Citations de Vincent Caillard (30)
... les accès psychotiques surviennent préférentiellement au printemps et en automne. C'est aussi lors de ces deux saisons (avec un pic en fin de printemps) que semblent survenir plus volontiers les suicides.
On a assez justement comparé la perturbation de l'association des idées chez le maniaque aux phénomènes rapportés lors de certains types d'altération de l'état de conscience (fatigue, surmenage intellectuel, dénutrition ou jeûne prolongé, intoxication alcoolique).
Electro-Convulsivo-Thérapie (ECT). - Mention doit être faite de cette thérapeutique, qui était la seule méthode efficace de traitement des troubles de l'humeur avant l'introduction des chimiothérapies. Ses indications sont actuellement extrêmement réduites non pas tant du fait des divers problèmes qu'elle pose, que d'une efficacité bien moins nette dans les états maniaques que dans les états mélancoliques (où elle conserve un champ d'application).
... le lithium [...] semble bien manifester son efficacité sans effet sédatif propre, et de façon suffisamment progressive pour ne pas apparaître comme une contrainte extérieurement imposée.
Si l'on continue de parler d'accès maniaque, il s'agit actuellement et dans bien des cas d'un abus de langage, l'aspect le plus fréquemment rencontré chez les patients ayant déjà établi une relation thérapeutique étant celui de l'hypomanie. Une des raisons expliquant cette évolution est l'extension des chimiothérapies dans la pratique courante, qu'il s'agisse de la prescription de la neuroleptiques ou de la mise en œuvre d'un traitement au long cours par le lithium.
Du fait du trouble fondamental de l'humeur, il est rare que le maniaque soit à même d'exprimer une souffrance, une demande, ou même d'accepter une hospitalisation. Dans le tourbillon frénétique de sa jubilation, il ne s'est jamais senti aussi bien, aussi puissant, et est hors d'état de percevoir autrement que confusément le caractère anormal de sa conduite. Les circonstances font donc que l'hospitalisation se réalise généralement d'une façon autoritaire, sans qu'un consentement éclairé ou durable puisse être obtenu du principal intéressé.
On peut, avec Freud, réintroduire ici la dimension biologique (encore bien opaque) en admettant que "l'investigation psychanalytique s'arrête devant la question du déterminisme des facteurs qui engendrent cers troubles évolutifs et abandonne ce problème à la recherche biologique".
Une des principales difficultés reste l'élucidation du pourquoi, chez les maniaco-dépressifs, ce choix de la défense maniaque pour sortir de l'angoisse. Si le deuil maniaque existe, et si, comme le souligne Racamier, "la mélancolie est le seul produit primaire de la psychose maniaco-dépressive et la manie lui est toujours secondaire", cette dernière ne peut être considérée de façon linéaire comme l'aboutissement logique d'une stratégie défensive ou comme un simple balancement pendulaire entre deux états opposés.
Freud comparait le banquet maniaque au festin totémique des primitifs incorporant la chair du père ancestral, et voyait dans cette dévoration orgiaque la source de remords et d'expiations ultérieures.
Une observation superficielle pourrait faire croire que le mélancolique n'est imprégné que d'un mépris pénible de lui et d'une tendance exclusive à s'amoindrir; Une étude attentive montre que nous pourrions dire l'inverse. (...) cette ambivalence envers le moi contient la possibilité d'un changement de l'état mélancolique en état maniaque." [Abraham]
[Abraham] Une investigation approfondie de la vie psychique des mélancoliques nous permet de voir que l'être qui souffre de la perte de ses intérêts lorsqu'il est en état de dépression est prédisposé à cette perte par le degré marqué d'ambivalence de ses sentiments. Bien avant, le malade - dans sa façon de s'adonner à sa profession, à ses intérêts intellectuels, etc. - avait été fébrile et obstiné et comme pressentant le danger d'une brusque rupture.
... le mouvement maniaque n'est pas un mouvement orienté vers un but, mais un mouvement dans le présent. Le type même du mouvement maniaque, dans un espace sans dimensions, est représenté par la danse, mouvement d'enroulement qui se satisfait de lui-même. L'existence maniaque, dan une succession de "présents" sans liens les uns avec les autres, animé d'un perpétuel tourbillon, tend à une fusion constante et quasi extatique entre le sujet et l'objet, ou plutôt les multiples objets sur lesquels il se projette dans l'instant.
Minkovski avait déjà défini l'un des traits spécifiques du maniaque, la syntonie, comme étant essentiellement de se satisfaire dans le présent (au contraire du mode de déploiement dans le temps du schizoïde qui se projette dans l'avenir).
... si le tonus sérotoninergique semble bien constamment abaissé chez les maniaques comme chez les déprimés, les variations du tonus catécholaminergique sont moins claires : l'hyperactivité dopaminergique n'est pas prouvée, et tout au plus peut-on soupçonner une hypersécrétion noradrénergique au moment du virage.
Le mode de transmission de la psychose bipolaire reste très discuté.
Certaines intoxications, volontaires ou accidentelles, peuvent donner lieu à l 'éclosion d'états d'allure maniaque, le plus souvent spontanément et rapidement résolutifs, il est vrai. La plus fréquente est d'ailleurs l'ivresse éthylique, dans sa forme excito-motrice. D'autres drogues peuvent être en cause comme les dérivés du cannabis, les amphétamines, la cocaïne, les atropiniques. parmi les intoxications accidentelles, cotons surtout celle par l'oxyde de carbone.
On peut considérer la psychose maniaco-dépressive bipolaire comme une entité homogène, définie par la survenue d'états maniaques, avec un continuum d'épisodes dépressifs associés. La manie unipolaire ne serait alors qu'un des extrêmes de ce continuum.
... à des degrés divers les états maniaques ne sont généralement pas dépourvus de manifestations dépressives notables.
La manie akinétique, enfin, comporte une inhibition motrice telle que les patients manifestent tranquillement, dans leur lit et sans aucune contention, tous les traits du syndrome maniaque (en particulier la logorrhée expansive) sans aucune activité motrice.
La manie improductive ne conserve de la manie que l 'euphorie et une excitabilité exagérée. Le tempo de base n'est pas accéléré, il n'y a pas de fuite des idées. Ces patients donnent l'impression d'une euphorie passive et pauvre, entrecoupée d'impulsions à agir limitées et peu durables.La stupeur maniaque, assez proche de la forme précédente , constitue un état de mutisme euphorique et béat, peu mobile, inaccessible. Ces sujets restent cependant conscients et orientés, capables par intermittence de remarques amusantes, traversés par des idées délirantes de contenu variable.