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Citation de hcdahlem


Grande agitation pourtant dans le gourbi. Des bruits
de lutte. Des cris.
Puis nous vîmes sortir Forcinal, hâve, défait, amaigri, titubant, le visage tuméfié, la peau des poignets à vif, une couverture sur les épaules, soutenu par deux policiers
précautionneux.
Derrière lui, entravée par des menottes, hurlant comme une démente, écumant de rage, les cheveux dans la figure, la jeune Lise, convaincue des crimes de séquestration, voies de faits, violences, sévices sexuels et mutilations à l’encontre du malheureux concierge, arraché de justesse à l’enfer grâce à notre intervention, à notre courage, à notre esprit d’initiative, il fallait que ce soit dit et que nos voisins le sachent.
Je n’ose imaginer ce qui serait advenu de lui si nous n’étions rentrés si précipitamment de vacances, avertis sans doute par quelque pressentiment.
Il nous devait la vie.
Les futurs lecteurs de Novat s’aviseront peut-être que toute cette histoire rappelle étonnamment l’intrigue de son unique pièce de théâtre, La Portière et le saute-ruisseau.
Mieux vaut fermer les yeux sur ces coïncidences si l’on refuse d’admettre qu’un Dieu moqueur est à la manœuvre et que nous sommes des marionnettes accrochées au ciel par des fils tendus qui frisottent juste un peu au niveau du pubis.
La pièce sera dans le volume de Postérité, lequel demeurera malgré tout incomplet. Si j’ai remis à l’éditeur les manuscrits originaux de Novat en ma possession, j’ai en effet conservé ses lettres.
Celles-ci, Malatesta ne les aura pas. » p. 216-217

« – Reprends-toi, mon ami, il existe pourtant un moyen sûr d’accéder à l’immortalité.
– Ah?
(une mésange pond trois petits œufs dans le nid de ses
cheveux)
– Connais-tu l’Agence?
Comment Prunier connaîtrait-il l’Agence, conçue à l’instant – nous avons surpris son spasme – par Alcide, vouée d’ailleurs à demeurer dans les limbes, à l’état d’idée quoique bien réelle entourloupe.
– Un mien ami la dirige aujourd’hui, mais l’Agence existe depuis longtemps déjà. Elle se propose d’assurer aux artistes injustement méconnus la gloire posthume qu’ils méritent.
– Mais comment cela?
On se le demande, en effet.
N’importe qui à la place de ce vieux Prunier aurait posé la question.
– C’est très simple. Le poète qui a recours à ses services achète de son vivant, sur le principe des concessions, un forfait valable, en fonction de la somme versée – qui pourra être augmentée par un legs en bonne et due forme –, dix, vingt, trente années ou plus, durant lesquelles, sitôt constaté le décès de son client, l’Agence veille à sa reconnaissance et à la diffusion de son œuvre, en l’imprimant d’abord, en organisant des événements littéraires et des lectures publiques en hommage au disparu, en passant commande à de jeunes plumitifs sans le sou d’ouvrages savants et d’études consacrés à sa poésie et de bustes de sa personne à des sculpteurs sans travail, bustes qui seront ensuite, avec l’aval d’édiles stipendiés – sinon clandestinement –, implantés sur des places ou dans des squares.
– Mais pourquoi ne pas proposer ces prestations tant que le poète vit encore? S’impatiente Prunier.
– Tel est le prestige de l’Agence. Elle ne s’occupe que de la postérité de ses clients. Note, mon cher Prunier qu’elle ne vend pas ses services qu’aux poètes comme toi honteusement méconnus. Pourquoi crois-tu que nous lisons encore Lamartine ou Chateaubriand?
– Ils ont payé?
– Ils ont payé.
– Heu... cher?  p. 250-251
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