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Citations de Philippe Desportes (37)


Philippe Desportes
Villanelle


Rosette, pour un peu d’absence,
Votre cœur vous avez changé,
Et moi, sachant cette inconstance,
Le mien autre part j’ai rangé :
Jamais plus, beauté si légère
Sur moi tant de pouvoir n’aura :
Nous verrons, volage bergère,
Qui premier s’en repentira.

Tandis qu’en pleurs je me consume,
Maudissant cet éloignement,
Vous qui n’aimez que par coutume,
Caressiez un nouvel amant.
Jamais légère girouette
Au vent si tôt ne se vira :
Nous verrons, bergère
Rosette,
Qui premier s’en repentira.

Où sont tant de promesses saintes,
Tant de pleurs versés en partant ?
Est-il vrai que ces tristes plaintes
Sortissent d’un cœur inconstant ?
Dieux! que vous êtes mensongère !
Maudit soit qui plus vous croira !
Nous verrons, volage bergère,
Qui premier s’en repentira.

Celui qui a gagné ma place
Ne vous peut aimer tant que moi ;
Et celle que j’aime vous passe
De beauté, d’amour et de foi.
Gardez bien votre amitié neuve,
La mienne plus ne variera,
Et puis, nous verrons à l’épreuve
Qui premier s’en repentira.
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SONNETS SPIRITUELS


Depuis le triste point de ma frêle naissance…

Depuis le triste point de ma frêle naissance
Et que dans le berceau pleurant je fus posé,
Quel jour marqué de blanc m’a tant favorisé
Que de l’ombre d’un bien j’aie eu de la jouissance ?

À peine étaient séchés les pleurs de mon enfance
Qu’au froid, au chaud, à l’eau je me vis exposé,
D’amour, de la fortune, et des grands maîtrisé,
Qui m’ont payé de vent pour toute récompense.

J’en suis fable du monde, et mes vers dispersés
Sont les signes piteux des maux que j’ai passés,
Quand tant de fiers Tyrans ravageaient mon courage ;

Toi qui m’ôtes le joug et me fais respirer,
Ô Seigneur, pour jamais veuille-moi retirer
De la terre d’Egypte et d’un si dur servage.
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Epouvantable Nuit, qui tes cheveux noircis
Couvres du voile obscur des ténèbres humides,
Et des antres sortant, par tes couleurs livides
De ce grand Univers les beautés obscurcis :

Las ! si tous les travaux par toi sont adoucis,
Au ciel, sur terre, en l'air, sous les marbres liquides,
Or' que dedans ton char le Silence tu guides,
Un de tes cours entiers enchante mes soucis.

Je dirai que tu es du Ciel la fille aînée,
Que d'astres flamboyants ta tête est couronnée,
Que tu caches au sein les plaisirs gracieux :

Des Amours et des Jeux la ministre fidèle,
Des mortels le repos : bref tu seras si belle
Que les plus luisants jours en seront envieux.
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Amour en même instant m’aiguillonne et m’arrête,
M’assure et me fait peur, m’ard et me va glaçant,
Me pourchasse et me fuit, me rend faible et puissant,
Me fait victorieux, et marche sur ma tête.

Ores bas, ores haut, jouet de la tempête,
Il va comme il lui plaît ma navire élançant :
Je pense être échappé quand je suis périssant,
Et quand j’ai tout perdu je chante ma conquête.

De ce qui plus me plaît je reçois déplaisir :
Voulant trouver mon cœur, j’égare mon désir :
J’adore une beauté qui m’est toute contraire.

Je m’empêtre aux filets dont je me veux garder :
Et voyant en mon mal ce qui me peut aider,
Las ! je l’approuve assez, mais je ne le puis faire.
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Philippe Desportes
Icare est chu ici, le jeune audacieux

Icare est chu ici, le jeune audacieux,
Qui pour voler au Ciel eut assez de courage :
Ici tomba son corps degarni de plumage,
Laissant tous braves coeurs de sa chute envieux.

Ô bienheureux travail d'un esprit glorieux,
Qui tire un si grand gain d'un si petit dommage !
Ô bienheureux malheur, plein de tant d'avantage
Qu'il rende le vaincu des ans victorieux !

Un chemin si nouveau n'étonna sa jeunesse,
Le pouvoir lui faillit, mais non la hardiesse ;
Il eut, pour le brûler, des astres le plus beau.

Il mourut poursuivant une haute aventure,
Le ciel fut son désir, la mer sa sépulture :
Est-il plus beau dessein, ou plus riche tombeau ?
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Icare est chu ici…


Icare est chu ici, le jeune audacieux,
Qui pour voler au Ciel eut assez de courage :
Ici tomba son corps dégarni de plumage,
Laissant tous braves cœurs de sa chute envieux.

