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    JML38 le 06 novembre 2020
    Une vie de roman – Page suivante

    Marie se dépêcha de boucler un dernier dossier, pressée qu’elle était de rejoindre la petite dame aux cheveux gris sur le banc. Elle savait son nom depuis la veille : Madeleine, surnommée Mado.
    Mado était fidèle au poste, toujours comme plongée dans ses souvenirs. Souvenirs que Marie se délectait à l’avance de découvrir un peu plus.
    - Bonjour Mado.
    - Bonjour mademoiselle. Vous êtes bien mignonne.
    - Nous nous sommes parlé hier, vous ne vous souvenez pas ?
    - Veuillez m’excuser, mais j’ai plus de mal avec mes souvenirs récents qu’avec les anciens.
    - Ne vous excusez pas. Vous m’avez raconté votre vie dans un cirque, où vous avez travaillé avec Paulo et eu une fille avec Gunther. Puis votre période dans le désert du Maroc, où vous avez vécu avec le père de votre fils, un sultan que vous avez quitté pour un acteur qui vous a lui-même abandonnée pour une aviatrice australienne, lorsqu’il s’est passionné pour le pilotage.
    - Je vous ai raconté tout ça ? J’ai l’impression de m’être un peu embrouillée dans la dernière partie. C’était moi la passionnée de pilotage. J’ai passé la licence pendant les périodes où Sean était en tournage. J’ai rencontré Maryse Bastié, avec qui je suis devenue très amie. On ne s’est pas quittées jusqu’au terrible drame du meeting aérien de Bron. De parler d’elle, j’ai les larmes aux yeux.
    - Je suis désolée, je ne voudrais pas raviver trop de mauvais souvenirs.
    - Ce n’est rien. J’aime bien raconter. Même si cela peut parfois être douloureux. Entre Sean et moi, l’amour fou n’a pas duré longtemps. Son côté cavaleur m’a rapidement exaspérée. Il faut dire que nous vivions au rythme de nombreuses soirées, au cours desquelles nous faisions de multiples rencontres. Sean ne savait pas résister aux avances de jolies groupies. C’est à cette époque que j’ai rencontré quelques jeunes gens qui allaient écrire une page importante de l’histoire de la musique. Mick, le chanteur, a succombé à mes charmes, et ne m’a pas laissée indifférente.
    - Mick ? Jagger ?
    - Évidemment, le seul, l’unique.
    Marie en resta comme deux ronds de flan. L’histoire de Madeleine prenait d’un coup une autre dimension. Une aventure amoureuse avec Mick Jagger ! Soit la petite dame avait eu une vie hors du commun, soit son imagination ne connaissait aucune limite ni barrière.
    - J’avoue que c’est ma période préférée. Tous ces artistes qui venaient à la maison. Le son omniprésent des guitares, l’alcool coulant à flot, la fumée odorante et envahissante des cigarettes. Je me souviens surtout de Jimi, un noir américain, qui a connu la gloire et une fin tragique. Une étoile filante, qui m’a fait beaucoup pleurer en s’éteignant. Il y avait également Eric, une voix en or.
    - Eric Clapton ?
    - Non. Eric Burdon.
    Mado se mit à fredonner : « There is a house in New Orleans, They call the Rising Sun... ».
    Marie dut faire appel à ses souvenirs d’une époque musicale peu connue de sa génération. Eric Burdon : le chanteur du groupe « The animals ». La chanson :  House of the rising sun, devenue Le pénitencier de Johnny Hallyday, ce que fit remarquer la jeune femme à son aînée.
    - Le petit Jean-Philippe, un brave garçon, et quel coffre ! Je ne l’ai pas souvent croisé.
    La fille et la petite-fille de Mado les rejoignirent comme la veille, pour signifier à la mamie qu’il était temps de rentrer à la maison.
    - Est-ce que je peux rester un peu avec Marie ? demanda la gamine.
    - D’accord, le temps que je fasse un tour du parc avec maman, si cela ne dérange pas Marie, bien sûr.
    - Non non, ne vous en faites pas.
    L’enfant attendit que les adultes ne soient plus à portée de voix, pour sortir d’un sac une jolie boîte en marqueterie, qu’elle tendit à sa nouvelle amie.
    - Regarde ! C’est ma boîte à trésors. Il y a des choses que m’a données Mamie, en me faisant promettre de ne pas les montrer à maman. Tu me la rendras plus tard. Tu sais, ma mamie... elle a un petit problème dans la tête. Elle oublie ou mélange les choses. Zézémère ça s’appelle.
    - Tu as surtout une bien gentille grand-mère, qui raconte de belles histoires.
    - Allez ma puce, on y va. Mamie est fatiguée. Dis au revoir à Marie.
    - Au revoir Marie. Moi c’est Camille. J’aurais d’autres choses à te montrer, ajouta tout bas la petite fille, d’un air mutin assorti d’un énorme clin d’œil.
    Madeleine fit un sourire à la jeune femme en lui souhaitant une bonne soirée.
    - J’espère vous revoir. Je ne vous ai toujours pas parlé de mon bel explorateur perdu sur la banquise. Je ne sais pas pourquoi j’oublie tout le temps.
    Peut-être pour être certaine que je sois bien au rendez-vous, se dit Marie, avant de se reprocher de prêter une intention aussi malicieuse à la petite dame aux cheveux gris.
    Marie décida d’ouvrir la boîte à trésors sans tarder. Elle contenait quelques photos. Sur la plupart, elle reconnut Camille, sa mère, Madeleine, et un homme qui devait être le père de l’enfant.
    Puis son regard s’arrêta sur un cliché. Le photographe avait saisi l’instant où un couple de trapézistes saluait son public du haut d’un chapiteau de cirque. Une jeune femme toute menue dont la beauté irradiait, et un athlète aux muscles impressionnants. Au dos, une date, et ces quelques mots : « Avec Paulo, partenaire et complice ». Une autre représentait une femme posant devant un petit avion de tourisme. Au fond de la boîte, un médiator signé par un illustre rocker.
    Marie savait, bien que ne travaillant pas le samedi, qu'elle serait à l’heure le lendemain pour retrouver Madeleine sur son banc.
    mfrance le 06 novembre 2020
    Moi aussi, je serai sur le banc. Merci JML 38
    mfrance le 06 novembre 2020
    Et sans oublier    LesLivresdeFlo  pour son émouvante histoire
    cyrilmusique1 le 06 novembre 2020
    Bonjour, chers lect'amis!

