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Critique de EvlyneLeraut


« C'est l'histoire d'une traversée. » C'est l'histoire d'un chef-d'oeuvre. Retenez à jamais « Les Singes rouges » entre vos mains. Ce récit se relit mainte fois, à chaque fois, la même impression de ce rare perlé, de ce rythme quintessence, panoplie hyperbolique d'un futur. Cette lecture est une rencontre inestimable avec une trame fabuleuse (en plus sublime), à la Durassienne. Philippe Annocque est un auteur de génie. « Les Singes rouges » est un classique à l'aube née. L'écriture chorale, chuchotée est levant. « L'écriture des singes rouges, qui traversaient le fleuve, ont traversé le temps. Ils ont aussi traversé l'océan. Voilà, c'est pourquoi il a écrit cette phrase inaugurale. » Philippe Annocque est ce « Il » qui écrit. Passage d'une rive à l'autre. Il reçoit un appel téléphonique à 4h36. La litanie élève son chant. Nous sommes dans l'intériorité, ce microcosme invisible dont la gravité est galet, l'heure lourde et risquée. Les mots sont des chapelles. On pleure tant ce récit est la somme des rappels. Ce qui arrime la force des vivants, de ceux qui savent franchir le point d'alliance. Les souvenirs ressurgissent. L'appel téléphonique est l'écho. Nous sommes en plongée dans les images, reflets de la vie de « Il » et de cette enfant qui est la sienne avant l'heure et dans celle d'après. Et c'est beau, poétique et émouvant. « Car pour lui, avant sept ans, Martinique et Guyane étaient à peu près synonymes. C'étaient les noms des pays lointains et différents, l'enfance de sa mère. Les écoles n'y étaient pas en pierre meulière. Les arbres de la cour n'étaient pas des tilleuls élagués. C'était un ailleurs, un ailleurs à deux noms. » L'idiosyncrasie est une toile de maître. Picturale source, où l'on foule les terres chaudes, l'exotique dépaysement, toute cette avancée méticuleuse, soignée, subrepticement murmurée par « Il » dans cette remontée des temps, des années, des jours et des émois. « A l'école, la plupart des enfants sont des Bosch. C'est comme ça qu'on appelle les descendants d'esclaves africains qui se sont échappés dès leur arrivée en Guyane. Les descendants des premiers nègres marrons. » « La nuit on entendait les singes rouges. » Ce récit est la magistrale attitude d'une carte postale qui ne jaunit pas. Celle qui relie les sens, les essences, les souvenirs, dans une nostalgie de velours, quasi mémorielle. « Toutes les histoires ont leur géographie. » Cette phrase si pavlovienne : « Alors peut-être que ça fait sens » est une ode, l'épiphanie des grandeurs. « Les Singes rouges » est culte, un livre des splendeurs. « Il » ne le sait pas. Ses mots de modestie sont des cartographies. « Ses » Singes rouges : une chaîne générationnelle pays des chevelures emmêlées, l'enfance en porte-voix. « Ce n'était plus une jeune femme. Elle était déjà grand-mère depuis plusieurs années. C'était encore une petite fille. » « Les Singes rouges » est un hommage à la Mère, à la vie, au plein de la nuit de 4 h 36. Une référence ! Publié par les majeures Editions Quidam éditeur.
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