Ô bienheureux travail d'un esprit glorieux,
Qui tire un si grand gain d'un si petit dommage !
Ô bienheureux malheur plein de tant d'avantage,
Qu'il rende le vaincu des ans victorieux !

Un chemin si nouveau n'étonna sa jeunesse,
Le pouvoir lui faillit mais non la hardiesse,
Il eut pour le brûler des astres le plus beau.

Il mourut poursuivant une haute aventure,
Le ciel fut son désir, la Mer sa sépulture :
Est-il plus beau dessein, ou plus riche tombeau ?
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Aux extrêmes périls, peu sert la connaissance.
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Etrange effet d'amour ! un objet à l'instant
Me rend triste et joyeux, malheureux et content,
M'éclaire et m'éblouit, me fait vivre et me tue.
Et voilà ce qui fait qu'en forçant mon vouloir,
Je me bannis, Hélas ! du plaisir de vous voir,
Pour ne sentir le mal qui vient de votre vue.

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Chanson.

Que je suis redevable aux cieux
De ce qu'ils m'ont ouvert les yeux
Et si bien purgé ma poitrine,
Que rien plus ne me satisfait
Qui ne soit divin et parfait
Et qui n'ait celeste origine.

Tout ce qu'Amour sçauroit trouver
D'attraits pour un coeur captiver.
Tout ce que la beauté peut faire,
Le destin et l'election,
Tout s'assemble en raffection
Qui rend mon esprit tributaire.

La gloire de mon seul penser
Fait que rien ne peut m'offenser,
Rigueur, prison, gesne et martyre;
J'aime mieux un de mes tourmens
Que les plus chers contentemens
Qu'Amour reserve à son empire.

Mes fers me contentent si fort,
Que je ne hay moins que la mort
L'estat que franchise on appelle;
Et si mon coeur trop arresté
Escoute un Inot de liberté,
Je le punis comme rebelle.

Plustost juillet sera glacé,
Et l'hyver de fleurs tapisse;
Plustost sera froide la flame
Que je reçoive une autre loy :
Ce seroit cesser d'estre moy,
Que de cesser d'aimer ma dame.

Si je meurs blessé de ses yeux,
Ma fin me rendra glorieux,
Donnant vie à ma renommée;
Et mourant j'auray le confort
Du soldat, qui reçoit la mort
Par la main du chef de l'armée.
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Chanson.

Douce liberté desirée,
Deesse. où t'es-tu retirée,
Me laissant en captivité ?
Helas de moy ne te detourne !
Retourne, ô Liberté! retourne.
Retourne, ô douce Liberté.

Ton depart m’a trop fait connoistre
Le bonheur où je soulois estre,
Quand douce tu m’allois guidant,
Et que, sans languir davantage,
Je devois, si j’eusse esté sage.
Perdre la vie en te perdant.

Depuis que tu t’es éloignée,
Ma pauvre ame est accompagnee
De mille épineuses douleurs :
Un feu s’est espris en mes veines,
Et mes yeux changez en fontaines
Versent du sang au lieu de pleurs.

Vil soin caché dans mon courage
Se lit sur mon trisle visage,
Mon teint plus palle est devenu;
Je suis courbé comme une souche,
Et, sans que j’ose ouvrir la bouche,
Je Ineurs d’un supplice inconnu.

Le repos, les jeux, la liesse,
Le peu de soin d’une jeunesse,
Et tous les plaisirs m’ont laissé;
Maintenant rien ne me peut plaire,
Sinon, devôt et solitaire,
Adorer l’oeil qui m’a blessé.

D’autre sujet je ne compose,
Ma main n’écrit plus d’autre chose,
Là tout mon service est rendu,
Je ne puis suivre un autre voye,
Et le peu de tans que j’employe
Ailleurs, je l’estime perdu.

Quel charme ou quel Dieu plein d'envie
A changé ma premiere vie,
La comblant d'infelicité ?
Et toy, Liberté desirée,
Deesse, où t'es-tu retirée?
Retoume, ô douce Liberté!

Les traits d'une jeune guerriere,
Un port celeste, une lumiere,
Un esprit de gloire animé,
Hauts discours, divines pensées.,
Et mille vertus amassées
Sont les sorciers qui m'ont charmé.