    C'est Cyril Van Eeckhoutte  !

    Abonnez-vous à mon profil sur Babelio.com! (Enfin si je puis m'exprimer ainsi.) ;-)

    Je vous souhaite de passer un très beau weekend!

    Bien cordialement, 

    Cyril VAN EECKHOUTTE
    cyrilmusique1 le 06 novembre 2020
    Rien ne vous empêche de lui faire de la lèche! 

    Le livre de Cyril Van Eeckhoutte, dont le titre est : "Les esprits de la famille Prédit" est en promotion "Livre gratuit" jusqu'au dimanche 8 novembre 2020!

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    Les esprits de la famille Prédit  

    Je vous baise bien fort! 

    Cyril Van Eeckhoutte   Cyril Van Eeckhoutte
    Sflagg le 06 novembre 2020
    Salut !

    Déjà de très jolis textes, et beaucoup de poèmes. Voici le mien, bonne lecture !


    Sur un banc               (06/11/20)
                                                                                                      
    28 jours que j'suis là
    28 jours que j'suis las.
    Oui, voilà presque un mois
    Que j'suis seul avec moi,
    Au milieu de ce désert maritime ;
    On ne peut pas faire plus intime.
    Je me retrouve au ban de la société,
    Complètement abandonné.
    J'suis seul entouré de bancs de poissons,
    Et cette solitude me ronge comme du poison.
    Seul sur ce banc de sable
    Qui, comme mon mental, est instable.
    Autour de moi, il n'y a rien sauf un banc.
    Un banc de jardin public peint en blanc.
    Comme c'est étrange !
    M'y assoir dessus me démange,
    Mais en même temps, ça présence me dérange.
    Comme c'est étrange !
    J'ai peur et me pose beaucoup de questions
    Auxquels, pour y répondre, je n'entrevois qu'une solution :
    M'y installer dessus.
    Et en le faisant, je sue,
    Je transpire, je tremble.
    Tout ce qui m'entoure aussi tremble.
    Puis d'un coup je me réveille
    Autour de moi plus rien n'est pareil,
    Mais en même temps si semblable
    À ce qui m'entourait sur le banc de sable.
    Surtout le banc où j'suis assis.
    Ce banc où depuis 28 jours je vis.
    Depuis que j'ai tout perdu
    Et me suis retrouvé à la rue.

