Sören Kierkegaard

Ma peine est mon château seigneurial, perché là-haut, comme un nid d’aigle, sur le faîte des montagnes, au milieu des nuages ; personne ne peut l’assaillir. De là, je prends mon vol, je descends dans la réalité et saisis ma proie ; mais je n’y reste pas, je l’emporte chez moi. C’est une autre image que je tisserai dans les tapisseries de mon château. Puis je continue à vivre comme si j’étais mort. Je plonge ce qui a été vécu dans les eaux de l’oubli, baptême pour l’éternité du souvenir. Tout ce qui était temporel et passager, oublié, effacé. Alors, comme un vieillard à la tête blanchie par les années, pensif, j’explique l'image à voix basse, presque en chuchotant ; à mon côté, un enfant m’écoute, quoiqu’avant même que je le raconte, il se souvienne de tout.


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