Las! donc sans profit je t'appelle,
Liberté precieuse et belle !
Mon coeur est trop fort arresté :
En vain apres toy je soupire,
Et croy que je te puis bien dire,
Pour jamais, adieu, Liberté.
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Stances


Sommeil…

Sommeil, paisible fils de la Nuit solitaire,
Père alme (*) nourricier de tous les animaux,
Enchanteur gracieux, doux oubli de nos maux,
Et des esprits blessés l'appareil salutaire :

Dieu favorable à tous, pourquoi m'es-tu contraire ?
Pourquoi suis-je tout seul rechargé de travaux,
Or que l'humide nuit guide ses noirs chevaux,
Et que chacun jouit de ta grâce ordinaire ?

Ton silence où est-il ? ton repos et ta paix,
Et ces songes volant comme un nuage épais,
Qui des ondes d'Oubli vont lavant nos pensées ?

Ô frère de la Mort, que tu m'es ennemi !
Je t'invoque au secours, mais tu es endormi,
Et j'ards (*), toujours veillant, en tes horreurs glacées.


Père alme (*) nourricier de tous les animaux, (*) bienfaisant
Et j'ards (*), toujours veillant, en tes horreurs glacées. (*) je brûle
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Philippe Desportes
Et n'y chose aucune en ce moment constante.
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Quand quelquesfois je pense à ma première vie.

Quand quelquesfois je pense à ma premiere vie,
Du temps que je vivois seul roy de mon desir,
Et que mon ame libre errait à son plaisir,
Franche d'espoir, de crainte et d'amoureuse envie.

Je verse de mes yeux une angoisseuse pluie,
Et sens qu'un fier regret mon esprit vient saisir,
Maudissant le destin qui m'a fait vous choisir,
Pour rendre à tant d'ennuis ma pauvre ame asservie.

Si je Iis, si j'escry, si je parle ou me tais,
Vostre oeil me fait la guerre et ne sens point de paix,
Combattu sans cesser de sa rigueur extrême.

Bref, je vous aime tant que je ne m'aime pas,
De moy-mesme adversaire, ou si je m'aime, hélas!
Je m'aime seulement pource que je vous aime.
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Fantaisie.

D'où vient qu'un beau soleil, qui luit nouvellement,
Soit à tous favorable, et à moy si contraire ?
Il m'esblouyt la veuë, au lieu qu'il leur eclaire;
Il echauffe les coeurs, et me va consommant.

L'autre soleil du ciel n'offense aucunement
Les lieux qui sont privez de sa flamme ordinaire :
Mais ce divin soleil m'ard plus cruellement,
Plus je me trouve loin de sa lumiere claire.

Je l'accuse, Nature, et me plains justement;
Car puis qu'il me devoit porter tant de nuisance,
Allumant en mon coeur un feu si vehement,
Que n'as-tu pour mon bien retardé sa naissance ?

Toutesfois si nostre âge, heureux par sa presence,
Ne pouvoit sans mon mal voir ses yeux clairement,
Je prens tout consolé ma mort en patience.
Qui meurt pour le public meurt honorablement.
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Prière.

Grand Dieu d'Amour, enfant de Cytherée,
Au dos ailé, à la tresse dorée,
Qui peux l'enfer et la terre esmouvoir,
Vainqueur des Dieux, écoute la priere
D'un de tes serfs, dont rame prisonniere,
Tremblant de crainte, adore ton pouvoir.

Las s'il est vray, comme j'ay connoissance,
Que je retourne en ton obeissance,
Et derechef tu me vueilles ravir;
Je le veux bien, mon coeur je t'abandonne,
Encor un coup, libre je m'emprisonne:
Aplus grand Dieu je ne puis m'asservir.

Je ne veux point à tes loix contredire,
Sans resister, j'accours sous ton empire.
L'homme mortel doit obeir aux Dieux;
Qui te meprise, il confond la nature,
Son estomach est d'une roche dure,
Voire à regret lui esclairent les cieux.

Icy je jure à ta deité sainte,
Qui connoist bien que je parle sans fainte,
Qu'à tout jamais je veux perseverer
Ton prestre saint, qui t'offre en sacrifice
Mon coeur brtllé pour te rendre propice,
Et mon esprit pour tousjours t'adorer.

O grand Amour, de puissance invincible,
Cruel et doux. gracieux et terrible,
Qui fais marcher en triomphe les rois,
Des jeunes coeurs le seigneur et le maistre,
Puis que pour tel je te veux reconnoistre,
Ecoule, ô Dieu, ma priere et ma voix.

Si tous tes traits en mon coeur je retire,
Si sans crier je languis en martire.
Si j'ay lavé tes ailes de mes pleurs.
Si mes soupirs entreüennenl ta flame.
Et si tu fais des cheveux de ma dame
l.es forts liens qui retiennent les coeurs.

