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Citation de batlamb


Il me fallait à présent un autre sujet pour me défendre et évacuer. Or, comme chacun sait, il y a crise de sujets. Ce n’est pas qu’il en manque, grâce à Dieu, mais la plupart ont déjà été traités. Il y en a aussi dont je ne voulais à aucun prix, parce qu’ils infectent. Je ne parle même pas du Chili, comment s’en débarrasser par un roman. Ils ont de très bons écrivains en Amérique du Sud, ils s’en occupent. Il y avait les six millions de Juifs exterminés mais c’était déjà fait. Il y avait les camps soviétiques, l’archipel Goulag, mais il fallait éviter la facilité. Il y a eu la guerre du Bangladesh, avec deux cent mille femmes violées, ce qui aurait permis au livre d’avoir un petit côté sexy légitime, mais ce n’était plus d’actualité, ça s’est passé trop vite. Il y avait la condition des Noirs américains, mais les écrivains noirs américains se foutent en rogne quand on leur vole leurs sujets. Il y avait les famines, la corruption, les massacres, le déshonneur et la folie en Afrique, mais on ne peut pas en parler, parce que ce serait raciste. Il y avait les droits de l’homme un peu partout, mais ça faisait rigoler. Il y avait l’arme nucléaire, mais c’était la seule chose que l’URSS, les États-Unis, la Chine et la France ont de commun et je ne pouvais quand même pas écrire contre la fraternité, il faut de l’espoir. Il y avait les Tziganes génocidés, dont on avait peu parlé, mais la documentation avait disparu dans les chambres à gaz. Il y avait l’ONU, mais c’était quand même trop dégueulasse. Il y avait la liberté mais René Clair en avait déjà fait un film comique. Il y avait des océans d’angoisse, de sang et d’horreur partout, mais des milliers d’écrivains étaient déjà dessus. Il y avait évidemment le silence, mais il n’y a pas plus coupable.
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