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Critiques de Yeshe Thubten (1)
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Le pouvoir de purification du Tantra

Lama* Thoubten Yéshé est, dans ce manuel de pratique de yoga tantrique, d’une brillante clarté, son étincelante intelligence précise les contours de ce qu’est l’exigence d’une vie spirituelle, à distinguer d’un amalgame avec une religiosité d’un autoritarisme suspect, et très douteuse trop souvent ; lui, en tant que représentant d’une tradition spirituelle, se positionne de façon délibérée dans une vision moderne vers l’Occident d’aujourd’hui.

L’ouvrage se présente en deux parties différentes, un « Commentaire Principal » suivi « d’Instructions de retraite » ; nous nous bornerons à donner notre sentiment sur la première partie, la seconde s’adressant à un “public” trop restreint pour avoir un quelconque intérêt dans le cadre qui nous occupe ici. Cependant , nous nous y référerons en terme de citations signifiantes et éclairantes, pour le “public” concerné à qui s’adresse ce livre spécialisé.



Un premier “message” est stipulé en introduction à destination des personnes intéressées : l’approche exclusivement l'intellectuelle ne suffit pas ! La mise en activité in-situ est nécessaire pour assimiler et intérioriser l’amorce du processus de métamorphose des modes perceptifs de fonctionnement de la Vie qui nous habite.

Lama Thoubten d’ailleurs se positionne en dehors du “dogme strict”, ce qu’il préconise c’est une implication pragmatique, quasiment un “travail manuel”, sur nos jeux émotionnels gravitationnels, ce qu’il stipule clairement (p. 56).

Pour lui, la condition préalable, avant d’aborder à proprement parler la “méditation assise” śamatha, ([chiné] ཞི་གནས་ en tibétain) ou vipaśyanā ([lhaktong] ལྷག་མཐོང en tibétain), est de développer une conscience aigue sur ce qui motive nos actes et notre manière d’être en général, plutôt que d'être obsédé par le fait de “méditer” qui se distinguerait d’un état “non-médité” dans notre vie quotidienne (pages : 43/44/45).

Il nous met en garde par ailleurs devant une approche trop “intellectualisante” : « La parole d'hommes sans expérience est comme le sifflement vide du vent dans vos oreilles (p. 48).

… je crois qu'il vaut mieux pour vous une pratique continue de plusieurs années que des accès impulsifs et émotionnels de méditation en retraite solitaire. Une pratique continuelle constitue une voie puissante de purification des actions négatives. (p. 49) »

De la page 53 à 55 il dépeint avec éloquence ce qu’il nomme lui-même de faute grave : le « gourouisme » ! Nous avons rarement eu une “peinture” aussi claire et percutante de la chose de la part d’une autorité tibétaine reconnue, en la matière ! (à bon entendeur … !)

« Parfois les gens s'imaginent que les lamas ont le pouvoir de changer leur vie. Mais c'est la sagesse du Dharma qui change l'esprit humain. Elle pénètre votre conscience, et vos attitudes mentales s'en trouvent transformées. Ceci est le pouvoir du Dharma et non la magie des lamas. Nous ne connaissons rien du tout à la magie ! (p. 75)

De nos jours, beaucoup de gourous sont attachés à leurs disciples et veulent que leurs disciples leur soient attachés. C'est une erreur monumentale. Il est absolument malsain pour des disciples d'être attachés à leur maître ou à leur chemin ! (p. 239)

… ceci signifie qu'en définitive, c'est vous (et non les bouddhas) qui êtes responsables de votre propre libération. Soyez très clairs là-dessus. » (p. 58)

Soit les trois socles de base :

— le dévouement, et le travail des “paramita” (l’altérité).

— l’abandon de la perception gravitationnelle identitaire des émotions.

— l’aléatoire de l’impermanence et l’appartenance à la totalité ou vacuité.

Il soulève par ailleurs l’ambiguïté pouvant surgir dans le cadre de “retraites” institutionnalisées, d’être “entretenu” sans avoir la nécessité de lutter au quotidien pour le vivre et le couvert (p. 96), et également, le fait que toutes les pratiques du monde oriental ne sont pas forcément à “valider” dans la culture occidentale, certaines pouvant ne pas convenir du tout ! (p. 200).

En outre, il précise sa pensée : parlant “d’innovations tibétaines” ne relevant pas de traditions dont il aurait été hérité depuis les temps anciens de l’Inde. (p. 224)

— Les substances à offrir :

« Vous pouvez offrir au tsok toutes sortes de nourriture ou de boissons. Il n'est pas indispensable que vous adoptiez le style tibétain, car les tormas en tsampa n'existaient évidemment pas du temps de Nagarjouna dans l'Inde ancienne. Vous pouvez offrir des carottes, du chocolat, des milkshakes ou même de la nourriture dite noire [...], en bref, tout ce que vous aimez qui soit propre et disponible là où vous vivez. (p. 233)