Chasse, ô grand Dieu, cette crainte nouvelle,
Qui me poursuit, qui me serre et me gelle;
Banny hien loin le triste desespoir,
Aux crins retors, à la couleur sanglante,
Qui de regars mon esprit espouvanle,
Et qui me fait tant de peurs reçevoir.

Mon coeur en tremble. et mon ame estonnée
A la frayeur s'est toute abandonnée,
Tmt cette nuict il m'a fait endurer :
Fay l'un des deux. ou luy donne la chasse
Loin de mon coeur, ou lui quitte la place,
Vous ne pouvez ensemble demeurer.
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Complainte.

Cruelle loy d'Amour et de ma degtinée !
Las on voit qu'un chacun fuit ordinairement
La cause de son mal, et mon ame obstinée
Cherche ce qui me tuë et le suit folement.

Je sçay que j'entreprens une chose trop grande,
D'aimer, homme mortel, une divinité :
Mais de faire autrement ici n'ay la liberté.
La raison ne peut rien quand la force commande.

Pour le moibs en souffrit la douleur qui m'offense
Et qui blesse mon coeur, ce n'est grand reconfort
De voir que vos beautez excusent mon offense,
Et que mon haut desir eternise ma mort.

Car, si je meurs, madame, en vous faisant service,
Jamais plus grand honneur je ne puis acquerir :
Vous me recompensez en me faisant mourir,
Pourvueu que ma douleur par mon trespas finisse.

Aussi je ne me plains que me soyez cruelle,
Mais, las! je suis marry de ce qu'en me tuant,
Et payant de rigueur mon service fldelle,
Vostre honneur peu à peu se va diminuanL

Car, si tost qu'on sçaura la perte de ma vie,
Chacun, craignant son mal, loin de vous se tiendra
Et vous accusera, quand il se souviendra
Que vous m'aurez tué pour vous avoir servie.

Si donc ma passion n'esmeut vostre courage,
Si vous n'avez soucy de ma fenne amitié,
Au moins, en m'offensant, ne vous faites dommage,
Ayez de vastre honneur, et non de moy pitié.
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Elégie.

Je delibere en vain d'une chose advenuê,
Car, puis qu'outre mon gré mon ame est devenuë
Prisonniere d'Amour" que sert de consulter
S'il est bon de le suivre, ou s'il faut l'éviter !
L'aduis n'y vaut plus rifn, monstrons donc de nous plaire
Au chemin qu'aussi bien par contrainte il faut faire,
Et courons la fortune. 0 Amour, desormais
Mon repos et ma vie en tes mâins je remets.
Toy seul comme un grand roy commande en ma pensée,
La raison et la peur loin de moy soit chassée,
Et tant de vains respects qui m'ont trop retenu,
Divisans mon esprit par un trouble inconnu.

Celuy qui sent de Mars sa poitrine échauffée,
Et qui veut s'honorer de quelque beau trofée,
Ne pallist estonné pour la peur des hazars, .
Mais voit devant ses yeux, par les rangs des soldars,
La mort d'horreur couverte et de sang toute tainte,
"Et l'attend de pié coy sans frayeur et sans crainte.
Moy donc qu'un plus grand Dieu touche si vivement,
Et Qui veux que mon nom vive etemellement,
Pour avoir mon amour sur tout autre élevée:
Moy qui ay tant de fois ma vaillance esprouvée,
Craindray-je maintenant à ce dernier assaut ?
Le fait que j'entreprens veut un courage haut,
Constant et patient, qui souffre sans se plaindre,
Qui durant sa langueur joyeux se puisse faindre,
Qui sente incessamment quelque nouveau trespas,
Qui se laisse brûler et ne soupire pas,
Et qui, pour tout loyer des douleurs qu'il support~,
Ne puisse esperer rien qu'une douleur plus forte.
C'est un labeur bien grand: mais rien n'est mal-aisé
Au coeur qui comme moy d'amour est embrasé.

Je veux donc poursuivir sans esperanoe aucune,
Sans appuy, sans raison, sans conseil, sans fortune,
Et d'Amour seulement je veux estre guidé:
Un aveugle, un enfant, qui desja m'a bandé
Les yeux ainsi qu'à luy, pour ne voir mon otrance,
Et qui de mon malheur m'oste la connoissance:
Ou, si je le connois, il me trouble si fort,
Que je suis le premier qui consens à ma mort.