    S.Flagg !!

    Bonne chance à tous !!
    glegat le 06 novembre 2020

    Le banc de pierre
    première partie

    (Hymne aux livres et à la lecture)

    Lorsque Félix décacheta l’enveloppe qui lui avait été remise par le notaire, le rédacteur de cette missive, son oncle, le professeur Octave Janus, était décédé depuis quelques semaines.

    Félix s’installa dans son fauteuil et commença à lire. Il reconnut aussitôt, avec émotion, la fine et élégante écriture de son plus proche parent :

    « Mon cher Neveu,

    Nous sommes le 21 juin 2019, dix ans se sont écoulés depuis les événements qui ont bouleversé ma vie. Me voici vieux et malade, je crois qu’il est temps pour moi de transmettre le secret que j’ai préservé si longtemps.

    C’est à toi, Félix que je dois cette confession. Je ne négligerai aucun détail, si insignifiant qu’il puisse paraître, tu sauras sans doute y trouver des indices qui t’aideront à résoudre cette énigme. Je garde un souvenir très précis de cette aventure, car j’ai eu maintes fois l’occasion d’y repenser. Voici comment tout a commencé.

    J’empruntais souvent à la même heure, la petite allée bordée de géraniums du parc Robinson, pour y retrouver mon lieu de lecture préféré ; un banc de pierre posé à l’ombre d’un tilleul géant. En ce début d’été, le parfum très marqué de cet arbre majestueux guidait mes pas. J’étais parfois accompagné par quelques abeilles attirées par les fleurs mellifères de mon hôte bienveillant. Le parc était situé à quelques centaines de mètres du Lycée Champollion. Dans cette illustre institution, j’enseignais depuis plus de trente ans, l’histoire et la littérature aux élèves des classes supérieures. Éternellement vêtu de mon costume beige, d’un chapeau léger et portant sous le bras la gazette du jour, et à la main un cartable en cuir contenant quelques livres, je marchais d’un pas serein vers ma destination. Je reproduisais ainsi un scénario qui se déroulait au quotidien avec une régularité et une ponctualité sans faille. Une sonnerie marquait la fin de mon dernier cours de la journée et déclenchait un rituel qui se répétait avec la précision d’un mécanisme d’horlogerie. Après avoir libéré mes élèves et rangé mes affaires, je sortais de l’établissement par un lacis de couloirs et d’escaliers pour me retrouver enfin sur le chemin du parc. Je me sentais délivré d’une pesante contrainte. Non pas que je détestais mon métier ou mes élèves, mais à la longue, je commençais à éprouver une certaine lassitude. Je ressentais le besoin de me ressourcer et de me détendre. C’est la lecture qui me permettait, depuis toujours, de retrouver mon équilibre. Chaque fin d’après-midi donc, lorsque le temps s’y prêtait, je me rendais au parc. L’hiver, c’est à la bibliothèque du quartier que je me réfugiais. Je respectais comme un cérémonial l’horaire et le trajet. Les voisins, les habitués des lieux et les observateurs attentifs, étaient, par ma présence et en toute saison, informés de l’heure et rassurés sur la bonne marche du monde en constatant que rien ne dérogeait à l’ordre des choses. Tout autour de moi reflétait l’image de l’immutabilité de l’univers.

    Arrivé à destination, je m’installais comme à mon habitude à l’extrémité du banc, autant pour laisser la place à un autre promeneur que pour profiter des rayons de soleil qui à cet endroit précis, parvenaient à se frayer un passage à travers le tissu dense de la frondaison.

