Premier témoignage écrit par un négrier... Publié à New York au milieu du XIX ème siècle, ce texte restera un des seuls en son genre.
Le titre choisi pour cette édition ne rend pas bien compte de son contenu, à mon sens. En effet, nulle déclaration par l'auteur d'un acte qu'il reconnaîtrait comme blâmable, mais plutôt un récit d'aventures maritimes incluant, comme si cela était en quelque sorte « naturel », la traite d'esclaves.
Le ton est neutre et tranquille, le récit, minutieux. Théodore Canot ne nous livre que très peu de sentiments, notamment quant aux esclaves qu'il a convoyés par milliers.
Le récit vogue ainsi sur la crête des années 1820 à 1840, de rixes en mutineries, d'abordages en naufrages...
L'auteur rend en particulier compte du basculement d'une traite autorisée vers une traite illicite, au cours de cette période. On assistera dès lors avec intérêt aux contorsions des négriers pour échapper aux controles.
Ainsi, raconte Théodore Canot, «au temps jadis (...) une cargaison humaine se débarquait aussi commodément que de la farine »... Mais, désormais, «l'opération est jugé hasardeuse et généralement tenue secrète (...), la cargaison humaine est débarquée à la hâte ». Les mesures sont particulièrement radicales puisque les petits navires sont ensuite maquillés afin de rentrer au port sous pavillon de cabotage, tandis que les grands batiments sont incendiés ou coulés sur place par prudence.
Cet ouvrage souffre peut-être d'une abondance de détails sur les aléas de la vie de marins, pour qui y recherche avant tout un exceptionnel document sur la traite.
Il reste toutefois un regard hors du commun sur une facette du commerce triangulaire. Et complète le tableau brossé par des lectures sur les vies des esclaves, qu'elles soient romanesques (Go home de Yaa Gyasi par exemple) ou documentaires (La vie d'un esclave, d'Olauda Equiano, notamment).
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Mille et une choses devraient être dites sur ces confessions. Outre qu’elles illustrent parfaitement le concept de « banalité du mal » d’Arendt, je trouve que ce témoignage de Théodore Canot est intéressant parce qu’on y découvre tout le mécanisme de l’industrie esclavagiste sur le sol africain. Une industrie qui n’enrichissait pas que le nouveau monde, mais aussi les roitelets et leurs cours des côtes africaines. Une industrie autour de laquelle s’articulait toute la vie économique et politique d’une bonne partie de la planète (Afrique y compris) et ou l’esclave servait de monnaie.
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