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3.83/5 (sur 12 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Paris , 1963
Biographie :

Véronique Emmenegger est une écrivaine d'origine franco-suisse installée à Lausanne en Suisse romande.

Elle est née d’un père agent de voyages suisse-allemand et d’une mère secrétaire française. Elle a beaucoup voyagé en Europe (Grèce, Espagne, Italie, Iles Canaries) et a été en partie élevée par ses grands-parents à Paris.

Revenue en Suisse, sa scolarité obligatoire se passe au collège de Morges et au gymnase à Lausanne. Par le biais d’un concours lancé par l’Hebdo, lequel recherche des jeunes reporters, elle fait partie des douze jeunes sélectionnés.

Devenue journaliste free-lance, elle collabore avec des magazines comme Emois, l'Hebdo, Voir ou Femina.

Son premier livre "Mademoiselle Faust" paraît chez Noël Blandin aux Éditions Sillage en 1987 à Paris. S'ensuivront trois romans, un recueil de nouvelles et un livre ("Richesse Invisible", 2009) sur la précarité avec le photographe Pierre-Antoine Grisoni de l'Agence Strates à Lausanne.

site de l'auteur : https://veroniqueemmenegger.com
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Véronique Emmenegger - Cœurs d'assaut.


Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Puisque c'est une souffrance sans espoir de guérison, elle peut être rangée dans les maladies du désespoir. Je suis en train de te perdre et je le sais même si paradoxalement tu ne le sais pas. Tu vas t'éloigner chaque jour. Tu resteras avec nous jusqu'au moment où tu ne le pourras plus. Tu iras dans un hôtel aseptisé où il y a des codes partout pour que tu ne puisses pas t'échapper. Une geôle capitonnée pour que tu ne te fasses pas mal, une prison avec d'autres perdus comme toi, même qu'on les trouvera pires que toi et qu'on pensera naïvement que là-bas n'est pas ta place
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La nouvelle vénéneuse vient de fendre la réalité de ses airs de fiction. Un cumulus noir passe, une main gantée tire la chaîne, une coulée de poix s’abat.
Le docteur Crohn n’est pas là pour emballer la réalité, ce n’est pas le Père Noël, et Shirley se prend la tête dans les mains. Panique à neurones-city, elle a l’impression que son cerveau rétrécit. À sa gauche, un peu penché dans une chaise Louis XVI, se tient Égault. Cela fait trente ans que ce philosophe au caractère d’ouragan est l’homme de sa vie. En face d’eux, on devine le cynisme du neurologue habitué à ces diagnostics, bien barricadé derrière son bureau, affublé d’un regard qui se voudrait compatissant, mais en tant que sadique, cela ne lui pose pas trop de problèmes. Bientôt, la partie de golf rituelle viendra aérer tout ce brouillard cérébral et lui redonnera son sourire narquois de gagneur.
– L’oubli est un animal sauvage qui dévore tout sur son passage, prône-t-il en s’éclaircissant la gorge. Il commence par mordre ce qu’il a de plus proche, les membres de sa famille…
Pourquoi attendre d’un neurologue qu’il manie la psychologie ? Ce technicien de nos mécaniques infimes n’a que faire de la face cachée de la force : le sentiment. Pire, ça n’est pas son boulot de consoler, d’accompagner, d’ailleurs comment pourrait-il rassurer cette femme puisqu’il le sait mieux que quiconque, les maladies de démence ne sont qu’une lente chute programmée, une descente aux enfers avec des escaliers lustrés de savon noir, une balade au pays de la soumission et de la dégradation.
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J’ai eu mon premier cheveu blanc à trois ans, lorsqu’elle m’a abandonnée dans un caniveau, ma brassière s’est imbibée d’eau de Javel, sur mon duvet capillaire blond ces premiers cheveux blancs sont passés inaperçus, une femme m’a ramassée pour me remettre au commissariat, sur la gourmette ils ont pu lire : « Saleté »,
alors ils ont su où me ramener, à la rue des Martyrs,
« Saleté » c’est le petit nom qu’elle me donne quand je ne suis pas satisfaisante,
