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Critique de Pol-Art-Noir


06 juin 1944, le débarquement en Normandie comme si vous y étiez. Premier régiment d'infanterie américain, le grand "Un" rouge, compagnie C, quatrième section, au fond de sa barge :
"Brow regardait vers la France, et la France fumait (...). À perte de vue dans la grisaille on pouvait voir le flotte d'invasion ; mais au ras des vagues cela perdait toute grandeur. Chacun pour soi, dans la morne résignation du troupeau de bêtes qu'on conduit à l'abattoir."
Un vrai carnage... de la quatrième section, seul le sergent Reilly en réchappera. Vingt ans plus tard, il est devenu un des gardiens du cimetière militaire américain d'Omaha Beach, veillant sur l'armada de jardiniers locaux qui entretiennent les gazons impeccables ; il est même marié à une jeune française. La mort d'un de ses "employés", le père Amédée Delouis, va être l'occasion de prises de conscience et de nombreux bouleversements...

Jean Amila commence son récit en décrivant par le détail cette guerre qu'il exècre. Il le fait admirablement, avec des mots d'une justesse infinie qui rendent palpable l'atrocité vécue par les premières lignes, la chair à canon, celle qui ne porte jamais les galons...
Puis vient le sergent Reilly, homme d'honneur, gardien de cette citadelle de la mémoire qu'est le cimetière, ne brillant pas par son intelligence mais droit dans ses bottes. Ses certitudes d'homme simple vont être mises à mal par la mort du père Delouis et la révélation de secrets peu ragoûtants. Reilly est confronté aux magouilles des paysans locaux, décrits comme rapaces et charognards, avides, secrets :
"L'ennui dans la discussion avec un Normand, c'est qu'on ne sait jamais s'il sait. Et il faut toujours agir de l'ai entendu qui laisse savoir qu'on sait qu'il sait qu'on sait ; ce qui va des fois très loin et on ne s'y retrouve plus !"
"Ça ressuintait la haine de Bas-Normands, longtemps retenue, comprimée par des années de sourires et pchitant tout d'un coup, mais en ayant bien soin de ne pas se mettre dans son tort !"
Jean Amila n'aime pas ces gens-là, ce qu'ils représentent, et il sait le montrer, mais il les connaît suffisamment pour pouvoir décrire leurs travers avec un telle pertinence.
Mêlée aux malheurs générés par la guerre, l'auteur nous présente une galerie de personnages simples, humains, pris dans les soubresauts de la violence étatisée, broyés par L Histoire des hommes qui fait de ceux qui tombent au combat des héros. Une histoire de morale formatée, mal placée, alors que la vie est ailleurs, servie par un style d'une clarté éblouissante, simple et travaillé, limpide, où chaque mot est à sa place et où les images sont d'une netteté saisissante :
"Elle avait le goût pour la plonge, comme les âmes droites. Curer, laver, frotter, essuyer. Une façon comme une autre de garder son équilibre."
Un livre magnifique !
Lien : https://polartnoir.fr/livre...
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