    Toute la journée, le soleil avait réchauffé les feuilles des géraniums, libérant ainsi leur timide odeur d’orange. Devant moi déambulaient quelques promeneurs nonchalants. Un peu plus loin, dans un espace aménagé, un enfant faisait couler du sable entre ses doigts. Cette ambiance calme et reposante était propice à la lecture.
    Je commençais par lire les nouvelles, après quoi, je me plongeais dans un roman ou une étude historique. J’avais ce jour-là emporté un roman de Jules Verne, « Voyage au centre de la Terre ». Je relisais avec plaisir ce livre qui m’avait laissé une si forte empreinte dans ma jeunesse. Je retrouvais avec la même acuité mes impressions d’alors. Après une heure de lecture, je sentis peser sur moi la touffeur de l’été. J’éprouvais une curieuse sensation, comme si le monde qui m’entourait se diluait dans un brouillard saturé de vapeur. Je fus soudain projeté à mille lieues du parc, au fond d’un vieux volcan islandais, plongé dans les entrailles de la Terre, seul et exténué par une longue descente, accablé par la chaleur. Mes perceptions étaient bien réelles, mais j’ignorais quel sortilège m’avait précipité dans cet univers. J’étais partagé entre la crainte de ne pas pouvoir sortir de ce monde étrange et l’invincible curiosité de découvrir où cette aventure allait me conduire. Au sortir d’une galerie se révéla ce qui semblait être l’entrée d’une cathédrale ou d’un palais, à en juger par la taille de la porte. Après avoir à grand-peine ouvert l’un des battants, je pénétrais à l’intérieur d’un édifice inconnu. Je m’attendais à y trouver Otto Lidenbrock et son neveu Axel, les deux héros du roman de Jules Verne, mais les lieux étaient seulement peuplés de livres. Une quantité infinie d’ouvrages s’étalaient devant mes yeux ébahis. Une lumière miraculeuse surgissait de nulle part et caressait les reliures aux reflets bigarrés.

    Je m’imaginais à l’intérieur d’un immense navire dont la coque aurait été retournée. Des poutres de chêne taillées en courbe convergeaient vers le sommet et formaient ainsi comme une gigantesque épine dorsale de baleine. Des étagères remplies de volumes serrés en masses compactes et colorées couvraient les murs. Un premier niveau montait jusqu’à environ quatre mètres, il était surmonté par une plateforme offrant l’accès à un deuxième palier d’une hauteur équivalente. À intervalles réguliers, on accédait à des passerelles suspendues permettant de passer d’un côté à l’autre sans avoir besoin de redescendre. L’ensemble composait un réseau complexe de passages dont l’origine et le point d’arrivée étaient les livres. Au-dessus des dernières étagères, le mur s’arrondissait et formait une voûte dont la vue donnait le vertige. Partout, des échelles coulissantes autorisaient l’accès au moindre recoin. Cette cathédrale de livres n’avait pas été édifiée en hommage à une divinité quelconque, mais dans le but de répondre aux appétits de lecture d’une légion d’érudits. Dans le ventre de ce géant, je me sentais comme Jonas entraîné par un océan de livres dans les profondeurs abyssales de l’imaginaire ou comme une sorte de Noé bibliothécaire qui aurait construit son arche pour sauvegarder la mémoire de l’humanité. Le monde qui s’ouvrait devant moi n’était pas moins magique que celui d’Alice au pays des merveilles. Peut-être étais-je tout simplement au paradis des lecteurs. Je m’approchais des rangées de livres et en pris un au hasard, c’était un roman de Jules Verne, « Le testament d’un excentrique ». L’ouvrage était neuf et semblait tout droit sorti des presses, il s’agissait d’une édition récente de petit format. Je l’ouvris et lu le début du premier chapitre, puis je mis machinalement l’ouvrage dans ma poche. À cet instant, mon attention fut détournée par le tic-tac d’une pendule qui sonna au moment où j’en découvrais les contours. Par la force d’un enchantement, je me retrouvais subitement transporté sur le banc du parc.

    C’est le tintement de l’angélus du soir qui m’avait réveillé. Ce rêve était si prégnant que j’eus beaucoup de mal à m’en extraire et c’est la réalité elle-même, avec laquelle je reprenais peu à peu contact, qui me sembla onirique.
    Ce rêve m’obséda une grande partie de la journée du lendemain. Les occasions de détourner ma pensée de ce souvenir ne manquaient pas, pourtant j’y revenais sans cesse. Les images et les sensations qui m’avaient impressionné paraissaient correspondre à des faits concrets. Tout ceci était très troublant.

