En France, les princes, nouveaux exploitants du sel, voulurent profiter de la forte demande afin de transformer le sel en potentiel fiscal. Telle fut l'origine de la gabelle, d'abord instituée comme une taxe temporaire par Saint-Louis en 1246, puis reprise par Philippe IV en 1286, établie enfin comme taxe permanente sous Philippe VI, qui la généralisa dans tout le royaume. En 1343, dernière étape de la gabelle, le sel devint un monopole royal. Dès lors, le condiment était entreposé dans des « greniers à sel », où la population pouvait l'acheter en payant la fameuse taxe. La gabelle, si impopulaire, contribua à la chute de la monarchie et fut abolie par l'Assemblée nationale constituante en 1790. Napoléon la rétablit seize ans plus tard. La taxe sur le sel avait la vie dure : elle ne fut supprimée définitivement que par la Loi de finances de 1946 !
Au Moyen-Age, le sel était – avec le souffre et le mercure – le cinquième élément après la terre, l'air, l'eau et le feu. Ainsi, il restait générateur de superstitions et de sacralisation. Au cours des procès en sorcellerie, les accusés étaient interrogés pour savoir s'ils mangeaient du sel, signe diabolique ! En revanche, le même sel pouvait chasser les mauvais démons. En effet, pour purifier une habitation hantée, il suffisait de mettre quelques pincées de sel recueilli un soir de pleine lune dans des coupelles blanches et les placer devant les portes et les fenêtres de la maison, puis de faire brûler le sel avant de jeter les cendres dans une rivière. Répandu sur le bétail, le sel était capable de conjurer le mauvais sort et d'éloigner les maladies. Glissé dans les poches des jeunes mariés, il leur portait bonheur.