ils ont sonné et elle a fait semblant d’être heureuse de me retrouver, un peu comme si ça lui faisait un choc au cœur, et pour « la galerie » elle m’a serrée contre elle en inventant une histoire à dormir debout, comme quoi elle avait confondu ses deux paniers qui pesaient le même poids, et se rendant compte que l’autre ne contenait que de la piquette et des patates, elle allait repartir chercher sa patate chaude,
mentir, mentir,
– Vous prendrez bien un petit café, qu’elle dit aux flics qui la remercient, ils ont autre chose à faire, d’autres bébés à cheveux blancs à sauver,
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Une des premières planches de salut, avec la nature, est la lecture, pharmacie itinérante qui offre des remèdes non pas de bonne femme mais de petite fille,
j’ai trouvé ce matin en partant pour l’école, posé sur la poubelle, un vieux livre d’images sur les samouraïs – il n’y a pas de bons endroits pour les livres, surtout pas dans une bibliothèque où ils dorment le dos tourné comme des personnages qui auraient des dossards avec leurs noms – dans lequel on découvre (les photos en noir et blanc datent des années cinquante) des hommes couronnés de curieux petits chignons, l’air déterminé, vêtus de pantalons amples tenus par de simples cordelettes et armés de plusieurs épées, regarder dans le lointain ou peut-être est-ce à l’intérieur d’eux-mêmes,
chaque chapitre porte sur le quotidien de ces maîtres, nourriture, combat, exercices, sommeil,
l’un d’entre eux témoigne qu’un bon samouraï ne dort jamais, qu’il se pose la nuit tombée, lorsque le soleil se fait safrané avant de tourner au bleu de cinéraire, devant sa cabane en bois, assis en tailleur, les jambes repliées sous son pantalon qui ressemble à une jupe, il descend la grille de ses paupières tout en restant éveillé derrière, sensible à chaque respiration de la nature qui l’entoure, et au moindre bruissement suspect il se tient prêt à dégainer son sabre,
dormir comme un samouraï, c’est ainsi que désormais je passe mes nuits faisant la peau à l’insomnie, assise sur mon lit je veille, mes yeux sont fermés et je guette, détendue mais présente, et jamais je ne me suis sentie aussi bien au réveil,
mais ce n’est pas mon seul refuge, il y a aussi ma relation avec les oiseaux, ils me parlent dès l’aube, ma période préférée reste le printemps lorsqu’en mars les femelles construisent un nid entre mes persiennes, je les entends s’y heurter pour se glisser jusqu’à leurs petits, nourrir ces becs cannibales qui gueulent plus fort que leurs parents, bonnes mères elles s’acharnent à remplir ces outres piailleuses qui un beau matin prennent leur envol se mêlant à ce que j’appelle « les arbres qui parlent », quand du fond de leurs humeurs botaniques leurs congénères les accueillent, ils m’accompagnent durant tous les beaux jours, je dépose des miettes sur le rebord de ma fenêtre et ils profitent de mon absence pour organiser leurs excursions magnétiques, j’en aperçois un parfois qui me toise de ses yeux de cristal culotté,
je suis Blanche-Neige et les oiseaux élèvent leurs petits dans mes cheveux, ils volettent autour de moi comme des ventilateurs colorés, dans cette forêt embaumée les animaux viennent manger des baies au creux de ma main, l’encensoir des grands chênes me berce de leur humidité, la gourmette des feuilles d’or cliquette dans le petit matin, l’angoisse est momentanément en pause…
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« Il a été convenu par téléphone de commencer le Grand Mensonge. Impossible de traîner Monsieur Lévy chez un docteur en hallucinations afin de gober toute une série de pastilles aussi joliment colorées que les poissons. Il faut lui prescrire des banalités pour simples trous de mémoire. Le Professeur prévient qu’il faudra revenir dans un mois, car le dosage est approximatif. Il y a tout de même trois sortes de médicaments et Égault se demande bien pourquoi, avec tout l’argent qu’on met dans la recherche, ces fantômes en blouse blanche n’ont toujours pas réussi à trouve run modèle unique.
