En Principauté, dans la nuit du 2 au 3 septembre 1944, c'est le chaos le plus total. Dans une atmosphère dantesque, le ciel zébré par les éclairs et illuminé par les explosions des obus de la flotte alliée (française en fait) qui bombarde les installations allemandes sur les hauteurs, alors qu'un violent orage s'abat sur la ville, les dernières unités de la Wehrmacht s'apprêtent à abandonner le pays.
Le Prince Rainier, héritier du trône occupé par son grand-père, a quitté le palais princier avec sa soeur Antoinette. (...) Rainier n'est évidement pas communiste, il n'est pas non plus résistant. (...) Mais, il est ni sourd ni aveugle, encore moins idiot. Or, il voit bien la germanophilie de certains, et surtout, il sait parfaitement que le ministre d'Etat est un collaborationniste qui a entraîné la Principauté aux côtés de l'Allemagne, au moins sur la question juive, et assurément sur la voie de la collaboration économique.
Il sait que Roblot a poussé son grand-père à instaurer au plus vite les deux lois antisémites et une loi antiétranger (antijuive en fait, à la demande explicite des Allemands) qui ont provoqué l'arrestation et la déportation de dizaines de juifs. (...) Le ministre d'Etat a lui même dénoncé des résistants monégasques qui seront fusillés à Nice, et surtout, a entamé un grand mouvement de collaboration économique à travers la création de Radio Monte-Carlo, la Banque Charles, les affaires immobilières et hôtelières de Skolnikoff, celles des achats de camions de Melchiorre, et la constitution de centaines de sociétés holdings allemandes ou françaises, notamment de vins et spiritueux, dont le propos est de frauder le fisc français.
Pour attirer la clientèle aux jeux, le gouvernement encourage les dancings en Principauté. Les cabarets comme le Mayfair reçoivent l'autorisation de fermer à 3h du matin au grand dam du consul de France. Il faut rappeler que le gouvernement de Vichy a interdit la danse et n'encourage que les gavottes et autres rigodons folkloriques. On recommence à s'amuser à Monaco !
- Il ne me reste qu'à me suicider!
- Non mon général, ce serait une lâcheté.