La main de Montag se referma comme une bouche, écrasa le livre avec une ferveur sauvage, une frénésie proche de l'égarement, contre sa poitrine. Là-haut, les hommes lançaient dans l'air poussiéreux des pelletés de magazines qui s'abattaient comme des oiseaux massacrés tandis qu'en bas, telle une petite fille, la femme restait immobile au milieu des cadavres.
Montag n'y était pour rien. C'était sa main qui avait tout fait ; sa main, de son propre chef, douée d'une conscience et d'une curiosité qui faisait trembler chacun de ses doigts, s'était transformée en voleuse. Voilà qu'elle fourrait le livre sous son bras, le pressait contre son aisselle en sueur, et resurgissait, vide, avec un geste de prestidigitateur.