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Critique de Chri


Et si on tentait de casser le marbre qui donne cette dure impression de monument de la pensée ?

Cette BD s'y emploie résolument : animer le personnage d'Aristote, l'entourer de ses proches, le confronter aux événements, aérer ses lourds traités.

C'est léger comme une visite théâtralisée, qu'on suit comme ça à l'improviste. Mais il manque le jeu. Et on sait que les acteurs se languissent de jouer une “vraie”* pièce.
Ainsi j'ai aimé tourner des pages d'histoire antique, mais le dessin subordonné au texte, rend aussi ce dernier plus lourd.

Patience. Je reste, pour ainsi dire, assis au fond de la classe à suivre les cours d'Aristote, en attendant qu'il se passe quelque chose. Nul doute que sa manie de modéliser tout ce qui passe à sa portée fera des émules. Mais je rêve que ses catégories, ses genres et ses tableaux, s'écroulent d'un seul coup.

Et voilà qu'enfin apparaissent des couleurs ; des propos qui questionnent, comme ici : « Les beaux-arts sont réservés aux plus riches pour amuser gratuitement leurs amis, ou aux esclaves ».

Puis c'est la faille. Béante.

-A son élève Alexandre, Aristote déclare : « les barbares sont inférieurs aux grecs ».
-Plus loin, il demande à son Ami Théophraste : « comment une société aussi organisée que celle des abeilles pourrait-elle être dirigée par une femelle ? »
-Théophraste résume : « tu as vraiment un blocage avec les femmes et les étrangers… »

D'où lui vient ce blocage ou cette faille ?
Lui, qui s'est peut-être toujours senti étranger : « j'ai erré de longues années…toujours métèque ». Un macédonien à Athènes etc…

En relisant, on s'arrêtera encore sur d'autres détails. C'est ça aussi, le plaisir de la B.D.

Comment cette faille, se propage t'elle au coeur de la philosophie d'Aristote ?

Et à moins d'être bloqué, comme Aristote, avec les femmes et les étrangers, peut-on s'identifier sans hésiter comme aristotélicien.ne ** ?

Bref, après cette BD (et après la lecture de Barbara Cassin) me voilà très près de me lancer dans l'un des lourds traités d'Aristote.

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Notes personnelles :
** 2 expressions de Barbara Cassin : “Nous tous, aristotéliciens”, “Nous modernes”
* Deleuze : “le masque est la vérité du nu”
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