C'est par les images, par la peinture et la sculpture que les enfants et le peuple se familiarisaient avec les pieuses légendes. Un peu partout sur les murs des églises, des fresques rappelaient la naissance et la mort de Jésus, les vies des patriarches et des saints, l'espoir d'un paradis et la crainte d'un enfer. Ce fut peut-être à Santa Croce, devant les fresques de Giotto, que l'on expliqua au jeune Benozzo comment avait vécu saint François, et peut être aussi devant l'oeuvre toute fraîche encore de Masaccio à l'église du Carminé, qu'on lui apprit l'histoire du denier de saint Pierre.
Si Goethe n'est pas encore un vrai romantique, Browning et les préraphaélites anglais sont déjà autre chose. Ils se sont épris de l'art italien de la fin du moyen âge, art que les romantiques avaient ignoré. Les préraphaélites ne le comprennent d'ailleurs qu'à demi, car, tandis que tout est clarté chez Giotto et Fra Angelico, les poètes anglais qui s'inspirent de la Vita nuova semblent s'efforcer d'être plus difficiles à comprendre que le Dante des premiers poèmes.
Les grandes œuvres de Benozzo Gozzoli n'ont pas quitté les solides murailles où il les a fixées lui-même, il y a plus de quatre cents ans. Nos musées ne possèdent de lui que très peu de chose. C'est en Italie qu'il faut aller pour le connaître, à Montefalco, à Florence, à San Gimignano, à Pise surtout.
Chateaubriand est allé en Italie en 1803, Alfred de Musset en 1833. N'est-ce pas dans l'espace de ces trente années qu'a régné surtout l'enthousiasme poétique auquel on a donné le nom de romantisme? Goethe, d'une part, et Browning, de l'autre, m'ont paru en dehors du vrai romantisme.