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Citation de enzo92320


(p.240)
- Vrai l L'animal est saoul !
Il lui attrapa les deux pieds et tira violemment. Gonzague décrivit un arc de cercle et s'affala sur le sol, de tout son long la tête heurtant la première. Il rigolait toujours, insensible. Bruno le poussa du pied jusqu'à la cuisine et fit jouer le loquet. Il piquait une colère lorsque la porte s'ouvrit en grand, et qu'une horde cosmopolite, beuglante et survoltée, fit son apparition. Il y avait des filles, des Américains, deux officiers russes, des civils échevelés, voyageant à dos de folie et de cris. A la queue de cette farandole se trouvaient Rocky, Tarin et Ginette. Béatrice suivit Bruno derrière le comptoir afin de l'aider à servir cette foule assoiffée de gloire et de spiritueux. Rocky happa Fred et Thierry :
- Venez sur le boulevard ! C'est fantastique!
Ils ressortirent en bousculant les nouveaux venus. Un soldat anglais, égaré dans le tas, couchait de force une fille sur une table, lui relevant sa robe aux cuisses en poussant des « V day ! » convaincants.
Fred, agrippé de droite et de gauche par ses amis descendit avec eux la Cité du Midi au galop. Un océan humain se formait de minute en minute, roulant pêle-mêle sur le boulevard de la Chapelle au boulevard des Batignolles, en un tohu-bohu de tonnerre et d'immeubles dynamités. De ce magma émergeaient des drapeaux, des têtes de militaires portés en triomphe, des chapeaux hissés sur cannes, des fleurs montant au ciel et retombant en pluies légères sur les épaules. Des jeeps recouvertes de jupes, d'oriflammes, de types exhubérants accrochés aux roues, montés sur les pare-chocs, allaient, poussés en avant par la foule. Les cafés, les cinémas, les boîtes de nuit, les brasseries et les dancings, clos tout à l'heure, s'ouvraient à la volée, prêts à la bonne affaire. De ce roulis apocalyptique montaient d’immenses clameurs faites de chants et de hurrahs assourdissants où les mots de « Victoire ! », « Vivent les alliés ! » prenaient des inflexions d'éruptions volcaniques et de batailles navales.
Et toujours, telle une inexorable marée, cette foule s'enflait, se gonflait, par les rues adjacentes, par les métros, descendant des maisons, accourant de tous les horizons. Les fenêtres s'ouvraient grandes sur cette journée de mai, s'étoilant de drapeaux et de têtes serrées. Fred et Tarin furent séparés du groupe par une poussée sans raison qui renversa une dizaine de personnes. Malgré leurs efforts, ils ne purent rejoindre Thierry, Ginette et Rocky entraînés implacablement par ces centaines de coudes et d'épaules, entraines de force à la Concorde, peut-être, ou encore plus loin...
Tarin prit la main de Fred. Au moins, ils ne se lâcheraient pas.
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