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Citation de santorin


L'homme essayait de ne penser à rien. Malgré la pluie qui ruisselait sur sa nuque, il gardait la tête penchée en avant sur le bout pointu de ses soulier vernis, tandis qu'il les déplaçait avec précaution l'un après l'autre dans la boue. Il ne pouvait détacher ses yeux de ses souliers qui le faisaient avancer sur cette route. Elle semblait ne mener nulle part, à jamais, et, quoiqu'il n'eût pas de mots pour l'exprimer, il avait le sentiment que cette marche était l'image même de sa vie depuis trente-quatre ans.
Il n'avait jamais vu pareil endroit, qui paraissait frapper de nullité tout ce qui avait pu lui arriver auparavant, même les rencontres avec des filles ou le whisky, ou la conduite rapide d'une voiture, ou les bagarres, ou encore quand il se tenait devant un miroir, nu, jusqu'à la taille, occupé à peigner ses cheveux bruns jusqu'à ce qu'ils luisent, lisses comme de la soie... non, rien du tout cela ne ressemblait à cette marche sous la pluie ; c'était comme si cela n'avait jamais existé. Une seule chose comptait : pencher la tête pour surveiller l'un et l'autre de ses souliers vernis en train de faire gicler la boue, pendant que la pluie dégoulinait dans son cou. La pointe se levait, avançait, s'enfonçait dans la boue rouge, se relevait et grâce à ce rythme, il n'éprouvait plus ni peur, ni colère, ni tristesse ; au contraire une impression de liberté et de force.
Il pensait : "Eccomi, moi, Angelo Passetto, moi, et qui marche sur la route !"
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