Tous les amateurs connaissent, au moins de renom, la magnifique collection de livres italiens que possède à Londres M. Charles Fairfax Murray. Rien n'égale peut-être l'amour de ce fin dilettante pour ses chers livres, si ce n'est le plaisir qu'il goûte à en parler avec quelqu'un qui soit, comme on dit, « du métier », à les montrer les uns après les autres, à les commenter en artiste tout imprégné de la culture
Parmi ces imprimeurs-illustrateurs, se range le célèbre Luc-Antonio Giunta, dont le nom figure en toutes lettres sur la gravure de titre d'un Virgile sorti de ses presses en 1515.
Mais s'il est à peu près certain que l'imprimerie fut introduite et propagée en Italie par des Allemands, on peut tenir pour non moins assuré que, longtemps avant cette époque, les Italiens pratiquaient avec maîtrise l'art de tailler en épargne une planche de bois ou une plaque de métal, pour empreindre une image sur une pièce d'étoffe, ou même feuille de papier.
Venise, la fastueuse et savante Venise, où les Bellini peignent pendant que les Aides impriment, est un de ces foyers d'ardentes études et d'incessantes publications. Là fleurissent à la fois les imprimeurs venus du dehors et ceux de la cité, les rudes noms germains et les noms italiens aux molles désinences.
Le mouvement de la Renaissance secondait cette infatigable activité des nobles artisans et était secondé par elle. On voulait apprendre tout en même temps; une étonnante avidité de lecture consumait les esprits; on lisait, un peu à l'aventure, sans choix ni discernement.
Lorsqu'on étudie le développement de l'imprimerie à Venise, et à particulièrement la mise en oeuvre, par les éditeurs vénitiens, des divers éléments qui concourent à la formation du livre, on est frappé de voir à
quelle perfection s'éleva, dès le début, cet art nouveau, dans une ville qui devait rester pendant plus de deux siècles le marché de librairie le plus important du monde ; on admire surtout l'habileté avec laquelle les imprimeurs, pour parachever l'élégance et la beauté de leurs productions, surent tirer parti des merveilleux artifices de la gravure sur bois, qui fut le principal auxiliaire de la typographie naissante, après en avoir probablement donné la première idée.
L'art de l'illustration des livres doit être considéré comme absolument distinct et même exclusif; car les dessinateurs et les graveurs qui s'y adonnèrent en firent un métier dont les exigences ne leur permettaient guère d'en pratiquer aucun autre.
Toutes les autres bibliothèques publiques d'Italie, où nous avons récolté une si ample moisson, ont mis leurs trésors à notre disposition avec la même largesse ; et partout leurs administrateurs nous ont témoigné une bonne volonté et une déférence dont nous avons été profondément touché. Nous avons cependant des obligations particulières envers quelques-uns d'entre eux qui sont allés bien au-delà de la courtoisie que nous pouvions attendre de leur part.
Bartolomeo Zamberti a été surnommé "da li Sonetti", à cause de sa prédilection pour ce genre poétique. Il était vénitien, comme il l'apprend lui-même aux lecteurs dans une termina de la préface ; dans le second sonnet, il raconte qu'il servit quinze fois comme officier sur les galères de la République, et devint ensuite "padrone di nave".