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Citation de Charybde2


KILOMÈTRE ZERO
0′ 02″
Celui qui vient de tirer le coup de revolver garde le bras en l’air puis le descend à regret comme s’il venait de faire une chose irréparable : l’une de ces choses que l’on fait en tenant une arme alors que les autres n’en ont pas. Les oiseaux s’envolent et puisque l’un part devant tous les autres suivent sans demander leur reste. Instantanément la foudre soulève des nuées qui s’étendent bien au-delà des ruines.
– Via! È partita la maratona olimpica di Roma! Allô, Paris ? Ici Loys Van Lee, vous m’entendez ? C’est parti ! Le marathon vient de commencer !
C’est ce qu’à travers le monde les radios hurlent et que je n’entends pas, uniquement préoccupé par le clapot nerveux des bielles et la mécanique des pas qui s’élancent autour de moi pour la toute première fois. S’élancent et retombent avec le bruit mat du plat des plongeurs puisque nos pieds sont des monstres qui choient ; chutent lourdement mais sans gerbes sans écume et retombent encore pour gifler la terre et réclamer un peu d’attention. Pilonnent et soudain martèlent jusqu’au point critique de la résonance mécanique. S’élancent puis s’affaissent et se reprennent aussitôt en rebonds courts hoquetés, les épaules sautillantes. Sous la peau le sang frémit, hémoglobine et globules s’activent pour déplacer l’oxygène des poumons jusqu’aux fibres rouges des muscles papillonnants. La synchronisation est impossible au commencement – il faut encore tout ajuster avec une patience d’horloger. C’est comme ça. Les départs sont toujours brouillons, c’est une foulée après l’autre et c’est aussi la pagaille et l’effusion. Les corps résistent, les mouvements sont rendus maladroits par les muscles froids et le bouillon sanguin trop épais qui peine dans le dédale des veines et des veinules. Hanche, genou et cheville. Bon sang ne saurait mentir. À-coups des nuques trop raides et des bassins trop rigides – l’oxygène manque comme aux grandes altitudes. On ahane, on s’époumone. Tiers de rotation des rotules avec frottements et froissements rêches. Un essaim furieux pénètre par mes oreilles tandis que mes poumons grésillent ; soufflent un air plus chaud que celui qui fait fondre ma peau. Mes foulées sont des pas à pas et je suis un homme les autres : nous partons chacun pour soi de la même ligne avec des corps identiques.
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