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Critique de ATOS


« La foule se leva comme un seul homme », ainsi s'ouvre le roman magnifique de Jorge Amado. Au moment où Antonio Balduino combat sur le ring.
Bahia, Bahia de tous les saints. le Brésil. Un continent.
Albert Camus ((Alger Républicain, 9 avril 1939) , écrivait à propos de ce ivre :
« Un livre magnifique et étourdissant. S'il est vrai que le roman est avant tout action, celui-ci est un modèle du genre. Et l'on y lit clairement ce que peut avoir de fécond une certaine barbarie librement consentie. Il peut être instructif de lire Bahia de Tous les Saints en même temps, par exemple, que le dernier roman de Giraudoux, Choix des Elus. Car ce dernier figure assez exactement une certaine tradition de notre littérature actuelle, qui s'est spécialisée dans le genre "produit supérieur de la civilisation". A cet égard, la comparaison avec Amado est décisive.
 
Peu de livres s'éloignent autant des jeux gratuits de l'intelligence. J'y vois au contraire une utilisation émouvante des thèmes feuilletonesques, un abandon à la vie dans ce qu'elle a d'excessif et de démesuré. de même que la nature ne craint pas, à l'occasion, le genre "carte postale", de même les situations humaines sont souvent conventionnelles. Et une situation conventionnelle bien sentie, c'est le propre des grandes oeuvres. Dans une grande capitale ouverte sur la mer, Antonio Balduino, nègre, pauvre et illettré fait l'expérience de la liberté. Eprouver la liberté, c'est d'abord se révolter. le sujet du roman, s'il en a un, c'est le lutte contre les servitudes d'un nègre, d'un miséreux et d'un illettré, et cette exigence de liberté qu'il sent en lui. C'est la quête passionnée d'un être élémentaire à la recherche d'une révolte authentique.
 
C'est une révolte qui fait du nègre un boxeur, et un boxeur triomphant. C'est une révolte qui pousse le misérable à refuser tout travail organisé et à vivre splendidement dans les joies de la chair. Boire, danser, aimer des mulâtresses, le soir, devant la mer, autant de richesses inaliénables, conquises à force de virilité. Et c'est encore une révolte, mais celle-là plus subtile et née dans le profond du coeur qui pousse le nègre ignorant à chanter sur sa guitare et à composer d'étonnantes chansons populaires.
 
Mais toutes ces révoltes mêlées ne font pas une âme confiante. Si Antonio Balduino vit de toutes ses forces, il n'en est pas pour autant satisfait. Qu'une grève arrive, il se jettera tout entier dans le mouvement. Et il reconnaît alors que la seule révolte valable et la seule satisfaisante, c'est la révolution. C'est du moins la conclusion de l'auteur. Je ne sais pas si elle est vraie, mais ce qui est psychologiquement vrai, c'est que le héros d'Amado rencontre alors le sens d'une fraternité qui le délivre de la solitude. Et il est dans la nature de cet être instinctif de s'en satisfaire absolument.
 
Au reste, qu'on ne s'y trompe pas. Il n'est pas question d'idéologie dans un roman où toute l'importance est donnée à la vie, c'est-à-dire à un ensemble de gestes et de cris, à une certaine ordonnance d'élans et de désirs, à un équilibre du oui et du non et à un mouvement passionné qui ne s'accompagne d'aucun commentaire. On n'y discute pas sur l'amour. On s'y suffit d'aimer et avec toute la chair. On n'y rencontre pas le mot de fraternité, mais des mains de nègres et des mains de blancs (pas beaucoup) qui se serrent. Et le livre tout entier est écrit comme une suite de cris ou de mélopées, d'avances et de retours. Rien n'y est indifférent. Tout y est émouvant. Encore une fois, les romanciers américains nous font sentir le vide et l'artifice de notre littérature romanesque.
 
Un dernier mot: Jorge Amado avait 23 ans lorsqu'il publia ce livre. Il a été expulsé du Brésil pour l'avoir vécu avant de l'avoir écrit. »

Il fallait bien que la plume de Camus croise la plume d'Amado. Leur parcours, leur pensée, leurs actes, leur vie, ont prouvé qu'un homme à lui seul pouvait contenir le monde.

Oui roman magnifique, vivant, terriblement vivant. de l'enfant qui regarde les lumières du port à l'homme qui trouve le Chemin de sa maison, c'est l'histoire d'un apprentissage , 'apprentissage d'un homme noir, pauvre, illettré qui va ouvrir très tôt les yeux sur un monde d'injustice, d'iniquité, un homme qui va face à ce qu'il va vivre, parmi ceux qu'ils va aimer, face à ce qu'ils va haïr, trouver la seule raison, la seule direction qu'il le mènera sur le chemin de sa vie.
J'ai profondément aimer rencontrer toutes ces vies, toutes ces visages de ce peuple extraordinaire de Bahia.
J'ai aimer l'odeur de la mungunsa, du Feijoada , aimé les tournois de Tirana, le côco, la samba, le Batouque., l'A B C de chaque moments de ces vies. Ni anges, n diables… pourtant l'enfer se pose sur le dos des hommes, dans le ventre des femmes, pourtant les regards se réchauffent, les coeurs raisonnent , les mains se serrent, l'amitié grandit, la mer emporte les corps, parfois elle fait de renaître les âmes.