Appelle qui voudra Phaéton miserable
D'avoir trop entrepris, je l'estiIne loüable;
Car au moins il est cheut un haut fait poursuivant,
Et par son trespas Mesme il s'est rendu vivant:
J'aimerois mieux courir ama mort asseurée,
Poursuivant courageux une chose honorée,
Que lasche et bas de coeur mille biens recevoir
De ceux que le commun aisément peut avoir.
Mon esprit, nay du ciel, au ciel tousjours aspire,
Et ce que chacun craint, c'est ce que je desire;

L'honneur suit les hazars, et l'homme audacieux
Par son malheur s'honore et se rend glorieux.
Le jeune enfant Icare en sert de temoignage.
Car, si volant au ciel il perdit son plumage,
Touché des chauds rayons du celeste flambeau,
Le fameux ocean luy fermit de tombeau,
Et depuis de son nom cette mer fut nommée :

Bien-heureux le malheur qui croist la renommee.
Desja d'un sort pareil je me sens menacer,
Moy qui devers le ciel mon vol ose dresser
(Voyage audacieux) mais rien ne me retire,
Car les ailes d'Amour ne sont faites de cire,
I,e plus ardant soleil si tost ne les fondra :
Puis j'ay ce reconfort, quand ma cheute adviendra,
Que ceux qui sçauront bien où je voulois attaindre
Envieront mon trespas plustost que de me plaindre.
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Amours.

Las ! on peut bien juger que c'est une contrainte,
Veu qu'au plus fort du mal dont mon ame est attainte,
Je ne me puis garder de vous suivre en tous lieux,
Et que, trouvant ma mort peinte en vostre visage,
Mon triste desespoir, ma perte et mon dommage,
Pour n'y connoiltre rien, je me ferme les yeux.

J'ay fait un fort rempart d'amour et de constance
Contre le desespoir armé de violance,
Qui me fait mille assauts et ne me peut forcer :
Quelquefois de furie il fait breche en mon ame;
Mais presqu'au mesme instant vostre beauté, madame,
Accourant au secours, l'engarde de passer.

Je voudroy bien pourtant qu'il demeurast le maistre,
Le combat mon salut, que je ne veux connoistre.
Mais, las je me repens de l'avoir desiré;
Car, bien que ma douleur mortellement me blesse,
El que de mieux avoir je sois desesperé,
J'aime mieux vivre ainsi qu'en toute autre liesse.
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Stanses.

Lors que j'escry ces vers, il ne faut que l'on pense,
Que trop audacieux je n'aye connoissance,
Du rang que voua tenez et de ma qualité:
Car je jure vos yeux et leur puissance sainte
Que je garde en cecy le respect et la crainte,
Dont il Caut reverer une divinité.

Aussi tant de vertus vous font toute divine,
Et vos douces beautez monstrent bien l'origine
Que vous avez du ciel tout parfait et tout beau:
Vous n'avez rien d'humain, vostre grace est celeste,
Vos discours, vostre teint, vostre ris, vostre geste,
Et l'Amour sans vos yeux n'auroit point de flambeau.

J'en parle asseurement : car je connoy sa nune,
Qui fouloit prendre vie aux beaux yeux d'une dame,
Et qu'il me fit sentir lors que j'en su surpris:
Las! or à mon malheur je ray mieux reconnuë,
Regardant folement les traits de votre veuë,
Qui m'ont bien sçeu punir d'avoir trop entrepris.

Or ne m'accusez point que je sois temeraire,
Presumant vous aimer : car je ne sçauroy faire
Qu'ailleurs tourne mon coeur, qui vous est destiné;
Et, quand ce seroit faute aux mortels d'entreprendre
D'aimer une deesse, on ne m'en peut reprendre:
Le peché fait par Coree est toujours pardonné.
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L’arc de vos bruns sourcils mon cœur tyrannisans.

L’arc de vos bruns sourcils mon cœur tyrannisans,
C’est l’arc mesme d’Amour, dont traistre il nous martyre :
Et ne croy point qu’en nous d’autres fleches il tire
Que les traits de vos yeux si prompts et si luisans.

De leur vive splendeur sortent les feux cuisans,
Qui font que tout le monde a peur de son empire ;
Ses rets sont vos cheveux, où toute ame il attire,
Ravie en si beaux nœux, si blonds et si plaisans.

C’est pourquoy ce vainqueur, qui par vous se fait craindre,
Ne sçauroit vous blesser, vous brûler, vous estreindre,
Prenant de vous son feu, son cordage et ses traits.

Craignez donc seulement qu'en voyant vostre image,
Vous ne puissiez souffrir tant d'amours et d'attraits,
Et De raciez, vaincuë, à vous mesmeti bommllge.
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