L'historien ne cille pas. Recevant les privilèges que lui donne le Texte, il fabrique une Histoire conforme à une politique du pouvoir et à un discours de domination qui perdure jusqu'à ruiner notre présent et compromettre l'avenir de nos enfants. L'échec de notre dit printemps arabe lève le voile sur une guerre sans merci contre les femmes. Comme si l'amour de la liberté et de la dignité devenait un combat contre l'amour et la dignité, combat pour la pérennité d'une société bâtie sur une structure tribale, archaïque, refusant ne serait-ce que l'ombre d'une égalité des droits.
On dit que le prophète se maria avec Hafsa par amitié pour ‘Umar, son meilleur conseiller après Abû Bakr. Elle devint la femme de Muhammad et l’une des Mères des croyants.
La femme à la beauté ensorcelante fit œuvre de pénitence. Elle s’interdira l’argent donné par ‘Umar et l’offrira aux pauvres, comme elle refusera d’aller en pèlerinage après la mort du prophète.
Une femme condamnée par les frappes du destin à goûter, si jeune, à la douleur du veuvage, à se voir refusée par les hommes que tu sollicitais et à être prise par le prophète non pour moi-même, mais pour consolider ses liens avec toi. Être la femme du prophète est certes un honneur. Cependant, cet honneur devait être partagé avec d’autres femmes toujours élues pour leur beauté. Maria était une fleur à peine sortie de son bourgeon.
Père ! Être ta fille devait être source de fierté. Mais tes paroles sont aussi foudroyantes que ton épée : “Ô fille ! N’imite pas celle qui a les faveurs du Messager de Dieu. Je sais qu’il ne t’aime pas. Et il te garde auprès de lui seulement par égard pour moi. Si je n’étais pas ton père, il t’aurait répudiée”, ne cesses-tu de me répéter. Pauvre de moi ! Ni tendresse de l’époux, ni l’amour du père. Je suis la fille d’un homme qui ne supporte ni la voix des femmes ni leur présence. Combien de fois a-t-il essayé de s’immiscer dans la vie de notre vie au sein du harem. Il fallait tout le courage d’Oum Salama pour lui rappeler que les épouses du prophète n’étaient nullement sous son autorité à lui.
« Ils étaient ma famille. Certes, ils faisaient partie des mécréants. Néanmoins, ils étaient ma famille. Certes, ils ont combattu le prophète de Dieu. Mais, ils étaient ma famille, ma chair et mon propre sang. Je venais de perdre mon père et mon oncle. Mon père ! Quelle que fût ma nouvelle foi, il restait mon père. Je ne pouvais renier cette filiation ni l’amour qui nous unissait. Mon amour de fille me tiraillait. Être l’épouse de celui dont la cause perdit mon père et mon clan n’était guère facile. Quelle honte et quelle douleur ! En moi, le déchirement de la fille, de la nièce, de la cousine devant ces hommes morts ou enchaînés. Devais-je me réjouir du triomphe de mon époux ou pleurer la perte des miens ? Devant le spectacle des cousins enchaînés, toute la douleur sourdait condensée. Que n’ai-je rêvé de voir les miens se convertir à la nouvelle religion !
Le nouveau prophète affrontera hostilités, injures et maltraitance. Les Quraïshites mettront des épines sur son passage. Et l’épouse aimante chargera ses esclaves de veiller sur lui et d’assurer sa protection.