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Critiques de Salma Kojok (4)
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Le dérisoire tremblement des femmes

À travers un récit présenté en deux parties (le discours d'une mère pour sa fille, puis celui d'une fille pour sa mère), ce roman raconte la vie d'une famille libanaise immigrée en Côte d'Ivoire, alors colonie française, entre les années 1920 et 1960.



La première moitié du livre se concentre sur Dounia et son exil du Liban vers l'Afrique en 1936, après avoir été mariée à un homme qu'elle ne connaît pas. Ces premiers chapitres, que j'ai trouvés très mélancoliques, abordent des thèmes forts comme ceux de l'oppression des femmes, le sentiment de culpabilité liée à l'abandon de sa terre d'origine, les difficultés de l'exil (sa "ghorbé" comme elle l'appelle), mais aussi l'arrogance du colonialisme et les crises identitaires causées par le multilinguisme.



Plus tard, la seconde moitié du livre met en scène Lamia (la fille de Dounia, née en Côte d'Ivoire), adolescente presque adulte fréquentant les milieux révolutionnaires qui aspirent à la fin de la colonisation et à l'indépendance du pays. Ces chapitres ont le goût de l'émancipation, de la libération des moeurs, des sexes et des peuples, et alimentent le combat pour l'égalité sociale désirée par les opprimés et les minorités.



J'ai beaucoup aimé le style de l'auteure qui, par des séquences descriptives très précises et des éléments visuels ou olfactifs, donne une place prépondérante au décor dans son récit et invite au voyage vers l'Afrique. Le roman est ponctué de nombreuses questions que se posent les narratrices et qui interpellent le lecteur, à la manière d'une histoire que l'on raconte à l'oral, que l'on écoute et que l'on partage. En bref, un très beau roman d'exil, d'identité, de témoignage, de transmission et d'héritage.
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Noir Liban

Maïmouna est née en Côte d'Ivoire, d'une mère sénégalaise et d'un père libanais. On sait peu de choses de sa mère, pauvre, qui a eu une brève liaison avec cet homme qu'elle imaginait comme le prince charmant qui la sortirait de son univers difficile. Elle déchantera vite et peu après la naissance de la petite, la confiera à son père, en espérant pour elle un meilleur avenir que le sien. A l'âge de 9 ans, la petite est déposée par son père chez sa grand mère au Liban, il repartira vers une nouvelle femme et d'autres priorités. L'autrice nous raconte la vie de cette petite fille métis, noire, crépue, soumise au racisme ordinaire. L'histoire est une fiction, même si elle est nourrie des souvenirs de Salma Kojok dont la famille est aussi partagée entre l'Afrique et le Liban. C'est un ami, Youssef, qui donne une voix au récit de vie de Maïmouna et de sa famille. Le style accompagne la parole de l'héroïne, comme un conte, au travers du choix des mots, de leur musicalité. Chaque titre de chapitre reprend la dernière phrase du précédent, créant un écho et liant les récits. Beyrouth, la ville aux multiples quartiers et influences, est come un personnage vivant du roman, qui aborde les thèmes de l'exil, des discriminations, de la place des femmes et des immigrés dans la société, du passé que l'on porte en soi, du poids de l'hérédité et des familles. L'écriture est ciselée, les mots choisis, que les situations décrites soient tristes ou joyeuses, on est emporté dans le récit comme une histoire chuchotée à l'oreille, ou contée par des grand mères. Je remercie Babelio et les éditions Erick Bonnier pour l'envoi de ce livre dans le cadre de la masse critique littérature d'automne.

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Noir Liban

À travers le personnage de Maïmouna, l'auteure aborde une multitude de thématiques riches où l'on devine une part autobiographique. Le cœur du roman est la quête d’identité. Née en Côte d’Ivoire de père libanais et de mère sénégalaise, Maïmouna est abandonnée dans son enfance à sa grand-mère paternelle. Elle ne se sent à sa place nulle part, ni au Liban où les personnes à la peau sombre comme elle sont traitées d’« abdé » (« esclave » en arabe), ni en Côte d’Ivoire où les Libanais sont les nantis exilés embauchant des serviteurs locaux ou bonnes immigrées à qui les passeports sont volés.



