Néanmoins, M. Diday n’a pas craint d’aborder cette tâche immense, et quand il n’en aurait saisi que le coté énergique et puissant, il faut avouer qu’il a su le rendre avec un rare bonheur. Tandis que les peintres genevois n’avaient osé gravir jusqu’alors que la première zone de la nature alpestre et avaient abandonné aux enlumineurs les vues des hautes cimes, M. Diday se demanda s’il n’y avait pas là des sujets capables de l’inspirer.
Il marcha donc courageusement à la découverte de cette terre nouvelle, de ces hauteurs « vierges de pas humains, » et il en rapporta des trésors d’études. Dépassant de beaucoup Wolfgang-Adam Topfifer et de la Rive, il éleva le type et le caractère de la nature suisse; il la prit, non gracieuse et pittoresque, telle qu’elle s’offre dans les vallées aux yeux des touristes, mais sévère et terrible, telle que les pâtres et les chasseurs de chamois l’avaient jusqu’alors contemplée.
Aucune ville ne semblait moins faite que Genève pour le développement des beaux-arts. Au moment même où la renaissance faisait éclore tant de chefs-d’œuvre en Italie, la Rome protestante assombrissait son caractère, demeurait iconoclaste et expulsait les quelques artistes qui cherchaient à s’établir dans ses murs.
Les premiers essais de paysage alpestre révélèrent tout un monde nouveau dont aucun modèle antérieur n’avait fixé dans l’art le caractère puissant et sauvage. On découvrit les mêmes richesses imprévues dans les inspirations de l’histoire nationale, et le cycle de la peinture alpestre, une fois ouvert, arriva bientôt à la plus haute expression qu’il lui fût permis d’atteindre.