Shiva Naipaul était le frère cadet de V. S. Naipaul, auteur d’origine indienne, né à Trinidad-et-Tabago, prix Nobel de littérature en 2001. Egalement écrivain, la carrière de Shiva a été quelque peu éclipsée par celle de son frère, d’autant plus qu’il est mort relativement jeune. Son œuvre compte des œuvres de fiction, mais aussi des récits de voyage (il a par ailleurs été journaliste), même si la plupart de ses livres ont été traduits en français, ils ne sont pas très facilement accessibles actuellement.
Publié pour la première fois en 1978, Sortilège africain raconte un voyage en Afrique, plus précisément au Kenya, en Tanzanie et Zambie. Il a l’ambition de faire une sorte de radioscopie de l’Afrique, de ses régimes politiques, des relations entre les races et les cultures suite à la décolonisation. Je cite :
« ...une sorte de roman, un montage d’images de gens, de lieux, de rencontres... »
Le regard de Shiva Naipaul se pose donc sur tel ou tel lieu, il fait s’exprimer des habitants ou voyageurs, dans des conversations à priori innocentes, dans lesquelles il se garde bien de donner son point de vue, laissant à l’interlocuteur toute la place pour se révéler, donner sa version des choses.
Son constat est très noir, presque désespérant. La pauvreté, la violence, les rapports entre les races enfermés dans des schémas auxquels il est impossible d’échapper. Les tentatives socialistes, en particulier en Tanzanie, qui sont des façades creuses, derrières lesquels la corruption, la confiscation du pouvoir et des richesses par quelques uns ont la part belle. Une sorte de régime post-colonial, entretenu par une partie des Africains eux-mêmes qui y trouvent leur compte, les Chinois qui commencent à se positionner… Il semble y avoir peu d’espoir que les choses s’améliorent, la pauvreté et toutes les frustrations donnant un cocktail explosif qui n’attend qu’une étincelle pour la mise à feu.
Cet univers est finalement proche de celui de V.S. Naipaul, tout particulièrement de son livre A la courbe du fleuve, qui se passe en Afrique. Et qui pointe lui aussi un phénomène largement ignoré en Occident, les persécutions et brimades dont sont victimes les populations d’origine indienne, boucs émissaires commodes de tout ce qui ne va pas, toujours à portée de main pour extérioriser une violence qui couve.
Un livre intéressant et bien écrit, avec des partis pris. Il ne s’agit pas d’un récit de voyage avec les aspects pittoresques et sympathiques, mais d’un constat, dont rien ne vient adoucir l’amertume. On se dit par moments que l’auteur a du quand même rencontrer des gens ou voir des choses un peu moins rentrant dans ses analyses, que le réel doit quand même être moins univoque…. Mais les événements qui ont eu lieu depuis sur le continent ont quand même tendance à donner raison à l’auteur et à son pessimisme.
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Récit d'un voyage que l'auteur a réalisé au milieu des années 70 en Afrique de l'Est, au cours duquel il parcouru pendant six mois, le Kenya, la Tanzanie et la Zambie, allant de Nairobi à Lusaka en passant par Dar es Salam.
Il s'interroge sur les réalités de l'Afrique post-coloniale et sur les travers que des dirigeants sans aucun scrupules font peser sur les peuples sous couvert de l'africanisation, sur la corruption, sur les rivalités ethniques qui y ont toujours lieu et qui mènent à de terribles massacres, sur la misère.
Constat terrible et parfois glaçant, mais il est plus terrible encore de constater que plus de 40 ans après la parution de ce livres beaucoup de ces pays africains n'ont pas encore réussi à surmonter leurs démons et que pour des millions d'africains la vie est rythmée par les crises économique, la famine, les épidémie notamment du SIDA qui y a fait d'immenses ravages ou encore l'afflux de réfugiés des diverses guerres qui contribue plus encore au déséquilibre de ces sociétés.
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