    Je ne distinguais aucune différence entre ce rêve et les perceptions du réel. J’en venais à me demander si le monde que je voyais n’était pas juste une illusion, et si, malgré l’extravagance de la situation, ce que j’avais cru être un songe était en fait la réalité, un peu comme dans la parabole du chinois qui rêve qu’il est un papillon, et se réveillant, se demande s’il n’est pas plutôt un papillon qui rêve qu’il est un homme. Il me fallut beaucoup d’efforts de raisonnement pour mettre un terme à cette confusion. J’attribuais mon trouble au phénomène des rêves lucides qui confèrent au dormeur la capacité de garder le contrôle de ses actions durant son sommeil. J’étais à ce point perturbé que je n’avais pas remarqué le fait le plus inexplicable de toute cette histoire. Dans la poche droite de mon veston se trouvait le livre que j’avais consulté dans cette bibliothèque chimérique. Je me souvenais même avec précision des premiers mots du texte, je pus le vérifier facilement, ceci était d’autant plus extraordinaire que jusqu’alors je n’avais jamais entendu parler de ce roman. Ma stupeur fut telle que, contrairement à mes habitudes, je décidais de rentrer directement chez moi à l’issue de mes cours.

    à suivre...
    glegat le 06 novembre 2020
    Le banc de pierre suite et fin

    Quelques jours passèrent qui me permirent de retrouver une certaine sérénité. J’hésitais sur la conduite à adopter. En parler autour de moi ? Mais qui pourrait me croire ? N’étais-je pas tout simplement victime d’une sorte de mirage ? Finalement, c’est ma curiosité qui l’emporta, je pris la décision de renouveler l’expérience. Pour en avoir le cœur net, je me rendis au même endroit avec le livre que je lisais la première fois. Tout se déroula selon le même scénario, à une différence près, mon rêve me transporta dans la bibliothèque du congrès à Washington. Je revins de mon périple avec quelques bouquins. Les jours qui suivirent se déroulèrent à l’identique. Je maîtrisais de mieux en mieux le phénomène qui se reproduisait, quel que soit le livre qui me servait de véhicule. Je pus ainsi explorer les bibliothèques du monde entier, qu’elles soient réelles, imaginaires, antiques ou modernes.

    J’ai visité des lieux célèbres, comme la librairie Larousse dans les années 1870, j’ai consulté dans leur berceau des ouvrages parés de l’éclat de leur jeunesse, publications devenues introuvables. Au temps des Ptolomées j’ai fait la connaissance de Callimaque, le conservateur de la bibliothèque d’Alexandrie. J’ai observé Pierre Larousse au travail et avant lui, Émile Littré, Diderot, d’Alembert. J’ai assisté à des lectures publiques de Charles Dickens, parcouru le Grand Nord avec Jack London, navigué avec Josef Conrad, fumé le narguilé avec Pierre Loti, rencontré Balzac au château de Saché, canoté avec Maupassant. Tolstoï, Gogol et Dostoïevski m’ont plongé dans le mysticisme. J’ai connu l’exil avec Victor Hugo et visité le pays de Baudelaire, là, où tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté. Dans ces mondes à la frontière du réel et de l’imaginaire le temps semblait suspendu, chaque seconde s’écoulait comme un instant d’éternité.

    C’est ainsi, mon cher Félix, que j’ai pu composer cette collection d’ouvrages que tu aimais tant consulter lors de tes visites. Aujourd’hui, ma bibliothèque t’appartient, je sais que tu en prendras soin. Elle te fera vagabonder comme moi, dans l’espace et dans le temps mieux que n’importe quelle machine. Peut-être même, que tu pourras explorer le futur ou des univers parallèles, le prudent voyageur que je suis s’est contenté de rester dans des limites raisonnables. Il me semble que l’imaginaire de chacun peut ouvrir des perspectives différentes. Je n’ai parlé à personne de tout ceci, tu es le nouveau dépositaire de ce secret, libre à toi de le divulguer. Mais peut-être qu’un tel prodige n’est pas reproductible à l’infini et qu’il ne peut pas s’appliquer à tout le monde. Le billet de transport pour ce voyage insolite se paye sans doute en grains de folie. Et si quelqu’un t’annonce que, profitant de mon sommeil, un enchanteur a fait disparaître ma bibliothèque, n’en croit rien, il n’y a que le naïf Don Quichotte pour souscrire à une pareille fable.
    Ton oncle affectionné,
    Octave. »

                                                                              ***

    Après la lecture de cette singulière épître, Félix resta un long moment perplexe. Son regard se porta vers la fenêtre d’où il pouvait apercevoir le parc Robinson. La journée s’annonçait ensoleillée et pleine d’imprévus. Sous le grand tilleul, le banc de pierre était libre pour accueillir un nouveau lecteur.