D’autre part, Lama T. Yéshé exprime sa grande confiance en la capacité de l’être humain de mettre en œuvre la flexibilité de sa neuroplasticité et de la beauté de son esprit de résilience, pour peu que les conditions puissent être réunies … (p. 235) et donner ainsi un élan de générosité face au fatalisme défaitiste où nous n’aurions aucun moyens de progresser dans la maturité de notre propre Humanité. Dans cet ordre de point de vue il stipule que : « Je ne crois pas que la renonciation des moines et moniales soit forcément meilleure que celle des laïc, en quoi que ce soit. »

Et il précise : « Lorsque vous connaissez la nature (ou la réalité) des plaisirs sensoriels, vous avez l'espace suffisant pour lâcher prise. Les plaisirs des sens vont et viennent. C'est ainsi et vous l'acceptez. (p. 266) Faire preuve de souplesse, voilà la clé : vous êtes satisfaits si vous obtenez du plaisir, vous l'êtes aussi si vous n'en obtenez pas. De cette façon, il devient facile de vivre. » (p. 269)

Ainsi donc il relève de la responsabilité de tout un chacun de développer la “maturation” de sa propre humanité.

Notons que dans le cadre spécifique de la tradition spirituelle du Vajrayana, Lama Thoubten recommande la plus stricte et grande discrétion quand au processus engagé, à savoir que :

« Certains disent : “J'ai reçu cette initiation, pas toi.” Je n'approuve pas ce genre d'arrogance. Que ce soit parmi les Tibétains ou les Occidentaux, qui peut dire qui a reçu quelle initiation ? Seuls les individus concernés peuvent dire quelle initiation ils ont ou n'ont pas reçue. Vous ne pouvez décider cela pour les autres. C'est en ce sens que j'autorise habituellement toute personne sincère, à venir à une initiation. Je ne peux savoir si l'esprit des autres est élevé ou pas, ni si l'initiation leur viendra en aide ou pas. Soyez prudents. »

et d’ajouter : « Quoi qu'il en soit, de brèves expériences de méditation dans un centre du Dharma ne suffisent pas. Vous devez, où que vous soyez, maintenir une conscience continue de la vision juste. » (p. 265)

Il clarifie clairement également un des aspect du Vajrayana souvent lancé “à la cantonade” dans ces milieux en Occident : — « Que signifie l'expression “enfers de vajra” ? « Vajra » peut être entendu au sens relatif ou absolu. Ici, je me réfère au vajra relatif (comme le vajra et la cloche, instruments tantriques dont nous nous servons). Le mot signifie “indestructible”, « pareil au diamant ». Le diamant est plus dur que la plupart des autres matériaux ; il est difficile à détruire. Telle est la connotation de vajra. Serait-il possible qu'il existe un royaume indestructible de souffrance ? Disons qu'il s'agit là de licence poétique, qu'il y a légère exagération. Il n'existe rien de tel qu'un phénomène permanent, inchangeable. [...]

De toutes façons, ce n'est qu'une expression qui n'est pas à prendre à la lettre. » (p. 250)

Égratignant plaisamment dans un clin d’œil “les super-méditants” : « ...les méditants deviennent parfois hypersensibles et remplis de colère. Ils ne veulent aucune distraction et peuvent devenir très égoïstes. Quelqu'un fait un peu de bruit et ils en sont très contrariés : “Vous détruisez ma méditation !” » (p. 276) L. Thoubten explicite la bodhicitta : Bodhi signifie “totalité”, citta, “cœur”, « cœur de totalité » (en contrepoint de la gravitation émotionnelle étriquée et douloureuse), qui développe l’intérêt** universel pour autrui en y invitant au maximum tous les êtres… l'attitude dévouée est votre méditation et votre vie ; votre pratique de vigilance consistera alors à éliminer l'attitude égoïste et vous consacrer à autrui […] Rien d'autre n'est en mesure de vous satisfaire véritablement. Vous n'avez pas besoin d'être fortuné pour ce faire. Même si vous n'avez rien, vous pouvez quand même y consacrer votre vie. (p. 275/76/77)



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* authentique ! À savoir :

— terme qui désigne le maître spirituel [tib. dorjé-lopeu ou skr. vajràcàrya], plus précisément qualifié pour transmettre dans le cadre du vajrayana les “abhisheka” d'une sādhanā (cheminement spirituel) devenant éventuellement le “lama-racine” si il y a lieu. Son rôle, tel un(e) maïeuticien(ne), est de mener le pratiquant à l'éclosion en lui-même de son propre « maître en soi ».

“abhisheka” d'une sādhanā :

lung (souffle/influx vibratoire de la “grâce”) ; wang (canal vers un récipiendaire recevant l’énergie de faire) ; tri (lecture rituelle avec instructions)

** (… bienveillant ! ... et qui devra l’être d’autant plus que nous sommes confrontés nous-même à des peines qui nous touchent dans notre personne [note du transcripteur])

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— Il est à noter que L. Thoubten emploie souvent les termes de “superstition - pensée superstitieuse”, ceci est à entendre comme équivalent de “trompeur/trompeuse”, par un attachement excessif à la saisie du mental.
Lien : http://www.versautrechose.fr/
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