On médit moins pour nuire que pour se rendre intéressant. Douter de soi exciterait-il à médire?
Je ne prétend pas éclairé la sincérité d'une lumière définitive. Mais je sais de quelle expérience cet essai a été le livre de salut. Avec lui, j'ai appris à n'écrire rien que je n'aie observé ou dont je me sois informé. A bon droit ou à tort, il m'a semblé que le philosophe n'avait pas d' "effet" à produire mais qu'il devait aider les autres- que l'on me pardonne cette vieillerie!- en proposant, avec le plus d'exactitude et de clarté possible, quelques vérités que, parfois, ils puissent reconnaître en eux.
Il ne faudrait à aucun prix que, se vulgarisant, les psychologies de l'échec fissent considérer les infortunes comme "cas intéressants" étayant nos dérisoires connaissances, soit comme des sanctions de justice. Nous n'y sommes que trop portés.
L'échec n'est plus un accident: il est la réalisation déguisée d'un désir refoulé, il est choix, il est intentionnel...
Il suffit, une fois de plus, de revenir à Kant pour comprendre combien de telles perspectives bouleversent du tout au tout les conceptions traditionnelles. Avec quel soin Kant ne s'attache-t-il pas à fonder la valeur de l'intention morale dans l'autonomie du sujet!
Le DE PRINCIPIO INDIVIDUI, la thèse que Leibniz présente, en mai 1663, pour obtenir son baccalauréat, opte pour le nominalisme. Les substances créées ne trouvent leur principe d'individuation ni dans la forme, ni dans la matière, mais dans leur entité totale (forme et matière) ; il n'y a entre la forme et la matière, l'essence et l'existence, le genre et la différence spécifique, qu'une distinction de raison ; la nature s'individue elle-même (§ 12), entendez que le mouvement de la matière première suffit à engendrer — car les essences des choses ne sont éternelles qu'en tant qu'elles sont en Dieu (coroll. iv) — les figures particulières. (p. 36)
Partout j'ai du me limiter. Tantôt la célébrité des auteurs-Claudel, Valéry, Eluard, Ponge...- m'a découragé de me mêler à la foule .Tantôt le temps m'a fait défaut: j'ai laissé mourir Maurice Blanchard sans rien dire. Pourquoi me suis-je tu sur un Henri Thomas, sur un Georges Perros qui réinventent la simplicité? Il y a un hasard des circonstances. J'ai parlé de ce que j'aimais, je n'ai pas parlé-loin de là!- de tout ce que j'aimais.
Honte aux voleurs de lettres et d'archives, qui ressuscitent la vie d'un grand homme pour projeter une ombre et non une lumière sur leur oeuvre.
On me demandera pourquoi je m'intéresse à la poésie: c'est que je me suis toujours intéressé à elle; c'est que je trouve en elle, comme dans les mathématiques, un chef-d'oeuvre de la raison, qui m'éclaire sur la raison; c'est qu'elle manifeste pour la liberté.