    Fin
    AelitaPrives le 06 novembre 2020
    "Aie !"
    Je ressentie une douleur au niveau de mon épaule.
    Par réflexe, mon regard de dirigea vers celle-ci. Un petit insecte assez étrange ; mi-coccinnelle, mi-abeille, se trouvait à cheval sur la bretelle de mon débardeur et ma peau nue.
    "Qu'est ce qu'il se passe maman ? Tu t'es fait mal ?
    - Rien mon amour, juste une petite piqûre d'insecte, tu peux retourner jouer." dis-je en balayant de ma main la petite créature.
    Mon fils me sourit, m'embrassa de toutes ses forces, et retourna jouer en rigolant.
    IIl adorait nos sorties au parc. Étant fils unique, c'était le moment où il pouvait se défouler en jouant avec d'autres enfants hors de l'école. Il arrivait toujours à se faire de nouveau copain.
    Il a fallu que je me fasse attaquer par une petite bête pour qu'il vienne m'adresser la parole. Lors de nos sorties, seul ses copains comptaient d'habitude. Maman était juste là pour rester sagement sur le banc à surveiller sa petite tête blonde.
    Je n'étais pas jalouse, seulement un peu possessive c'est vrai. Puis c'est surtout que passer deux heures sur un banc à les regarder jouer n'était pas la chose que je préférais faire. Quoique dès que je le voyais sourire, je changeais vite d'avis.
    "Aller bouge toi, sinon tu vas t'endormir.
    - Pardon ? Mais.. Qui a parlé ?
    - C'est moi, la coccibeille. Tu me vois pas ?
    - La quoi ?
    - Non on va pas jouer à ça pendant des heures. Au lieu de te plaindre que t'es là sur ton banc. Bouge, fais quelque chose, ça ne sert à rien de rester là à bougonner.
    - Mais depuis quand les insectes parlent ? Qu'est ce qu'il se passe ?
    - Depuis que je t'ai piqué. D'ailleurs j'espère que je ne t'ai pas trop fait mal.
    - Non ça va mais..
    - Pas de mais ! Tu comptes rester deux heures à attendre en angoissant comme d'habitude ou tu comptes faire quelque chose ?
    - Mais j'angoisse pas..
    - Non à peine. Aller arrête de me raconter des salades.HHumm tiens de la salade ça me donne faim.. Pardon je m'égare. Alors t'as réfléchis à ce que tu pourrais faire ?
    - Je n'ai pas d'ordre à recevoir d'une coccimachin, et qui parle en plus.
    - Oui enfin la coccibeille, et non coccimachin, elle souffre pas de crises d'angoisse elle.
    - Non OK coccobidulle. Qu'est ce que tu me veux ?
    - T'aider,  c'est tout. Je sais que t'angoisse seule sur ton banc, peur de t'endormir à force de ne rien faire, et peur que l'on t'enlève ton enfant si tu tourne le regard 1 minute."
    Une larme roula sur ma joue. Comment ce coccichouette connaissait tout ça ? Je n'en n'avais jamais parlé à personne.
    " C'est bon t'as fini ? T'as une idée peut être madame je sais tout ?
    -Et si tu passais la première heure a jouer avec les enfants ? Tu pourrais leur faire des activités, leur apprendre la langue des signes par exemple, de manière ludique.
    Ils seraient heureux et toi aussi. Comme ça tu aurais un œil sur ton fils tout en faisant une bonne action et en passant un bon moment. Et la deuxième heure, tu pourrais les regarder et t'émerveiller de voir qu'ils utiliseront ce que tu leur a appris dans leur jeux. "
    -Mais c'est sup.."
    Je reçu un nouveau choc. Ce coup ci ce n'était pas une piqûre. C'était quelque chose de plus agréable.
    "Maman, maman, réveille toi. Papa part au boulot, c'est bientôt l'heure d'aller au parc retrouver mes copains !!"
    Mon petit amour venait de me réveiller en me sautant dessus en me faisant un gros câlin.
    Je venais de rêver ? C'était vraiment étrange... Mes angoisses me suivaient même les yeux fermés..
    " D'accord mon amour. Dis moi, ça te dirais que je te prépare une activité sur les couleurs avec tes copains ? Après vous ferez un goûter tous ensemble, et tu joueras avec eux à ce que tu veux après ?
    - Ouiiii t'es la meilleure des mamans !!! Robin va être trop content ! Il fait un jeu des couleurs avec sa maman aussi à la maison. "

    Lorsque quelque chose vous tracasse, ne vous renfermez pas sur vous même. Que ce soit sur un banc, dans un lit, fermez les yeux, soufflez, et vous trouverez une solution.
    Darkhorse le 07 novembre 2020
    Joli glegat , ça me donne envie de m'évader avec Jules Verne. Comme ton personnage, son empreinte a été très forte dans ma jeunesse et il faut que je relise certains de ces romans.