L’ordonnance griffonnée, quelqu’un frappe à la porte. Il s’agit du psychiatre du département de psycho-gériatrie adjacent, lequel passait par là. Il propose à Égault de discuter un moment, invitation refusée tout net. Monsieur Lévy lui rappelle qu’il n’est pas égrotant et qu’il a assez fait mumuse pour aujourd’hui. Il a toute sa tête ! » (p.53)
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Elle a toujours dit, et répété, pendant les fêtes de famille ou autres, cette phrase infecte qui appelait les mouches sur ses lèvres :
– Lorsque je suis rentrée avec toi de la maternité, j’ai voulu te changer, et tu as chié dans ma main…
Ces mots réveillent une sorte de honte intestinale, comme si j’étais réduite – chaque fois que ses lèvres crachotent cette phrase toute faite qu’elle dit sur le même ton, à croire qu’on l’a obligée à avaler une bande magnétique – à une âme liquide.
Les participants à ces assemblées diverses, Noëls, anniversaires, ne semblent pas s’en offusquer et le vivent comme un bon mot auquel ils rient joyeusement, ne ressentant pas la portée d’un tel missile.
J’ai voulu te changer…
Imaginez qu’une telle phrase résonne autrement trente ans plus tard quand je suis couchée là, devant vous, et qu’il ne me reste bientôt plus que la peau sur les os pour vous dire ce que je n’arrive pas à effacer, cette envie qu’elle a eu d’entrée de vouloir me « changer », m’évoquant comme un simple petit pot de moutarde qui se déverse tendrement dans sa main.
Te changer…
Me changer tout court, m’échanger ou me changer contre ? Un garçon par exemple qui l’aurait plus satisfaite, dont elle aurait pu vérifier les érections quand sa main passait, oh par hasard, sa main avec sa bague-serpent, en dessous de la ligne du slip afin de vérifier si cette petite personne était sensible à son charme sexuel.
Vérifier quoi ?
Reprenons. Quand je suis rentrée de la maternité… Oh, mon Dieu, j’aimerais qu’on puisse appeler la maternité par un mot plus approprié… L’immaternité par exemple ou tout autre terme qui expliquerait cette impossibilité de protéger. Elles sont des milliers de femmes à accoucher sans ressentir une perle de tendresse pour ces petits gigots, sortis pourtant de leurs entrailles,
on pourrait même dire que ces gigots sont des paquets de saletés qu’elles doivent nettoyer afin de ne pas se laisser souiller, ni par leurs bouches toujours un peu baveuses ni par leurs fesses bavardes,
ennemies rapprochées de leur progéniture, régnant dans cet enfer de la captivité, la haine invisible qui se joue sous le manteau de la famille.
– J’étais trop fatiguée pour t’allaiter.
Nous y voilà, nous voilà devant ce mur qui permet de cacher toutes les saloperies que la Terre a engendrées : le mur de la supposée fatigue, l’éventail coquet, une putasserie de bouclier.
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La maladie est une éponge à double face, elle emporte dans son écume pâle les bonnes choses comme les mauvaises, Missoula, en premier, qui s'est évanouie dans les limbes, mais aussi la totalité de son savoir.
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La mort a beaucoup à nous apprendre et il suffit parfois du décès d'un parent pour que les éléments enfouis durant des lustres parviennent à la conscience.
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C'est tout simplement que la maladie avance. Le vêtement endossé par le sujet attaqué s'avère bouffé aux mites. Tranquillement, les mercenaires nanoscopiques grignotent dans l'ombre. Les trous ne se voient pas tout de suite et quand on veut remettre ledit costume, on se rend compte qu'il ressemble à une passoire souple. Le cerveau perd des billes molles, la puissance s'ankylose sans espoir de rémission.
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La maladie est un isoloir, elle met la personne atteinte d'un côté et les proches de l'autre. La démence enferme, on a beau voir le paysage à travers la herse de fer forgé, les murs se resserrent comme une main avide qui reprendrait ses billes.
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