Un ouragan, c’est comme une guerre : si vous ne l’avez pas
vécu, vous ne savez pas ce que c’est.
On peut vous abreuver d’images fortes ou vous expliquer
le phénomène sous toutes ses coutures, vous ne le connaitrez jamais
qu’en le subissant. Vous pouvez écouter toutes les mises en garde
et observer toutes les recommandations du gouvernement ; rien,
absolument rien ne vous prépare à l’ouragan qui vous passe dessus.
Être la victime d'un ouragan, c'est plus qu'en mourir. Quand vous finissez réfugié sur le toit de votre pavillon, le corps de votre enfant décédé flottant quelque part sous les combles, une part de vous s'éteint. L'ouragan, de la même manière qu'il souffle votre ville, votre quartier ou votre maison, mouche parfois votre âme, comme vous moucheriez la flamme d'une bougie.
Si j'avais été un cheval, je suis sûr que ce connard m'aurait flatté l'encolure.
— C’est ce qu’on appelle une tour chaude. Je te passe les détails,
mais leur apparition signifie que dans les six heures qui ont suivi les
images que nous venons de visionner, l’ouragan s’est intensifié. John,
il s’est à peine formé que, déjà, il est en train d’exploser. Si mon analyse
est la bonne, cet ouragan est incroyablement violent.
— Est-ce qu’il est gros ?
Je dézoomai encore, revenant à la première configuration que
j’avais adoptée et qui englobait Hispaniola.
— Il n’est pas gros, John. Il est démesuré !
C’était l’Ouragan, la tempête cyclonique qui resterait à jamais gravée
dans les annales de l’humanité. Il était Hurakan, le dieu du mal des
Indiens caraïbes, et marquerait les États-Unis d’une cicatrice indélébile,
garantissant aux Américains, pour des dizaines d’années, de futurs
jours du Souvenir, d’innombrables mémoriaux, et l’absence pour
longtemps des prénoms Jonas et Julia sur les carnets de naissance.
Nous avons également envoyé,
hier après-midi, une paire de chasseurs de cyclones : un WC-130 de
l’USAF et un WP-3D ORION de la NOAA, en direction de l’oeil.
Il s’interrompit un instant, comme s’il hésitait à me livrer la suite.
— Aucun n’est revenu. Nous avons perdu le contact avec le WP-3D
au bout de 6 heures, alors qu’il était en pleine progression à 3 000 pieds
et à environ 250 kilomètres du mur.
Nous avons également envoyé,
hier après-midi, une paire de chasseurs de cyclones : un WC-130 de
l’USAF et un WP-3D ORION de la NOAA, en direction de l’œil.
Il s’interrompit un instant, comme s’il hésitait à me livrer la suite.
— Aucun n’est revenu. Nous avons perdu le contact avec le WP-3D
au bout de 6 heures, alors qu’il était en pleine progression à 3 000 pieds
et à environ 250 kilomètres du mur
Une terreur viscérale m'étreignit tout entier, naissant à la base des lombaires avant de remonter le long de mon dos en une onde glacée, qui me paralysa le cerveau. Un long tremblement désordonné m'agita et mes jambes mollirent sous mon poids. Je dus faire appel à ce qui me restait de volonté pour ne pas fléchir.
Elle ne répondit pas immédiatement. Elle n'avait pas les colères éruptives et tonitruantes de John. Elle les avait plutôt tranchantes comme un scalpel, faites de piques vexatoires et de sommations humiliantes.
Finalement, je cherchais le moyen d'obéir en gardant la tête haute, de me soumettre tout en conservant le canon du fusil pointé sur la tempe.