Solveig était une louve qui rusait avec les conventions, qui dominait ses colères et savait choisir le moment opportun pour humilier l'adversaire sans état d'âme. Elle savait comme personne que cette arme-là ne pardonnait pas. Surtout lorsqu'il s'agissait des mâles, surtout dans leur monde où la réputation et les apparences faisaient et défaisaient des carrières.
Soigner les " illégaux" est devenu compliqué. Et dangereux. Free World a mis sur pied une chaîne de solidarité clandestine avec la complicité de médecins et d'hôpitaux à travers le pays et même au - delà. Dans la région, l'hôpital Saint-Thomas est devenu leur base avancée la plus active. Depuis 2025, la prise en charge sanitaire d'urgence est assortie de l'obligation pour les hôpitaux de déclarer (plutôt de dénoncer) les sans - papiers. Une fois les premiers soins administrés, ils sont emmenés et transférés vers un centre de contention. Ces centres sont chargés d'organiser leur retour vers le pays d'origine. C'est ce que prévoit la loi. Mais...
Le 18 août 2027, le monde avait cessé de respirer, tétanisé par la catastrophe. Jamais dans l'histoire des hommes, un séisme n'avait fait autant de victimes, autant de dégâts. On estimait qu'il faudrait plus d'une génération pour remettre la Californie sur pied.
Voici ce qu'il se passe : elle est assise dans le verger et commence sa méditation, puis le ciel s'obscurcit ; elle entend la pluie tomber autour d'elle, d'abord doucement puis de plus en plus violemment, l'averse se transforme en trombes d'eau jusqu'à provoquer l'immersion totale de tout ce qui l'entoure. Sauf elle. Elle reste préservée. Elle est le témoin de l'événement, elle en est au centre, mais sans en être la victime. (.....) Le phénomène n'a duré que quelques secondes, mais son ressenti est de plusieurs minutes
L'ignorance et le fanatisme ont déboulé sur le monde. Vanité et cupidité auront préalablement préparé le terrain en creusant leur sillon de placide incurie et d'aveuglement dans le champ fertile de l'insouciance. Maintenant, le mal est fait, le poison est dans nos veines, nos consciences ont fondu au rythme de la banquise, nous sommes restés silencieux, pensant que la démocratie était comme l'air qu'on respire alors que, sous nos yeux clos, la terre enfantait des monstres.
Raconter n'était pas - en soi- le crève -coeur. Le plus difficile était l'évitement : prévenir l'angoisse, conjurer la douleur, écarter l'épouvante.
-On croit tous et toujours qu'il y aura un lendemain, malgré qu'un jour nous mourrons et nous le sachions depuis le jour de notre naissance et même avant
Le commandant redescendit, suivi par Jemal, Sagal et les enfants. Le chauffeur aida d'abord Jemal à grimper, il lui passa les enfants puis Sagal grimpa à son tour. (......)
Le camion s'arrêta au contrôle de douane, mais comme il voyageait à vide, il put reprendre la route sans attendre. Les douaniers ne fouillèrent pas, ce qui n'était pas le cas lorsque les camions entraient au port. Ils étaient scannés et contrôlé attentivement. Les réfugiés tentaient pour la plupart de gagner le Royaume - Uni. Très peu s'engageaient vers le continent.
Le boulanger a tiré sa révérence il y a peu, des suites d'une courte maladie. Comme c'est le troisième mari qu'Olga enterre, on se pose des questions, on chuchote. Elle est belle femme, Olga. Mais les prétendants ne se pressent pas au portillon. Elle reste veuve. Et c'est un état qui lui convient. Les hommes, elle a donné. Et puis elle sent bien qu'ils se méfient, qu'ils gardent leurs distances. Parfois, ils en parlent au Bar du pêcheur. Entre mecs, après quelques bières, en rigolant trop fort suite à une saillie de l'un d'eux à propos de son cul. Elle a ce qu'il faut où il faut, Olga, mais voilà, on reste sur ses gardes. Peut-être pour rien, d'ailleurs.