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Citation de Mariloup


Les trois jeunes femmes ayant remonté leurs couvertures jusque sous leur menton, elles fermèrent peu à peu les paupières et se mirent à somnoler. Il était 23 heures et rien ne semblait devoir se passer, car les sirènes s'obstinaient à se taire. Une paix bienveillante berçait à présent la ville endormie.
Il lui sembla percevoir au loin le grondement du tonnerre. Ruby s'obligea à ouvrir les yeux, et, d'abord, elle se demanda ce qu'elle faisait au beau milieu de ce jardin plutôt que de se trouver bien au chaud dans son lit. Puis son attention se porta sur le rugissement qui, lourd de menaces, semblait émaner d'un point situé au-delà des collines. Elle s'éveilla pour de bon dans un sursaut.
_ C'était quoi...? interrogea Jane somnolente.
_ Je crois que nous allons subir un gros orage, répondit Sarah. Nous ferions mieux de regagner l'abri avant que la pluie se mette à tomber.
Elle se saisit de la couverture.
_ Attendez, souffla Ruby, qui l'oreille aux aguets, se concentrait sur le bruit lourd, qui à présent s'intensifiait. Ce n'est pas le tonnerre.
Peggy, qui avait entendu aussi, prit entre ses bras sa fillette en pleurs pour la serrer contre sa poitrine. Elle rejoignit ses pensionnaires, le regard assombri par l'effroi.
_ C'est une attaque? Je n'ai pas entendu les sirènes.
_ ça vient du nord, murmura Sarah. Je ne crois pas me tromper en disant qu'il doit s'agir d'un escadron de bombardiers.
_ Des bombardiers ennemis? glapit la logeuse. Mais pourquoi les sirènes n'ont-elles pas retenti?
Personne ne possédait de réponse, et malgré le danger, elles semblaient incapables de bouger. Elles regardaient le ciel. Le grondement se faisait de plus en plus fort, roulant au-dessus des collines, glissant méchamment sur les toits de la ville pour s'engouffrer ensuite dans l'enchevêtrement des rues étroites et des allées.. Le son enflait... Il ne fut pas jusqu'à Mme Finch que ce vacarme n'éveillât.
Après avoir trituré sa prothèse auditive, elle se pencha sur sa canne.
_ Ce n'est sans doute pas un raid, s'égosilla Peggy, car personne n'a déclenché les sirènes.
Elles demeurèrent au jardin, comme en transe, tandis que des formes sinistres et ténébreuses paraissaient là-bas, au nord, au-dessus des collines, pour s'éployer peu à peu, jusqu'à dérober à la vue des observatrices la lune et les scintillantes étoiles. Ils se rapprochaient, et le rugissement guttural de leurs moteurs fit, une bonne fois pour toutes, voler en éclats le silence.
Ils grondaient, et ce grondement sourd ébranlait le sol sous les pieds des femmes, résonnait dans les murs des maisons, dont il soulevait presque les toits. C'était des vagues, des vagues d'appareils, qui, les unes après les autres déferlaient, et, ce faisant, emplissaient de leur vrombissement tous les crânes. Ils se révélaient trop nombreux pour qu'on pût les compter. Les bombardiers britanniques se dirigeaient vers la Manche.
Il s'agissait d'un spectacle incroyable, d'une démonstration de force peu commune, qui fit monter les larmes aux yeux de tous, qui emplit leur âme de fierté. L'on se mit à hurler des encouragements dans leur direction, et l'on agitait les bras avec fougue.
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