Paul Ulrich

Huit cents survivants environ d'un monde perdu de vue par Dieu et par les hommes végètent sur un sol qui s'enfonce lentement d'un l'océan d'où il est sorti, comme la culture si singulière qu'ils représentent retourne peu à peu à l'oubli...
Et pourtant, il est question d'établir une liaison aérienne trans-pacifique avec escale à l'Île de Pâques...

Un pays est fier de son passé; il en a comme la nostalgie. Hélas, les dieux sont bien morts, ces dieux aux noms fabuleux et éclatants qui font rêver et que l'odeur de sang semble encore accompagner... Mais, en compassion, Mayas, Toltèques, Zapotèques, ont désormais leur place marquée, et qui est importante, dans l'Histoire de l'humanité.

Nous quittons Angkor sur cette symbiose du règne minéral et du règne végétal. Pour les hommes, les dieux sont morts, les tombeaux sont vides, les rois ont disparu. Il ne reste que le grand silence de la pierre et de la forêt, troublé seulement, en temps de paix, par le ricanement des singes.

Accoudé sur le parapet du lac des Lotus, Pierre Loti, nostalgique, revit cette soirée singulière. Quelqu'un vient s'installer à côté de lui : le colonel Marchand, le héros de Fachoda. Les deux officiers échangent leurs impressions, et Loti exhale sa mélancolie :
- Il nous semble que cette soirée vient de consacrer d'une manière irrémédiable l'effondrement de Pékin, advienne, l'étonnante cour asiatique reparaîtrait-elle même ici, ce qui est bien improbable, Pékin est fini, son prestige tombé, son mystère percé à jour. Cette ville impériale pourtant, c'était un des derniers refuges de l'inconnu et du merveilleux sur terre, un des derniers boulevards des très vieilles humanités, incompréhensibles pour nous, et presque un peu fabuleuse !

Autant de questions qui forment un véritable casse-tête et font de l'illustre îlot un des "trous" de l'histoire humaine, le rébus le plus irritant et le plus passionnant qui puisse tenter un chercheur.

Sous le ciel nuageux et battu de vent des barrows salisburiens, parmi les genêts d'Armorique où le vent jette du sel, sous l'azur torride ou étoilé de la Méditerranée et de l'Afrique du Nord, le long des côtes frangées de glace flottante des Vikings, sur les plateaux jaunâtres et ridés du Caucase et dans la brousse africaine, partout, ou à peu près partout sur terre, des hommes ont tiré, halé, charrié, élevé et honoré par des rites mystérieux, riches de la première science de la fertilité et de la fécondation, ces masses gigantesques de pierre taillée que nous contemplons encore aujourd'hui avec perplexité, et non sans effroi. N'y sentons-nous pas la première volonté humaine de durer, le besoin de faire signe à ce qui vient après vous?

Quoi d'étonnant à ce que la légende fût appelée à la rescousse, là où l'Histoire restait muette?

Un des premiers témoignages de civilisation humaine est le soin d'enterrer les morts (peut-être dans l'espoir que, comme le grain, il ressuscitera?).

Ce passé trop loin ou trop subtil pour nos moyens d'investigations actuels ne risque-t-il pas de rester ignorance à une époque où l'engin mécanique tout-puissant réduit, par sa puissance même, les méthodes scrupuleuses du fouilleur?

Alors va naître un formidable commerce. De Callao, terminus des galions de Manille, les caravelles, aux flancs repus tant le métal jaune s'entasse dans leurs cales, cinglent vers l'Asie. Là, l'or sera échangé contre ces épices qui commencent à faire les délices de l'Europe. Et, pour la première fois, l'or devient une unité de monnaie universellement reconnue.
Mais, loin de ces trafics, loin des passions qu'ils engendrent, des conflits qu'ils provoquent, dort, à Machu Pichu, à Cuzco, sur les rives du lac Titicaca, une civilisation qui a été broyée mais qui a été suffisamment forte pour emporter avec elle ses mystères. Car, quand le soleil se lève, des Indiens du Pérou se tournent vers lui et prient, selon un rite que l'on ne connaîtra jamais, et pour une prière dont on ne connaîtra pas le sens.

- L'or et le sang.
Pizarre avait illustré la devise, qui en définitive, a été celle de tous les conquistadors. Au nom de l'or, on avais conquis; au nom de l'or, on avait tué.

Le dernier défenseur indien, après s'être enduit le visage de terre en signe de deuil, se précipite du haut des remparts. Auparavant, il a lancé au loin son arme, une massue parsemée d'étoiles de bronze.
Il mourut comme un ancien Romain. Il avait frappé son dernier coup pour la liberté de son pays, et il dédaigne de survivre à la honte de sa nation.

Etre prisonnier d'un prisonnier: aucun empire au monde n'aura connu situation aussi paradoxale.

Au vu de ces témoignages de civilisations millénaires, ne convient-il pas de saluer les pionniers qui, souvent sans ressources, guidés par leur seule foi et leur enthousiasme, ont posé les indispensables jalons d'une tâche désormais sans fin, mais qui apporte au patrimoine commun de l'humanité un incomparable enrichissement ?

Il n'en reste pas moins que, pour aussi importante qu'ait été la découverte des manuscrits de la mer Morte pour les spécialistes et les historiens du judaïsme et de l'aube de l'ère chrétienne, son retentissement dans le grand public ne paraît guère fondé sur autre chose que sur une exploitation émotionnelle.

Rêve ? Réalité ? En tout cas, longtemps encore, l'or des galions de Vigo enflammera les imaginations...

Presque au même moment, dans la ville d'Ekaterinenbourg, à la fin d'une nuit de juillet, Nicolas II, l'impératrice, le tsarévitch, les quatre princesses de Russie et une servante sont tués au pistolet par des soldats lettons sur l'ordre apparemment de Lénine et de Trotsky, alors Ministre de la Guerre, pour que les Russes blancs perdent leur drapeau...

Parmi les victimes, une ombre jeune et belle, Anastasia - en russe Ressuscitée - dont on ne sait encore officiellement si elle est morte ce jour-là.

Mais, comme tous les trésors qui gisent au fond des mers, comme tous les galions chargés des richesses du Mexique ou du Pérou, la disparition de Port-Royal a fait naître une légende.
De la ville dont on a dit qu'elle était la plus riche de l'univers, mais aussi le plus maudit lieu de la chrétienté, on a vu, pendant des siècles, l'église se dresser au fond des flots. Et on dit encore que, lorsque la tempête soulève la mer, les eaux agitent les cloches, dont le son retentit jusqu'à terre...

Aujourd'hui encore, de patients chercheurs, persuadés que des tonnes d'or et de bijoux gisent sous les mètres de vase de la baie de Tobermory, vont de temps à autre tenter de les retrouver. Peut-être, un jour, ce qui est considéré de plus en plus comme une légende deviendra-t-il réalité...
En revanche, ce qui est certain, c'est que les nombreux navires de toutes tailles qui ont sombré sur les côtes britanniques contenaient des richesses inestimables. Mais la mer, depuis bientôt quatre siècles, garde jalousement son secret...

Le dragon subit l'épreuve des flammes. Le jeune homme trempe son doigt dans le flot de graisse qu'a répandu l'animal. Siegfried s'aperçoit que son doigt est devenu aussi dur que de la corne. Alors, il se dévêt et s'enduit tout le corps de graisse. Mais une feuille de tilleul tombe sur le dos de Siegfried, juste entre les deux épaules : c'est le seul endroit du corps du héros restera vulnérable.