Son travail, il le fait consciencieusement, avec des outils qui datent presque tous du début du siècle, au moment où il a pris la ferme décision de devenir le cordonnier de Grandes-Bergeronnes. Jamais par la suite il n'a senti le besoin de transformations ultra-modernes dans son outillage. Ses outils, ses moulins à pédale, son tablier et ses manicles lui donnaient l'assurance de satisfaire la clientèle.
Il nous a été donné de rencontrer cet artisan à un dizaine de reprises. Toutes ces heures passées en sa compagnie, à le regarder travailler et à écouter attentivement la moindre explication, nous permettent de dégager ce tour d'horizon du métier de cordonnier.
Peu à peu cet homme nous fait découvrir sa vie, sa personnalité et sa vision du métier après l'avoir pratiqué pendant quelque soixante-cinq années. Durant toute cette période les choses ont évolué. Des moments ont été plus pénibles que d'autres. Les habitants du village n'ont pas toujours été capables de rémunérer adéquatement l'artisan pour son travail. Malgré toutes les embûches, il demeura quand même cordonnier jusqu'au bout.
Malgré toute cette activité qui règne presque toujours dans sa boutique, il ne peut se résoudre à faire l'achat de grosses machines modernes pour augmenter sa production. Il est vrai qu'il abandonne la fabrication de la chaussure vers mil neuf cent cinquante-cinq, se contentant depuis lors d'effectuer des réparations pour les autres et de se confectionner des souliers et des pantoufles. Pour lui donc, les manufactures n'ont jamais été concurrentielles.