Qu'il s'accuse d'indifférence vis-à-vis d'autrui ou se plaigne du manque d'affection dont il est victime, le déprimé souffre toujours d'un vide affectif auquel s'ajoute une agressivité tournée vers l'objet frustrant : elle se manifeste par des demandes affectives dévorantes, exprimées avec violence et jamais satisfaites.
Il n'est pas facile de comprendre le comportement et les sentiments d'un déprimé, de "se mettre à sa place"; il est difficile d'imaginer son angoisse, ses mouvements agressifs, sa fatigue, ses difficultés pour se concentrer et raisonner, son manque total de goût pour toute activité. Cette incapacité à se représenter réellement une telle expérience s'explique en partie par le fait que l'on refuse souvent à la dépression le statut de maladie : dans l'esprit de l'entourage, il ne s'agit souvent que d'un manque de volonté ou d'une attitude agressive insupportable à l'égard des proches. Cette négation de la maladie ouvre la voie à toutes les erreurs d'interprétation et tous les quiproquos.
La dépression n'est ni faiblesse de caractère, ni folie. C'est une maladie. Sa fréquence est très élevée et son évolution peut être grave : le nombre des suicides, dont la dépression constitue l'une des causes essentielles, vient l'attester.