« Ils savaient de bonheur, quel serait leur destin : grandir pour aller au port où ils courberaient le dos sous le poids de sacs de cacao ,ou bien pour gagner leur vie dans les usines énorme. Et il ne se révoltaient pas parce que depuis longtemps c'était comme ça. les enfants des belles rue plantées d'arbres seraient médecins avocats ingénieur commerçants riche et eux ils seraient les esclaves de ces hommes . C'est pour cela qu'il existe un morne avec ses habitants. Voilà ce que le petit nègre Antonio Balduino appris de bonne heure par l'exemple de ses aînés.De même que dans les maisons des riches existait une tradition remontant à l'oncle, au père ou au grand-père ingénieur, célèbre orateur à succès, politique, de même sur le morne peuplé de nègres et de mulâtre il y avait la tradition de l'esclavage sous la domination du maître blanc et riche .C'était là leur seule tradition. L'autre celle de liberté dans les forêts d'Afrique ils l'avaient déjà oubliée ,ou du moins bien peut se la rappeler , et ceux là étaient exterminés ou persécutés. Sur le morne , seul Jubiaba la conservait. Rares étaient les hommes libres du Morne : Jubiaba, Zé la Crevette et tous les deux été persécutés : l'un comme sorcier l'autre comme vaurien . Antonio Baldino appris bien des choses dans les histoires héroïques qu'ils contaient au peuple du Morne, e il oublia la tradition de servitude. Il résolut d'être du nombre des hommes libres ,de ceux qui plus tard auraient un A B C et des chansons en leur honneur, et qui serviraient d'exemple aux hommes noirs, blancs et mulâtres enlisés dans leur esclavage sans remède. C'est sur le morne de Châtre-Nègre qu'Antonio Balduino résolut de lutter. Tout ce qu'il a fait plus tard ,c'est à cause des histoires qu'il entendait les soirs de lune à la porte de sa tante. » Bahia de tous les saints.

«  En 1931, Jorge Amado se met à militer très activement au Parti Communiste, alors interdit au Brésil. Sa vie, dès lors, n'est qu'une suite d'exils, d'errances et de retours. Emprisonné une douzaine de fois, ses livres brûlés et interdits, contraint de s'exiler en Argentine en 1941, puis de retour à Bahia en 1943 lorsque le Brésil se range aux côtés des Alliés contre l'Axe, élu député communiste en 1945, de nouveau contraint de s'exiler en 1948 lorsque le Parti Communiste est ré-interdit, réfugié en France, expulsé de France et interdit de séjour pendant 16 ans, il reviendra au Brésil.. » Anthologies.
« «Je ne veux pas reposer en paix, je ne prends pas congé, je dis à bientôt, mes amis. L'heure n'est pas encore venue de reposer sous les fleurs et les discours; je sors vers le frémissement de la rue, Boris le rouge m'accompagne. Merci pour tout, je vais de l'avant, je vais me divertir, ashé.». Jorge Amado.
Je sors vers le frémissement de la rue...comme un seul homme.

Des femmes, des hommes se lèvent, sortent, se souviennent, écoutent, écrivent, transmettent.
« le Brésil est le seul pays à avoir adopté une loi qui prône l'enseignement de l'histoire et de la culture africaine, y compris l'histoire afro-brésilienne, aux cycles primaire, secondaire et pré-scolaire, a-t-on appris mercredi à Harare, au Zimbabwe, au cours d'une réunion d'experts de l'UNESCO.
[…] le projet "Brésil-Afrique: Histoires croisées" comprend la surveillance de l'application de la loi, la production et la diffusion d'informations sur l'histoire de l'Afrique et du peuple afro-brésilien et des conseils sur l'élaboration des politiques publiques.
Le projet vise à identifier les questions essentielles, les progrès et les défis concernant la mise en oeuvre de la loi, à collaborer à l'élaboration de stratégies pour la réalisation de politiques publiques en conséquence, ainsi qu'à systématiser, produire et diffuser des connaissances sur l'histoire et la culture de l'Afrique. »
PANAPRESS, "Le Brésil leader dans l'enseignement de l'histoire de l'Afrique" (7 septembre 2011)
à lire :
http://uhem-mesut.com/medu/fr0050.php

Astrid Shriqui Garain
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