demeure "apaisante, contrairement aux grands boulevards" (p. 26).



Cette exigence de vérité se traduit, dans la forme, par une série de vers libres brefs et dépouillés, exempts d’images convenues. "J’ai fait taire la parole de trop" (p. 13) déclare P. Suescum. Parlons ainsi d’un lyrisme volontairement asséché, d’un lyrisme du désespoir, de métaphores qui claquent, au détour de la phrase. Publié par les magnifiques éditions Rafaël de Surtis, aussi bref que vif, le volume est sans concession, à l’instar du tableau d’Egon Schiele reproduit sur la couverture.



Article d'Etienne Ruhaud paru dans la revue "Diérèse" 79, automne 2020.
Lien : https://pagepaysage.wordpres..
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