- Je ne veux pas de cette fatale rectitude, je préfère me voûter avec l'âge et les épreuves. C'est mon choix et si tu ne viens pas avec moi, je partirai seule.
Ce sont des paysans, qui entreprennent la terre qui leur a été confiée, pour le meilleur et pour le pire… Si le meilleur s’accorde avec l’abondance, le pire ne s’en éloigne pourtant jamais. Ce métier est une suite de labeurs, d’épreuves, de doutes et de questions qui conduisent, si le temps le veut, à des récoltes joyeuses. Ou pas ! Sueurs froides et chaudes transpirations ont forgé de tout temps ces hommes et ces femmes, qui interrogent le ciel et remuent la terre pour vivre.
Une mère sait, au plus profond d’elle, de son corps, ce qui est bon pour ses enfants. Elle a certainement été la première à appréhender que la voie que nous avions empruntée ainsi que nos décisions étaient à contresens. Silencieusement, la part de nos propres engagements et comportements, ainsi que son impuissance, lui étaient devenues autant insupportables qu’inexplicables.
Chez eux aussi, la révolution était passée : elle aurait pu être agraire, elle fut industrielle. Les paysans d’alors devinrent des agriculteurs, leurs peines s’allégèrent, le travail devint moins pénible. La culture aratoire se transforma en une culture intellectuelle où l’intelligence innée se noyait. Le bon sens paysan s’éclipsa en toute discrétion.
Hisael observait le regard étonné et curieux de ses enfants. C’était leur premier voyage et il avait conscience qu’ils étaient là, ensemble, à vivre le début d’un périple hors du commun. Aucune tristesse, juste de l’espoir et de l’enthousiasme s’agitaient au plus profond de lui
Ces matins de somnolence chaude où le jour tropical, pressé de se lever au son de la douce mélodie des tourterelles mauriciennes, resteraient ancrés comme une musique céleste au plus profond de la mémoire d’Hisael
Il avait à peine plus de vingt ans et son ambition, plutôt ses rêves, ne connaissaient pas de limite. Il avait foi en la vie, en sa réussite et en ses capacités, dont il ne doutait pas.
Pas encore.
Ces péripéties que la vie place de manière détachée sur notre route ne sont jamais anodines.