    J'aime beaucoup ce poème, Sflagg . Il est bien construit et dénote par rapport aux autres je trouve.
    Sflagg le 07 novembre 2020
    Salut !

    Merci Darkhorse ! J'avoue que ça m'est venu au fur et à mesure que je l'écrivais. Au départ je voulais faire un blague en remplaçant le banc pour s'assoir par le banc de sable, mais à un moment j'ai dévié, ne voyant pas trop où aller, et suis revenu sur le banc pour s'assoir. La fin avec l'histoire du gars à la rue, elle est venue en relisant le reste, j'ai trouvé que ça faisait un bon parallèle entre les deux, le naufragé seul sur le banc de sable et le clochard  seul aussi sur le banc du parc.

    A+ !!
    faracha33 le 07 novembre 2020
    Sflagg   Bravo pour ce poeme
    OSOLEMIO le 08 novembre 2020
    Comme d'habitude : un beau poème de S.Flagg et, déja des récits intéressants...

    A plus pour lire d'autres aventures sur un banc
    Sflagg le 08 novembre 2020
    Salut !

    Merci faracha33 et OSOLEMIO.

    Sur le même thème, j'en avais déjà mis un sur le défi "Se jouer du temps" de mai 2019 . je le remets ici, pour ceux qui ne l'ont pas lu et seraient curieux :


    Entre deux bancs. (31/10/06)

    Être un petit vieux sur un banc
    Qui regarde passer les gens
    Qui ne regardent même pas les vieux qui les regardent passer
    C’est attristant, c’est désolant
    D’être un petit vieux sur un banc
    C’est désolant, c’est attristant
    D’être obligé de rester là à regarder s’écouler le temps.

    Être un petit jeune sur un banc
    Qui regarde passer les grands
    Qui regardent d’un œil craintif ces jeunes qui les regardent passer
    C’est désolant, c’est attristant
    D’être un petit jeune sur un banc
    C’est attristant, c’est désolant
    D’être obligé de rester là à regarder passer le temps.

    La vieillesse sur un banc et la jeunesse sur celui d’en face
    Regardent ensemble l’age mûr qui au milieu passe
    L’un est à mille bornes en amont
    L’autre a mille lieux en aval
    Mais tous deux la regardent avec un mélange d’envie et de répugnance,
    Mais, alors pourquoi y a-t-il entre eux autant de méfiance?

    Car enfin, être un petit vieux sur un banc
    Qui regarde passer les gens
    Qui ne regardent même pas les vieux qui les regardent passer
    Ce n’est pas si différent qu’être un petit jeune sur un banc
    Qui regarde passer les grands
    Qui regardent d’un œil craintif ces jeunes qui les regardent passer
    Oui ! c’est aussi attristant, aussi désolant
    D’être un petit vieux sur un banc
    Que d’être un petit jeune sur un banc
    Oui ! c’est aussi désolant, aussi attristant
    D’être un petit jeune sur un banc
    Que d’être un petit vieux sur un banc
    Surtout quand on sait que l’homme mûr ne trouve point cela inquiétant
    Lui, qui pourtant, ne fait que passer de l’un à l’autre en peu de temps.

    S.Flagg !!

    A+ !!

    mfrance le 08 novembre 2020
    Bravo Sflagg pour ces deux poèmes qui tranchent totalement sur les autres.
    (décidément ce banc inspire les poètes !)
    J'ai beaucoup apprécié le premier, particulièrement poignant que l'on pourrait qualifier de poème social !
    OSOLEMIO le 08 novembre 2020
    Bravo S.Flagg :

    Il est super ton poème de Mai ! Tout est dit et j'aurais aimé faire le même !

    Tu as bien fait de le poster à nouveau : j'aime ce banc bien rythmé qui pourrait être mis en musique !
    JML38 le 08 novembre 2020
    Comme OSOLEMIO j'aime bien le rythme du poème de Sflagg.
    Il ne manque effectivement que la musique.
    Sflagg le 08 novembre 2020
    Merci à vous trois !