Maïmouna subit au quotidien le racisme de la société libanaise, entre humiliations et violences. Même sa grand-mère, qui l’aime et l’éduque, la défend auprès des autres en niant sa couleur de peau. Elle met des mots sur comment elle vit cette honte d’être noire, ce racisme qui finit par être intériorisé : « cette contradiction en moi, d'être à la fois le gamin battu et le personnage qui le bat et celui qui encourage les sévices et tous ceux qui restent passifs aussi, ne disent rien, laissent faire. »



Au sein même du Liban, la question de l’identité en temps que nation est ardue. Le pays est très divisé notamment par les religions et porte encore le stigmate de la guerre civile de 1975-1990. Cette guerre a contraint un million de Libanais à s’exiler, et la Côte d'Ivoire s’est proposée comme terre d’accueil, d’où les liens entre les deux pays.



Tous ces sujets durs, complexes et importants avaient tout pour m’intéresser. Malheureusement, la narration m’a très souvent sortie de l’histoire. Le texte alterne entre passages en italique et droit, associés à deux narrateur différents, mais dans certains chapitres la logique semblait inversée, à moins que j’aie mal compris.

Mais surtout, lorsqu’il y avait des scènes où je pouvais me sentir connectée aux personnages, la narration finissait toujours par d’un coup prendre beaucoup de recul sur la situation pour proposer des réflexions. Réflexions certes intéressantes, mais très survolées du fait du grand nombre de sujets abordés en seulement 126 pages. À force, les personnages ne m’ont pas semblé vivre mais n’être placés dans le récit que pour livrer leurs témoignages.

Le livre m’aurait sans doute plus touché si la narration était restée plus proche des personnages afin de vivre avec eux ce qu'ils ressentent, en montrant plus et en racontant moins. Avec plus de subtilité, la narration aurait pu conduire le lecteur à ces questionnements sans qu’il n’y ait besoin de les lui expliquer longuement.



En conclusion, ce livre aborde le racisme, l’oubli de l’Histoire des femmes, grandir sans repères familiaux, la guerre civile du Liban, les traumatismes de guerre, l’exil, l’immigration, le colonialisme, la pauvreté, la difficile reconstruction sociale après-guerre, le deuil, les meurtres homophobes…

Je regrette être restée tout du long très distante de ce qui m’était raconté.



Je remercie les éditions Erick Bonnier pour l'envoi de ce livre au cours de l'opération Masse Critique de Babelio.
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Noir Liban

Maïmouna est métisse, née en Côte d’Ivoire d’un père libanais et d’une mère ivoirienne. Elle est élevée sans sa mère, qu’elle n’a presque pas connue, passe ses premières années en Côte d’Ivoire, puis est confiée à sa grand-mère paternelle, au Liban. Elle tente de trouver un ancrage, entre deux cultures, dans un contexte familial rempli de non-dits, de souffrances, de fiertés et de hontes. Le récit se déroule entre 1990 et 2010, avec en toile de fond les traumatismes de la guerre du Liban (1975-1990), et cette partie de l’Histoire qu’est la migration libanaise dans l’ancienne Afrique Occidentale Française (1895-1958), dont fait partie la Côte d’Ivoire.



Ce récit nait en partie de l’écoute de Youssef, l’interlocuteur de Maïmouna. On ne sait pas bien quelle est la nature de leur relation, mais on comprend l’intimité et la confiance partagées. Il lui laisse toute la place pour qu’elle se déploie, tout en se dévoilant aussi un peu dans l’échange.



J’ai beaucoup aimé me laisser bercer par cette lecture mélancolique, à la fois douce et amère. Douce parce que la plume est belle, on se laisse porter par la musicalité des mots. Chaque fin de chapitre donne son nom au chapitre suivant, ce qui créé quelque chose : on voit les mots différemment, selon qu’ils clôturent une discussion ou qu’ils en commencent une nouvelle. Amère aussi car Maïmouna porte en elle beaucoup de fardeaux : les humiliations subies et celles dont elle a été témoin et complice silencieuse, les discriminations et le racisme ordinaire vécu au Liban en tant que fille noire aux cheveux crépus, un chagrin d’amour suite à une séparation douloureuse, la sensation de tanguer, tiraillée entre l’Océan et la Mer Méditerranée, la loyauté familiale malgré l’incompréhension et parfois le ressentiment.



C’est court (125 pages), et j’ai toujours un peu de mal à m’accrocher aux personnages dans ce cas-là, mais ici j’ai pris à la volée ce qu’il y avait à prendre, j’ai saisi au vol quelques bribes du récit de Maïmouna que je vais garder en moi, parce que c’était beau.


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