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Alix, tome 5 : La Griffe noire

Le 5ème album des aventures d'Alix s'ouvre sur un paysage dont on aimerait bien faire partie, même avec la silhouette dominante mais endormie du Vésuve en arrière-plan : Pompéi. Mais voilà, la villégiature des romains n'est pas si calme que cela. Leur empire ne leur apporte pas que des épices et des esclaves : des soucis aussi !



À commencer par cette série d'attentats qui viennent rompre le calme de Pompéi. Un mystérieux agresseur paralyse ses victimes grâce au pouvoir d'une étrange griffe noire. Alix découvre l'origine de cette arme et aussi celle de ce qui s'avère être une vengeance, loin d'être aveugle. Sauf lorsque Claudius, le petit-neveu d'un des 5 officiers visés par les attentats, reçoit lui aussi un malencontreux coup de griffe. À la recherche de l'antidote Alix et Enak vont avoir affaire avec un étrange mage, Rafa, dans une course-poursuite qui les conduit près d'un autre volcan éteint, en Afrique...



La Griffe Noire offre un récit linéaire, limpide et haletant, clairement composé de deux parties, situées dans deux lieux différents : l'enquête policière sur les attentats commis à Pompéi, qui met à jour le drame humain et politique à l'origine de cette vengeance. Et l'aventure exotique mais aussi militaire en Afrique noire, à la recherche du contre-poison. Le retour final à Pompéi est bref et agit comme la morale finale d'une fable. Les choix de lieu, de ton et les symboles sont forts - on en reparle plus loin - maintenant, et aussi pour ça, on ne s'ennuie pas un instant.



Si Enak prend dans cet album une stature plus importante - il n'est plus le seul gamin à faire une vraie grosse bêtise, suivez mon regard ! - il n'est pas le seul. Alix aussi, qui doit mettre sa ruse à son propre service, pour réparer sa propre faute. Et puis il y a Rafa, un vrai bon méchant, comme on les aime. Bien plus que le mauvais de service. Il a une vraie raison de se venger : sur le fond on ne peut lui en vouloir. Mais les armes redoutables et procédés obscurs qu'il utilise pour arriver à ses fins ne le rendent pas vraiment sympathique. Le lecteur est partagé par ce méchant à double tranchant qui enfourche aussi - quand ça l'arrange... - la cause des noirs et par la culpabilité des officiers romains et l'accident pénible causé par Alix. Ce n'est pas du Corneille mais quand même !



Oui, quand même, car il y a bien un dilemme. Celui de la colonisation. Renonçant à décrire comme il l'avait fait dans L'Île Maudite la partie du récit qui aurait pu être une odyssée maritime - à l'aller comme au retour, on a droit en pleine mer à une ligne de gaufrier - Jacques Martin plante son décor d'une part chez les colons, la Rome dominatrice et, pour les officiers objets de la vengeance, oisive à la retraite en bord de mer. D'autre part en pleine jungle africaine, au milieu du peuple noir. On entend la résonnance du contexte posé à l'époque d'Alix, à celle de la sortie de l'album à la fin des années 1950 et à sa (re)lecture aujourd'hui. Si Martin use des mêmes sources qu'Hergé - l'Afrique des musées qu'il visite, celle des cartes et des récits qui le dépaysent ou encore celle de Tintin au Congo et ses hommes-léopards - il pose le sujet de la responsabilité des colons. Si son récit les amène à laver leur linge sale en famille, il punit les coupables, même par accident, évoque clairement les razzia de villages africains et laisse aussi planer en permanence la menace d'une nature - tout court, mais humaine, on a le droit de l'espèrer - reprenant ses droits sur tout excès... même et également humain.



Un album captivant, noir et puissant qui offre aussi avec la 1ère et superbe planche évoquée plus haut, l'une des plus belles couvertures de la série, tant en Lombard que chez Casterman.
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