    Pour la musique, j'aimerais bien, mais hélas je ne sais pas composer.
    Evysev le 08 novembre 2020
    LesLivresdeFlo  ton texte est très touchant, bravo. Et bravo à tous pour ces jolis moments de lecture.
    mfrance le 09 novembre 2020
    En attente.

    Il en avait vraiment assez de ce banc, qui était laid et surtout inconfortable. Son dos le faisait atrocement souffrir et bien entendu c'était la faute de ce dossier trop dur et bien mal conçu.
    Mais comment donc pouvait-on construire des machins pareils ? sinon pour emmerder l'utilisateur.

    S'il s'y appuyait, il avait les vertèbres écrasées. Mais s'il se penchait en avant, son abdomen rebondi se retrouvait comprimé par ses énormes cuisses. Ce n'était pas mieux. Alors il passait son temps à se tortiller sans jamais trouver de position à peu près supportable. C'était exaspérant !
    Tout de même, ils auraient pu prévoir un siège un peu plus confortable, d'autant qu'il était obligé de s'y asseoir souvent et surtout d'y passer une bonne partie de la journée. Mais, il ne faut pas attendre grand chose de bon de l'administration, pas vrai ?

    Et il en avait vraiment assez d'être là, où il lui fallait faire semblant d'écouter ce qui se disait, ce dont il n'avait rien, mais alors plus rien à foutre ! voilà longtemps que pour lui, tout était joué. Il le savait, il le savait depuis ce soir, ce soir pas si lointain en fait, où tout avait dérapé.
    Et comment cela avait-il pu se produire ? Voilà des semaines qu'il tournait et retournait la chose au fond de sa tête pour mettre le doigt exactement, mais alors vraiment très exactement sur le petit incident, ce très court moment déclencheur de la catastrophe.

    Notre mémoire ne retient pas le quotidien et la vie s'écoule de jour en jour, sans incident notable en règle générale, calme et tranquille, en fait non, pas si calme et tranquille, mais au bout du compte, on en garde quoi ? les mariages, naissances et morts autour de nous. Aussi, il faut créer l'exceptionnel pour avoir d'impérissables souvenirs. Et alors là, bravo, pour le coup, l'exceptionnel, il avait vraiment su le créer !

    Il soupira et contrairement à l'habitude, regarda autour de lui. Oui, il y avait foule ce jour-là. Normal, on arrivait au bout de cette mascarade et cette journée était cruciale, pour lui bien entendu. Pour toute cette foule curieuse, assemblée pour la curée, c'était simplement la fin du divertissement et ils attendaient le feu d'artifice.

    Il ricana. Stupéfiant que tous ces gens n'aient pas de meilleure occupation, que de venir ici, à le regarder, lui, comme une bête curieuse, ou un monstre, ou une erreur de la nature, ou encore pour certains comme la victime d'une société déboussolée !
    Tu parles d'une connerie !
    Il changea de position sur ce foutu banc. Mais c'était toujours aussi pénible.
    Il avait le dos moulu et les fesses douloureuses. Etait-ce fait exprès ?
    Est-ce que cette humiliation faisait partie de la punition ?

    Tiens, ce type là-bas, il était venu tous les jours et ce n'était pas un journaleux, ça c'est sûr, pas de calepin, ni de crayon, pas d'ordi non plus. Non, un simple observateur, un simple d'esprit plutôt, vu sa tronche de crétin. Pffff ! Il restait là, à le contempler, lui, comme s'il était tombé de la lune, à attendre quoi ? que l'on se paye sa tête ? Pauvre type,va !
    Par contre, lui se ferait bien la sienne !
    Il se sentait devenir violent ... comme il l'avait été avec sa femme, ce soir-là !

    Oui, il était très énervé, la faute à la Ginette, bien sûr, avec qui il s'était sévèrement engueulé, une fois de plus et pour une connerie bien entendu. C'était quoi déjà la connerie du jour ? il ne s'en souvenait même plus. Ah si... voilà, il avait oublié le pain ! c'était pour le pain qu'elle lui avait fait un pataquès, cette conne. Et son pain elle l'avait eu et pas qu'un peu. En plein dans la tronche qu'il lui en avait mis un, oh, pas très fort, il savait retenir ses coups, mais pour le coup elle avait de quoi gueuler !





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