Citations de Sonia Combe (11)
Nous sommes, nous aussi, dans la situation du second juge : nous n’arrivons pas à comprendre. Pourquoi faire porter le poids de la responsabilité des circonstances de son sauvetage à une personne qui n’y est pour rien ? N’est-ce pas suffisant d’avoir passé sa petite enfance en camp de concentration sans se voir, soudain, comme reprocher la mort d’un autre ? Cette incompréhension est à l’origine de la présente recherche
Cet essai a un double objectif :
évaluer dans quelle mesure la substitution d’une personne à une autre a pu faire partie des modalités de survie dans les camps de concentration ;
interroger la réécriture du rôle de la résistance anti-fasciste à laquelle la pratique de l’échange a conduit à la suite de la consultation d’archives accessibles après la réunification de l’Allemagne
De ce point de vue Buchenwald doit être appréhendé non pas seulement comme un camp de concentration allemand, mais comme un lieu de mémoire européen où se retrouvèrent des combattants du nazisme de tous les pays
[Ces mesures] visent à la destruction de la personnalité "en diffamant, discréditant, et jetant des doutes sur la fiabilité d'une personne".Il s'agit d'isoler les leaders et les fortes têtes, de susciter intrigues et rivalités entre les membres d'un groupe et, pour cela, de recourir à la rumeur.
L’ouverture; du passé veut aussi dire que les soi-disant »jugements de l’histoire » n’ont rien de définitif ni d’immuable. L’avenir peut rouvrir des dossiers historiques "fermés", "réhabiliter" les victimes calomniées, réactualiser les espérances des aspirations vaincues, redécouvrir des combats oubliés, ou jugés "utopiques", "anachroniques" et "à contre courant du progrès’‘. Dans ce cas de figure, l’ouverture du passé et celle de l’avenir sont étroitement associés.
Ces marxistes, souvent très critiques, n’avaient pas encore totalement perdu espoir, pas plus que la génération suivante, écrivains, artistes, dissidents auxquels, d’une manière ou d’une autre, ils avaient transmis leurs idées
Exclusions, blâmes, avertissements prononcés par le Parti, "mises au placard", interdictions professionnelles et interdictions de publier, définitives ou temporaires, envois "dans la production", c'est-à-dire à l'usine, ou dans ce que l'on pourrait appeler la production "douce", les bibliothèques et centres d'archives...
Dans les cas difficiles, isoler n'est que le premier volet des "mesures de destructuration". Le second a pour objectif de faire douter la victime d'elle même
Mais la force de son récit tient à la restitution du contexte de la guerre froide et l’évocation de convictions qui permettent de comprendre pourquoi des homes et des femmes comme son mari, l’éditeur Max Schroeder, le dramaturge Bertolt Brecht, la romancière Anna Seghers et bien d’autres décidèrent de retourner en Allemagne, choisirent la partie orientale occupée par les soviétiques, puis refusèrent de la quitter – alors même que leurs espoirs se dissipait peu à peu. Quitte à y laisser leur âme et leur santé
Car ils refusaient d’admettre l’évidence : que la Parti ne pouvait se réformer de l’intérieur. Ce comportement fut leur part d’irrationalité et leur faillite. De ce fait, nul n’aura été aussi méjugé au cours du 20e siècle que ces hommes et ces femmes floués par l’Histoire
Le silence, que l’on ne peut exonérer d’une part de prudence, voire de manque de courage (mais qui sommes-nous, dans nos sociétés démocratiques où les risques de prises de parole sont comparativement minimes, pour les juger ?), fut bien souvent le plus grand compromis qu’ils passèrent